La commission d'enquête mixte, dépêchée par le Premier ministre Abdelmalek Sellal, a passé une journée sur le site de l'unité d'assemblage des véhicules Hyundaï de Tiaret appartenant à Kheireddine Tahkout. Une journée qui aura suffit pour la vingtaine de personnes qui compose la commission dont notamment des cadres de l'Inspection générale des finances, de l'Inspection générale des douanes et de l'Inspection générale de l'Industrie, pour déclarer, à la fin de la visite d'inspection, avoir suivi le processus de montage des véhicules Hyundai depuis le début et qu'aucune anomalie ou dysfonctionnement n'a été relevé. Elle a conclu au respect par Tahkout moto Compagny (TMC) du processus d'assemblage en SKD, conformément au cahier des charges du gouvernement, a rapporté hier, une chaîne de télévision privée. Les membres de la commission ont même félicité les employés de TMC pour le travail effectué dans l'unité. «Elle m'a félicité», a confirmé à un journal électronique l'homme d'affaires ajoutant que «cette commission confirme que je n'aie rien à me reprocher. Et les portes de notre usine lui seront toujours ouvertes». Ainsi les conclusions de la commission viennent de «blanchir» Mahieddine Tahkout des soupçons de l'arnaque dont il a fait l'objet après la diffusion sur les réseaux sociaux de photos montrant des véhicules Hyundai neufs et emballés où seules les roues étaient démontées. Il lui était donc reproché d'importer des véhicules entièrement assemblées dans des containers pour les revendre en l'état bénéficiant ainsi d'importantes exonérations fiscales accordées par le gouvernement. Les photographies avaient suscité une grande polémique amenant le patron de TMC a déposé une plainte contre X pour «diffamation» avant d'inviter les journalistes à visiter son usine et de multiplier les déclarations à la presse afin de se défendre. Tahkout a, dès le début de la campagne menée contre lui, accusé, sans les citer, des concurrents. Dans un communiqué rendu public par TMC, le Groupe Tahkout a expliqué que «TMC a commencé par l'assemblage des véhicules comme l'ont fait précédemment deux autres constructeurs de renommée mondiale en Algérie en appliquant le principe du SKD qui demeure le plus simple et le plus adapté à notre pays, dans le sens où il applique une formule d'assemblage de kits assez simple» rappelant que l'usine «de montage a été réalisée en un temps record qui ne dépasse pas les 9 mois». L'entreprise a indiqué également avoir lancé un deuxième projet d'usine, «encore plus complexe, qui demande plus de technicité et un investissement assez conséquent ainsi qu'une main-d'œuvre très qualifiée comparée aux industries du SKD. Ce projet, dit de CKD, a été entamé, et une grosse partie de ce projet est déjà en cours de réalisation telle que la mise en place des lignes de production et la construction des ateliers de soudage et de peinture, un projet qui voit le jour graduellement et sera finalisé dans peu de temps. Le projet de l'intégration des composants et de pièces produites en Algérie par des entreprises algériennes, viendra compléter les efforts fournis par les équipes ayant participé à la concrétisation du premier projet d'assemblage». Il y a lieu d'expliquer à ce propos le principe de montage SKD qui est l'acronyme de l'expression anglaise : Semi knocked down. Il s'agit d'une technique qui consiste à livrer des voitures en pièces détachées permettant au pays acquéreur, comme l'Algérie, à créer de l'emploi et de bénéficier d'un prix concurrentiel sur son territoire. Mais ce principe est également fructueux pour les entreprises mères, qui vont éviter des droits de douane élevés. Il faut rappeler cependant que le gouvernement qui a fait obligation aux concessionnaires automobiles d'installer une activité industrielle ou de service dans un délai de trois ans, a également imposé un cahier des charges à respecter dont la réalisation d'un taux d'intégration minimum de 40% sur 5 ans et la création d'un certain nombre d'emplois et cela afin de bénéficier des exonérations fiscales. Après l'éclatement de la polémique autour de l'usine de Tahkout, le ministre de l'Industrie, Abdelslam Bouchoureb, avait d'ailleurs déclaré «Hyundai vient de démarrer, mais nous l'observons. Si on ne voit pas qu'il y a une amélioration dans le taux d'intégration, le contrat sera rompu (…) Le principe sera le même pour tous les constructeurs, pour garder leur part du marché, ils ont intérêt à monter en cadence vers le niveau de 40% du taux d'intégration. Les facilités fiscales seront liées à l'amélioration du taux d'intégration». Pour revenir au cas de l'usine d'assemblage Hyundai de Tiaret, le patron de TMC a affirmé qu'en matière d'intégration, l'usine assurera, à partir de la deuxième année, un taux de 15% avant de se faire valoir un taux de 42% à la 5e année, et ce, en partenariat avec une firme iranienne. Mais actuellement, l'usine atteint à peine un taux de 5 à 6% d'intégration à en croire, Kim Sangyoul, le directeur général de l'usine Hyundai à Tiaret. Cité par un média électronique, ce dernier a évoqué l'objectif des 15% prévu d'ici trois ans par le cahier des charges. Il a également répondu à la polémique en expliquant «c'est ridicule ! Nous sommes un géant mondial. Nous ne sommes pas venus de la Corée du Sud jusqu'à Tiaret pour placer uniquement des pneus (…) Nous faisons du SKD. C'est un début. Ensuite, nous passerons au CKD, à savoir l'assemblage complet du véhicule, ici dans notre usine (…) Nous avons une longue expérience dans l'industrie automobile. Notre objectif est de transmettre le savoir-faire sud-coréen aux Algériens. Pour ce faire, il y a des étapes à franchir». Kim Sangyoul a révélé également qu'un institut supérieur de formation des techniciens dans les métiers électroniques et mécaniques sera bientôt lancé par Hyundai à Tiaret en partenariat avec le Groupe Tahkout. En ce qui concerne le nombre d'employés qui activent à l'usine de Tiaret, le flou persiste. A la veille du lancement de l'usine d'assemblage, Mahieddine Tahkout avait annoncé que le projet offrira, dans sa phase de production, 400 postes d'emploi pour atteindre progressivement 1 500. Ces derniers jours, les déclarations des responsables de l'usine de Tiaret ont donné des nombres différents des emplois créés. En ce qui concerne la production, la capacité de l'usine devait, comme annoncé au lancement, s'étaler sur trois phases, à savoir 25 000, 50 000 puis 75 000 unités d'ici la fin de l'exercice 2017 avant d'atteindre les 100 000 unités à l'horizon 2020. Depuis son lancement en octobre 2016, l'usine a produit 5 000 modèles. Mais selon ses responsables, ces chiffres concernent la phase de démarrage, le but étant de doubler cet objectif prochainement. Enfin la question qui s'impose après que les membres de la commission mixte dépêchée par le Premier ministre aient blanchit Mahieddine Tahkout de tout soupçon, est celle de savoir si les photographies qui ont circulé sur les réseaux sociaux montrant des voitures neuves sous cellophane avec des roues démontées sont truquées ? Ou est-ce réellement ce que prévoit la formule SKD validée par le ministère de l'Industrie et des Mines ? A bien voir, c'est au ministère de l'Industrie d'expliquer la signification du SKD et du montage de kits ? H. Y.