Photo : Riad Par Wafia Sifouane Depuis son apparition au début des années 1830 en Suisse grâce aux œuvres de Rodolph Topffer, la bande dessinée, communément appelée BD, considérée comme le 9e art, a fait du chemin et conquis du monde sur les cinq continents. Les personnages, réels ou imaginaires, dessinés et s'exprimant en bulles ont conquis petits et grands. Dès ses débuts, bien que modestes, la BD a eu vite fait de fidéliser une masse de lecteurs via les revues et les journaux satiriques de l'époque. Après avoir fasciné les plus grands, les bédéistes ont trouvé la recette pour faire entrer cet art dans le monde de l'enfant. Le succès fut immédiat. Très vite, la BD est devenue le compagnon n°1 des gosses. Ils ont enfin trouvé un art qui leur parle dans un langage des plus simples. Quelques personnages dotés de super pouvoirs ou rigolos, quelques répliques courtes et compréhensibles, et le tour est joué. En effet, les enfants apprécient beaucoup la bande dessinée. Car, derrière son langage humoristique et ses histoires désopilantes, elle véhicule de véritables messages didactiques et se pose comme un moyen pédagogique qui inculque aux plus jeunes les règles basiques de la vie en communauté et leur montre la dualité entre le bien et le mal. On constate aussi que les super héros de BD, à l'instar des Spiderman, Batman ou encore du fameux Superman, qui, dotés de pouvoirs extraordinaires, s'emploient à combattre le mal, n'ont pas tardé à devenir les idoles des enfants. Mais c'est aussi une source de revenus pour leurs producteurs qui ont fait des produits dérivés (jouets, tee-shirts…) un marché fructueux ne cessant de s'étendre et de prendre de l'importance. La bande dessinée a connu un tel succès planétaire que les majors de la production cinématographique américaine n'ont pas hésité à investir pour faire vivre les héros de BD en 3 dimensions dans des films d'animation à gros budget. Des stars prêtent leurs voix aux personnages imaginaires. Ce nouveau genre de film a conquis le box-office. Aucune production cinématographique n'a pu détrôner un film d'animation, dont le scénario et les personnages sont directement tirés de bandes dessinées, à sa sortie. S'agissant de l'apport pédagogique, la bande dessinée a démontré à plusieurs reprises son rôle important dans l'éducation des enfants et des adolescents à qui, tout en les distrayant, elle apprend à lire et inculque les valeurs morales, la bravoure, le courage, la gentillesse et le savoir-vivre. L'Algérie n'a pas échappé à la fièvre de la bande dessinée. Cet art a connu ses heures de gloire dès les premières années de l'indépendance. En ces temps, les enfants et les jeunes Algériens avaient les BD et les illustrés made in France. Toute une génération a grandi avec les Pif Gadget, Popeye, Blek le roc, Kebir et bien d'autres héros. Dans les années 1980-1990, des revues spécialisées déstinées aux enfants telles que Richa et M'Quidech enrichissent le paysage de la BD. Mais après ces années de franc succès, une traversée du désert pointe. Ne restent que les BD venues d'outre-mer. Les inconditionnels des bulles se constituent des réseaux pour dénicher les derniers Lucky Luke, Gaston Lagafe, Astérix, Iznogoud ou Achille Talon. La foire du livre, ancêtre du Salon international du livre d'Alger, était un rendez-vous attendu. Les éditeurs français et belges avaient toujours une bonne place pour les BD dans leurs stands. Une occasion en or pour s'approvisionner et constituer un fonds pour les échanges. La situation restera en l'état et ni les responsables de la culture ni ceux de l'éducation n'ouvriront les yeux sur l'importance de cette «littérature» originale et ne songeront à lui aménager une place à l'école et dans les bibliothèques. De leur côté, les éditeurs, faisant face aux nombreux problèmes qui se posent pour le livre, restent frileux quant à la publication des BD qui, de plus, nécessitent des équipements, donc des investissements dont on a plus besoin ailleurs. C'est ainsi que la BD s'est retrouvée marginalisée, ignorée, jusqu'à ces derniers temps où on voit quelques frémissements qui ont donné naissance à un Festival international de la bande dessinée qu'Alger a accueilli le 15 octobre 2008. La manifestation a connu un certain succès auprès du jeune public. Le festival a aussi donné l'occasion à de jeunes bédéistes algériens de côtoyer les professionnels étrangers, de se perfectionner dans des ateliers de travail et de présenter leurs travaux et créations. Il y aura même quelques éditeurs qui dévoileront des nouvelles images de la bande dessinée algérienne. A l'exemple de HB éditions de Skikda qui a investi le domaine de la BD, et qui a réussi en un laps de temps record a établir son réseau national, et cela en impliquant un certain nombre de jeunes bédéistes algériens dans la réalisation de ses produits. En somme, plus qu'un petit livret contenant des dessins et des bulles, la bande dessinée représente toute une institution, un passage obligé pour chaque enfant. Au-delà de son humour et avec ses héros et héroïnes, ses personnages atypiques, ses mondes fantastiques, la BD demeure l'alliée de la jeunesse.