Ils proposent tous la démocratisation des institutions et le respect des libertés individuelles et collectives. Mais chacun à sa manière, selon le contenu qu'il donne à ces concepts. Les six candidats à la présidentielle du 9 avril prochain y vont, chacun en ce qui le concerne, de leurs slogans, de leurs promesses. L'officialisation de tamazight comme deuxième langue nationale, après l'avoir constitutionnalisée en tant que telle en 2002, l'abrogation du code de la famille, la promulgation des lois civiles, le refus de la politique des quotas, le parachèvement du traitement des séquelles de la tragédie nationale avec notamment la prise en charge du problème des disparus, feront partie du discours électoral de la secrétaire générale du PT pendant trois semaines, sur le plan politique. Le dossier des disparus, dont le Parti des travailleurs, au nom duquel Louisa Hanoune se porte candidate, était la première formation politique à en briser le tabou, s'attirant ainsi les foudres de Ahmed Ouyahia, alors chef du gouvernement de Liamine Zeroual. Un dossier que le PT a pris en main et aidé les concernés à fonder l'Association des familles des disparus que Ouyahia avait juré devant la première Assemblée populaire nationale pluraliste ne jamais agréer. L'indépendance de la justice ne saurait, selon la candidate, être consacrée sans le recours aux élections des juges par leurs pairs, les soustrayant ainsi à toute injonction ou pression politique de la tutelle ou tout autre groupe. Parce qu'ils seront révocables, les magistrats réfléchiront à deux fois avant de se soumettre aux injonctions ou encore à la corruption. C'est cette même révocabilité qu'elle revendique pour tous les élus. Du président d'APC au premier magistrat du pays en passant par les députés. Pour ce faire, l'appel à organiser des élections législatives anticipées et la suppression du Sénat avec comme fer de lance le respect du mandat donné par les citoyens. Ceux-là sont réellement pris en charge dans le programme politique de Mme Hanoune puisque si elle arrive à décrocher le billet pour El Mouradia, elle leur donnera le droit de pétitionner, de saisir par le biais de leurs représentants le Conseil constitutionnel. Des revendications, un programme que l'on ne trouve pas chez les autres candidats ou alors très peu. Notamment en matière de libertés individuelles. Révision du code de l'information Abdelaziz Bouteflika, qui brigue un troisième mandat, propose très peu de nouvelles choses, s'appuyant surtout sur le parachèvement de ce qui a déjà été entamé durant les dix dernières années. Ainsi, il compte poursuivre la réforme de la justice, qui n'a touché, faut-il le souligner que l'administration de cette instituion pour le moment. Reste que le justiciable attend de Dame justice qu'elle fasse ses preuves pour regagner sa confiance. La condition pour ce faire demeure la démocratie pleine et entière que le candidat Bouteflika s'engage à garantir d'avantage. «La garantie des libertés démocratiques et des droits de l'homme mobiliseront toujours nos énergies», lit-on dans son programme électoral. Dans lequel, par ailleurs, la levée de l'état d'urgence n'est nullement abordée, pas plus que sa soumission potentielle au Parlement pour qu'il statue sur son maintien ou sa suppression. La liberté de la presse est partie intégrante des libertés, de la démocratie et des droits de l'homme. Bouteflika s'engage à la protéger, sans dire comment. Surtout que la menace sur plusieurs organes plane à chaque fois que l'un d'eux s'essaie à des critiques non tolérées. Dès lors, c'est l'argument commercial, longtemps mis sous silence, qui est brandi et les récalcitrants sont sommés de payer leurs dettes rubis sur ongle. Sur les droits des femmes, Bouteflika semble enfin avoir écouté la gent féminine qui n'a eu de cesse de clamer que la promotion de la femme et le renforcement de sa place sur le marché de l'emploi, en politique comme dans les syndicats, ne saurait se concrétiser sans les conditions à même de lui permettre de s'engager dans la vie active. Aussi, lit-on dans son programme, un «programme de construction de crèches sera réalisé pour faciliter la participation des femmes à la construction de la nation (…) » Ce n'est pas tout. Bouteflika préconise de revoir le code électoral dans lequel il consacrera le système des quotas. C'est à croire que l'on va assister à plusieurs projets sur le même sujet. Puisque déjà deux propositions de loi amendant la loi électorale sont au niveau du Parlement. Cela, en plus du code communal et de wilaya qui seront revus en parallèle avec le nouveau découpage territorial et la modernisation de l'administration. Ce que le candidat Bouteflika appelle la gouvernance électronique. Régime parlementaire Foncièrement pour un régime parlementaire, le Front national algérien l'est à plus d'un titre ; son président ne se lassant jamais de le marteler. Fort d'une quinzaine de parlementaires et de centaines d'élus locaux, Moussa Touati compte sur leur travail pour mobiliser les «zouaoula» autour de son programme. Pour lesquels il promet justice et équité. Dans son programme politique, outre le régime parlementaire qui, selon lui, est le seul garant du contrôle du législatif sur l'exécutif, le FNA s'engage à respecter le multipartisme et le droit à la différence, le respect de la volonté populaire dans le choix entre les hommes et les programmes, feignant d'oublier que ce sont ces derniers qui portent les premiers et qu'en principe le choix se fait sur la base de programmes et non de personnes. Le candidat du FNA préconise également de rajeunir l'Etat dans le cadre de l'alternance des générations. Comme si l'Algérie se débattait dans un conflit de générations et de système. Sur le plan de la démocratie, M. Touati reprend à son compte les slogans de la pluralité et des libertés démocratiques, somme toute limitées pour ce qui concerne les femmes. En ce sens qu'il compare le code de la famille au Coran et que par conséquent il est interdit d'y toucher. Pour les femmes qui travaillent, le FNA ne propose absolument rien en termes de protection contre le harcèlement sexuel, le bannissement de toute forme de discrimination à leur égard. Pour celles au foyer, il s'engage à promouvoir son activité à domicile. Mais il ne dit pas comment. Priver tout corrompu d'accéder aux affaires publiques Rompu à la vie politique de par les fonctions qu'il a occupées, ce retraité, ex-cadre de l'Etat, présente aux électeurs un programme fort ambitieux. Et avec force détails. Ainsi en est-il du domaine politique qu'il a scindé en deux parties. D'abord sur le plan constitutionnel. Mohamed Saïd, c'est de lui qu'il s'agit, veut amender la loi suprême du pays s'il est porté au palais présidentiel. Les changements qu'il compte apporter concernent l'instauration du régime parlementaire (le gouvernement au parti qui obtient la majorité aux législatives). Le Conseil de la nation sera maintenu de manière transitoire. Il propose de limiter les mandats présidentiel, parlementaire et communal à un seul, renouvelable une seule fois. 40 ans, c'est l'âge requis pour se présenter à l'élection présidentielle. Cela ne semble pas agréer le bras droit de Ahmed Taleb Ibrahimi qui aimerait voir plus de jeunes émerger en politique et prétendre gérer les affaires du pays. Aussi, préconise-t-il d'abaisser l'âge à 35 ans. Le droit de pétitionner figure parmi les projets de Mohamed Saïd. En plus clair, l'initiative des lois ne sera plus l'apanage du gouvernement ou des députés. Les citoyens auront ce privilège à condition que le texte qu'ils veulent voir adopter recueille 1 000 000 de signatures. Une gageure en somme. Idem pour la saisine du Conseil constitutionnel qui est pour le moment du ressort du président de la République, des présidents du Sénat et de l'APN. Le candidat de l'espoir prône que cette saisine soit élargie aux partis politiques et aux députés. Tout comme pour Louisa Hanoune, la tragédie nationale a laissé beaucoup de séquelles. Il s'agit pour M. Saïd de les effacer. Concernant les libertés d'association et d'organisation, c'est en filigrane que l'on comprendra que ce candidat propose carrément que ces contre-pouvoirs activent sur simple déclaration. Des contre-pouvoirs qui contribueront à lutter, entre autres, contre la corruption. D'ailleurs, Mohamed Saïd ne va pas par 36 chemins. Tranchant, il privera, via une batterie de lois, toute personne reconnue coupable de corruption ou de délit (homme politique, cadre, élu), de toute activité politique, syndicale ou associative. L'amnistie pour réconcilier les Algériens L'amnistie générale. Pas moins. Le projet de Djahid Younsi se veut quelque part racoleur de l'électorat islamiste comme il aime à la répéter dans ses interventions publiques. Il insiste tellement sur la question que d'aucuns s'interrogent sur les véritables visées de son parti, en perte de vitesse, faut-il le rappeler, depuis les législatives de 2007. Se qualifiant comme opposant radical au système en place, DjahidYounsi tire son programme, comme il se plaît à le dire, de la tradition musulmane. La religion a tout donné. Liberté, respect d'autrui, bonne gouvernance et même tous les droits aux femmes. Le premier responsable d'El Islah va jusqu'à proposer l'amendement du code de la famille, estimant qu'il ne promeut pas assez la moitié de la population. Celui qui se présente comme l'unique adversaire de Abdelaziz Bouteflika dans ces joutes électorales est extrémiste dans ses propositions, notamment sur le plan politique. C'est le cas de la Constitution, qu'il compte réviser s'il était élu, notamment dans son article 73, relatif aux conditions d'éligibilité à la fonction de président de la République qu'il veut élargir à toutes les autres fonctions électives, telles que la députation, les institutions exécutives, représentatives et judiciaires. Il veut également revisiter le code de la nationalité sans pour autant préciser ce qu'il compte y amender dans le texte. F. A.