Le président Emanuel Macron a revêtu rapidement le treillis militaire de François Hollande au Mali, mais en montrant plus de volonté et de détermination à «accélérer» le dispositif Barkhane (4 000 hommes). Tout en désirant s'impliquer davantage sur le plan diplomatique et en matière d'aide au développement. Et tout en y associant l'Europe et encore plus l'Allemagne déjà fortement présente dans la force onusienne de la Minusma (12 000 hommes) où elle assure des missions d'appui. C'est ce qui ressort en tout cas de son point de presse hier à Gao au Nord-Mali, où il a annoncé d'emblée le déblocage d'une aide au développement (470 millions d'euros). Il a ensuite souhaité assister au prochain sommet du G5 Sahel qui regroupe le Mali, le Tchad, le Niger, la Mauritanie et le Burkina Faso, pays où est justement déployée la force d'intervention Barkhane qui a succédé au dispositif Serval lancé en 2012. Le président Macron donne l'impression de s'inscrire clairement dans une logique de changement dans la continuité. Comparativement à son prédécesseur à l'Elysée, il veut développer toutefois une action triple : militaire, diplomatique et économique. Il semble convaincu que ces trois volets sont d'autant plus inséparables que le terrorisme se nourrit du terreau de la misère sociale et du dénuement économique, et que l'action militaire ne serait vraiment efficace et n'aurait de sens que si elle était suivie par l'activité diplomatique permanente. On comprend donc et d'autant mieux son souci de placer son action globale dans le cadre de l'Accord inter-malien d'Alger (2015). Il a beaucoup insisté sur ces accords favorisés largement par la diplomatie algérienne et qui sont à ce séjour le seul plan de paix inclusif au Mali. Accord qu'il tarde de concrétiser sur le terrain, comme semble en être le souhait d'Emanuel Macron qui s'y est dit attaché. «Les accords d'Alger sont le cadre politique de la résolution du conflit et nous devons soutenir leur application, qui est pour le moment trop lente», avait glissé un conseiller du Président français à un journaliste parisien à la veille de son déplacement au Nord-Mali. A Gao, c'est Macron, chef de guerre et patron des armées françaises qui parlait. Et c'est en cette qualité qu'il a laissé entendre que la France poursuivra certes son effort de guerre contre le terrorisme, mais qu'elle n'en supporterait plus les coûts, notamment financiers, à elle seule. On comprend à travers ses propos qu'il entend que l'Union européenne, et en premier lieu l'Allemagne, devrait faire plus d'efforts à ce sujet. La sécurité de l'UE est indissociable de celle de la région sahélo-saharienne, et la France, qui y combat seule le terrorisme et qui est la seule à pouvoir le faire, assure, du même coup, celle de l'Europe, a martelé le président Macron. Comprendre, en langage moins diplomatique : jusqu'ici nous raquions pour vous, il est donc temps que vous casquiez ! A Gao, le successeur de François Hollande semble avoir intégré l'idée que l'option militaire, aussi importante soit-elle, limite les dégâts, contrecarre des plans maléfiques, mais ne résout pas en fin de compte le problème. Et pour cause. Serval et Barkhane n'ont pas empêché les groupes terroristes de s'adapter, de se redéployer, de se regrouper, de se fédérer, de développer de nouvelles capacités de nuisance et, surtout, de conquérir de nouveaux territoires au centre et au sud du Mali. Le terrorisme se combat mutuellement, sur plusieurs fronts, inlassablement, et surtout pas seul ! Plate évidence à laquelle semble s'être rangé le jeune et pragmatique chef de l'Etat français. N. K.