Photo : Sahel De notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani C'est par une standing ovation ponctuée de youyous et de vivats que Louisa Hanoune a été accueillie par plus d'un millier de personnes, venues avant-hier vers 10 heures assister à son meeting au Théâtre régional Azzeddine Medjoubi de Annaba. Auparavant, la candidate du Parti des travailleurs avait «fait un tour» du côté de La Place d'Armes, dans la vieille ville, où elle y a passé son enfance. Elle ira à la rencontre de certains de ses anciens voisins, avec lesquels elle aura un entretien à bâtons rompus ; ce après quoi elle se promènera à travers les ruelles de son quartier d'enfance. Un retour aux sources et une sorte de pèlerinage sur les lieux où elle a passé les meilleures années de sa vie avant d'embrasser une carrière politique qu'elle a plus ou moins réussie. Au Cours de la Révolution, elle sera assiégée par des centaines de citoyens qui voulaient la saluer avant de rejoindre le théâtre régional situé à quelques mètres de là. Dans l'enceinte du TRA, elle entamera son discours par un constat, les mêmes propos qu'elle a tenus lors de sa visite de la vieille ville :«C'est un crime contre le patrimoine national, lancera-t-elle, que de démolir des édifices séculaires témoins de l'histoire du pays. C'est la dégradation continue de ce patrimoine, symbole de l'unité des tous les Algériens parce qu'abritant toutes les communautés et ethnies et où Chaouis, Kabyles, Mozabites et Arabes y vivaient en symbiose et rien ni personne ne pouvait les séparer. Aujourd'hui, tout ou presque a disparu ; il n'en reste que gravats et détritus ; ce patrimoine est le nôtre, c'est toute l'Histoire de Annaba qui y est inscrite.» Dans son fief, la pasionaria, convaincue qu'elle agissait en terrain conquis, évoquera le cas de familles habitant la vieille ville qui attendent depuis les années 1970 un hypothétique logement et qui vivent toujours dans des «trous». «Oui, ce sont des trous et je le dis haut et fort ; c'est un véritable ghetto où les conditions de vie sont déplorables et je ferai tout pour que cela change, pour que tous aient droit à un logement décent, c'est l'un des points qui me tient à cœur. Si je suis élue présidente de la République la situation changera et dans notre parti nous avons notre vision de l'Algérie des années à venir. Nous, nous n'avons pas vendu le complexe sidérurgique d'El Hadjar, l'un des meilleurs en Afrique ; nous n'avons pas vendu non plus Asmidal et mis au chômage des milliers d'Algériens. Annaba a été “égorgée” sur l'autel de la privatisation, une privatisation dont l'échec a été reconnu par les responsables eux-mêmes. Il faut corriger tout cela ! Nous, nous ferons comme l'a fait Chavez au Venezuela : nous allons procéder à la nationalisation des outils de production. Chavez est soutenu par le peuple et par les classes laborieuses, il ne veut plus de la Banque mondiale, ni du FMI. Qu'est-ce qui est arrivé après ces décisions ? Rien ! Nous, les Algériens, nous n'avons peur de personne ; nous l'avons prouvé à plusieurs reprises et nous n'avons de leçons à recevoir de personne.» Abordant la question des harragas, elle parlera de Sidi Salem, petite localité côtière, devenue le point de départ de centaines d'embarcations de candidats à l'émigration clandestine : «Comment est-ce- que de jeunes Algériens peuvent-ils risquer leur vie en affrontant tous les dangers de la mer alors que l'Algérie dispose de 140 milliards de dollars de réserves de changes ? Non ! Nous resterons ici ! C'est notre pays et h'na imout Kaci !». Expression reprise en chœur par des dizaines de jeunes présents dans la salle ; les youyou fusent de toutes parts et les applaudissements emplissaient la salle : «Nous sommes avec toi Louisa !», répétait à l'unisson l'assistance. «Rien n'excuse l'Algérie, lance-t-elle, et nous allons changer tout cela ; il nous faut le modèle de Hugo Chavez, car il faut rendre sa souveraineté au peuple ; il faut lui rendre la parole comme au Venezuela !» Tout au long de son discours, qui a duré 60 minutes exactement, le nom de Chavez revenait comme un leitmotiv. La dame louait les décisions de l'homme, sa politique sociale, son opposition aux multinationales et les nationalisations qu'il a réussies. La salle qui vibrait aux sons de la voix de la candidate du PT buvait ses paroles et en redemandait tout en applaudissant. Il faut dire que Louisa Hanoune, en dehors du fait qu'elle s'est retrouvée dans son fief, a tenu un discours qui a porté et convaincu ; elle risque de créer la surprise à Annaba le jour de l'élection présidentielle.