«L'argent ne fait pas le bonheur.» L'adage est employé à tort et à travers, mais il convient particulièrement à la situation de l'agriculture en Algérie. Cela fait deux jours, en effet, que le président de la République a annoncé l'effacement des dettes des agriculteurs et des éleveurs. Cela fait aussi à peu près huit années qu'il avait annoncé, en grande pompe, l'adoption d'un ambitieux programme d'aide publique à l'agriculture. Cette aide de l'Etat a été concrétisée par plusieurs dispositifs, dont le plus connu est le Plan national d'aide à l'agriculture. Il faut dire que ce plan a créé effectivement des milliers d'emplois et a permis une production abondante dans certains domaines, notamment les cultures maraîchères et fruitières… Cela se voit sur les étals des marchés, même si les prix ne suivent pas. Mais il faut également mentionner un fait grave : ces aides, monumentales, ont souvent été détournées par une maffia locale impitoyable, au vu et au su de tout le monde. Mais le propos n'est pas là. Parce que ce plan, si ambitieux soit-il, risque de subir le sort de ceux qui l'ont précédé. Et ils sont aussi nombreux que les hommes qui ont gouverné le pays depuis l'indépendance : de la Révolution agraire de Houari Boumediene à la mise en valeur des terres de Chadli. Tout a été tenté pour produire le même résultat, ou presque : l'Algérie est toujours dépendante dans son alimentation et la facture d'importation ne cesse de suivre une courbe ascendante. A qui la faute ? Surtout pas aux agricultures. Mais bien aux pouvoirs publics. Parce que depuis l'indépendance, l'essentiel des mesures ont souvent été populistes. Autrement dit, les décisions ont été prises juste pour satisfaire des revendications du moment sans penser aux problèmes de fond. C'est ainsi que l'on a préféré, par exemple, la solution de facilité qui fait qu'on importe du lait au lieu d'adopter une vraie politique pour la filière –une manière, peut-être, de maintenir le créneau très porteur de l'importation de la poudre ?- qui privilégierait l'élevage ovin et bovin. Il en est de même pour les viandes et les céréales. Autant dire les filières stratégiques. Mais au lieu d'une véritable stratégie -qui ne s'appuie pas uniquement sur l'effort financier- ceux qui ont en charge le secteur se sont contentés, jusque-là, de rafistolages conjoncturels et de solutions momentanées. N'est-il pas plus judicieux d'appliquer une véritable politique agricole capable de prémunir le pays d'éventuelles conséquences fâcheuses d'une très grande dépendance alimentaire ? Et ce qui apparaît presque étrange aux yeux du simple paysan, c'est cette réticence à aider les vrais opérateurs du secteur. Et ce ne sera pas une première, puisque même les pays les plus ouverts économiquement le font pour sauvegarder leur agriculture. Pourquoi pas nous ? A. B.