Le Festival international de cinéma, qui est inscrit au programme de la 2ème édition du Panaf, a marqué, jeudi dernier, une halte «nostalgique» avec la projection, en avant-première mondiale, du film documentaire Eldridge Cleaver, Black Panther que William Klein a réalisé à Alger, en 1970. Le film, restauré et rénové, a été projeté dans la salle Cosmos de Riadh El Feth en présence de Kathleen Cleaver, veuve d'Eldridge, et de son fils, Maceo Ahmed Cleaver. Hormis ces invités de marque, il y avait peu de monde dans la salle, à peine une demi-douzaine de personnes, si l'on excepte les cinéastes et les journalistes. Avant la projection, Mme Cleaver prendra la parole pour faire une présentation succincte du documentaire et du contexte sociopolitique (guerre du Vietnam, lutte antiracisme aux Etats-Unis, guerres d'indépendances en Afrique et en Amérique latine…) dans lequel il a été tourné. Face à la caméra, Eldridge Cleaver répond au journaliste dont les questions se rapportent à la lutte, la stratégie et la philosophie du Black Panther party (BPP, parti des panthères noires) qui militait et luttait pour le changement du système politique aux Etats-Unis. L'entrevue est entrecoupée d'images d'Eldridge dans les rues de la Casbah, animant un débat politique avec de jeunes Algériens et Africains lors du 1er Festival panafricain d'Alger en 1969 ou participant à une réunion autour d'un couscous dans une maison de représentants de différents mouvements de libération (Haïti, Mozambique, Angola…). D'autres images montrent la femme du militant dénonçant la justice américaine qui veut renvoyer son mari, réfugié en Algérie, en prison «où il sera sûrement assassiné […]. Il a déjà échappé à plusieurs tentatives d'assassinat en prison et dans la rue», affirme-t-elle. On voit également des images de rassemblements dénonçant le racisme, le chômage, les atrocités commises par l'armée américaine au Vietnam, les combats des guérillas en Afrique et les guerres que mène l'OTAN et soutenues par les Etats-Unis, désignés comme l'ennemi de tous les peuples, y compris américain…Cependant, Eldridge vit mal son exil forcé et veut retourner aux Etats-Unis pour être sur le front de la lutte, armée s'il le faut, ça sera d'ailleurs le reproche que lui fera le journaliste qui ne comprend pas qu'un marxiste prône la violence. La réponse est d'une logique renversante : à la violence de l'Etat qui a assassiné les compagnons d'Eldridge ou les a emprisonnés, on ne peut opposer des discours pacifistes. Marin Luther King l'a fait et il a été froidement assassiné. Le film le dit.A la fin de la projection, le débat s'impose. Mme Cleaver, qui est professeur à l'université d'Atlanta, sera notre interlocutrice. A notre question sur sa vision du combat d'aujourd'hui par rapport aux années 1960-1970, elle dira qu'avant, la guerre était contre l'impérialisme, aujourd'hui, c'est contre le néo-impérialisme. Les chaînes ont changé mais c'est toujours des chaînes. Avant, la violence était contre les militants, aujourd'hui elle contre les citoyens, les peuples. C'est l'ère du racisme économique et politique. Le problème est le même, mais il est plus difficile, pire, car porté par la mondialisation et la globalisation qui atomisent les sociétés au bénéfice des blocs économiques et des multinationales. H. G.