L'Algérie vient de perdre un de ses plus valeureux enfants. L'ancien Chef de gouvernement, militant, moudjahid, diplomate, homme politique et patriote Rédha Malek est décédé, hier, à l'âge de 85 ans, des suites d'une longue maladie. Le défunt a servi son pays depuis son jeune âge et n'a cessé de le faire, du mieux qu'il pu et tant qu'il le pouvait, tant que sa santé le lui permettait. Né à Batna le 21 décembre 1931, feu Rédha Malek a été un des membres fondateurs de l'Union générale des étudiants musulmans algériens (Ugema) en 1955. Titulaire d'une licence en lettres et philosophie de l'Université d'Alger, il sera tout désigné pour être à la tête du journal El Moudjahid, hebdomadaire du Front de libération nationale (FLN), qu'il dirigera de 1957 à 1962. Il entrera dans le monde de la diplomatie par la plus grande porte : il est porte-parole de la délégation algérienne aux négociations des Accords d'Evian de mai 1961 à mars 1962. Le défunt sera aussi un des rédacteurs du programme de Tripoli en 1962. A l'indépendance, Rédha Malek, qui avait déjà fait ses preuves en diplomatie, y entame une carrière qui durera près de 30 ans. Il est nommé, dès 1962, ambassadeur en Yougoslavie, France, Union Soviétique, Etats-Unis et Grande-Bretagne, avec une parenthèse en 1977 comme ministre de l'Information et de la Culture. Fin diplomate, il se distinguera dans les années 1980 dans l'affaire des otages américains à Téhéran (Iran). De novembre 1980 à janvier 1981, il a été un des principaux négociateurs qui avaient réussi à obtenir la libération des 52 employés de l'ambassade américaine à Téhéran pris en otages par des étudiants iraniens. Les Etats-Unis, par la voix de leur président, Jimmy Carter, avaient alors remercié l'Algérie et salué sa médiation. Après l'arrêt du processus électoral en 1991, Rédha Malek est nommé, le 26 avril 1992, Président du Conseil consultatif national, jusqu'au 3 juillet de la même année où il est 5e membre du Haut Comité d'Etat (HCE). Il revient à la diplomatie comme ministre des Affaires étrangères avant d'être désigné le 21 août 1993, chef du gouvernement, poste qu'il occupera jusqu'à avril 1994. C'est à ce combattant acharné de tous les ennemis de la liberté, la démocratie et des droits fondamentaux que nous devons la fameuse phrase à propos du terrorisme en Algérie : «La terreur devait changer de camp.» Et c'est pour défendre ces mêmes principes qu'il fondera, en 1995, le parti Alliance nationale républicaine (ANR) dont il sera le président. Et quand nous lui posions la question de savoir si cette profusion de partis et l'entrée en scène tonitruante de la jeune presse indépendante ne risquaient pas de desservir la démocratie, aura cette réponse sibylline : «La démocratie comme la presse en Algérie vivent leur crise d'adolescence.» Rédha Malek a certainement dû avoir de nombreux pincements au cœur de voir que cette crise n'a cessé de se prolonger, et que ni la démocratie ni la presse n'ont encore atteint l'âge de raison. Parallèlement à son travail de diplomate et de politique, Rédha Malek a aussi investit le monde de l'écriture. Il est l'auteur de nombreux ouvrages dont L'Empreinte des jours, Guerre de libération et révolution démocratique : écrits d'hier et d'aujourd'hui, L'Algérie à Evian : histoire des négociations secrètes, 1956-1962, Arrêt du processus électoral, enjeux et démocratie, Tradition et révolution et le Véritable enjeu : l'enjeu de la modernité en Algérie et dans l'islam. Rédha Malek sera inhumé aujourd'hui au Carré des Martyrs du cimetière d'El Alia après la prière du Dohr. H. G.