Photo : S. Zoheir Par Ali Boukhlef Entre l'amère réalité dans les relations entre les pays du Nord et ceux du Sud et les discours circonstanciels des institutions européenne, le président de l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, Luis-Maria de Puig, a préféré, lui, prêcher la bonne parole. C'est presque du surréalisme. Au cours d'une conférence-débat organisée hier au siège du Conseil de la nation à l'issue de sa visite de deux jours en Algérie, le président de l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a tenté de se démarquer des institutions européennes de Bruxelles. Ne serait-ce que sur le plan du discours, lui qui est à la tête d'une institution n'ayant qu'une autorité morale. L'intitulé de l'exposé est presque rêveur : «Les chemins communs entre l'Europe et le Maghreb». Il s'agit, en fait, des voies à explorer pour une meilleure coopération entre les deux rives de la Méditerranée. Et puisque l'homme connaît un peu mieux que ses homologues européens la rive sud, en raison de sa nationalité espagnole et de ses multiples études sur le monde musulman, il a tenté de démontrer qu'il a des perceptions différentes sur le Maghreb. C'est presque normal pour un homme de gauche. Mais M. Puig a oublié un détail : son institution n'a pratiquement pas de pouvoir face à la puissante Union européenne. Et ces réalités, tout comme tant d'autres d'ailleurs, ont été rappelées par nombre d'Algériens présents dans la belle salle de conférences du palais qui abrite le Sénat. En tête de ces personnalités, il y a Smaïl Hamdani, ancien chef de gouvernement, qui a tenu, sur un ton un peu plus sévère d'ailleurs, à exprimer des doutes. «Je suis sceptique», a-t-il asséné, devant un Puig désarçonné, qui a répliqué que «être sceptique comporte des choses négatives». «C'est anormal que les gens s'opposent à l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne», a-t-il dit, par exemple, auparavant tout en s'efforçant de souligner que le monde musulman n'est pas si mauvais qu'on le pense de l'autre côté de la Méditerranée. Le parlementaire européen, qui a beaucoup plus parlé de son pays d'origine, l'Espagne, a avancé que l'Europe doit chercher «à établir un vrai partenariat». Et par «vrai partenariat», le responsable du Conseil de l'Europe entend un partenariat d'égal à égal. «La période de soutien au développement est révolue», a-t-il dit avant de préciser que, pour «éviter le terrorisme à l'avenir, il faut que nous nous parlions.» Il a insisté sur les réalisations de son institution -qui n'a pas de pouvoir économique, mais politique- dans le domaine du rapprochement avec les pays du Sud, des pays qui ont «beaucoup de choses à partager avec l'Europe». La formation d'historien fait également de Luis-Maria de Puig un homme au fait des rouages de la Méditerranée. Mieux, il veut donner au problème palestinien un autre cachet. «Israël a un statut d'observateur au sein de l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe depuis très longtemps. Eh bien, nous avons tenu à ce que la Palestine ait également un statut», s'est-il félicité, sans toutefois s'aventurer sur le problème politique du conflit au Moyen-Orient.La concertation, M. Puig la propose comme moyen de régler le problème de l'immigration clandestine, même s'il avoue que ce n'est pas si facile que cela. Et pour cause, un pays comme l'Espagne a 4 millions de chômeurs, dont un million d'immigrés. Autrement dit, malgré la volonté d'un des Etats européens, la crise économique fait des siennes et rend les choses plus difficiles. Comment faire alors ? Face à l'impossibilité de mettre en pratique les belles paroles prêchées –preuve est donnée par les interventions des sénateurs algériens- le parlementaire du Conseil de l'Europe se console par «la noblesse de l'engagement».A préciser que le Conseil de l'Europe est une institution créée en 1949, qui réunit 47 pays européens -la Turquie comprise. Ayant son siège à Strasbourg, le Conseil de l'Europe, qui contient une assemblée parlementaire, s'occupe essentiellement des questions de démocratie et des droits de l'Homme. Son autorité est plus d'ordre politique et moral qu'exécutoire.