Photo : S. Zoheir Par Rachida Merkouche Deux années déjà et c'est le statu quo pour toutes les salles des fêtes fermées après la promulgation du décret n°05-207 du 4 juin 2005. Elles sont au nombre de 285 sur le territoire national à avoir fait l'objet de fermeture, 150 pour la seule capitale. Les motifs les plus importants et les plus invoqués qui ont conduit à la fermeture de ces nombreuses salles sont liés à la sécurité des usagers de ces lieux (absence d'issues de secours), à l'absence de commodités et à des problèmes de salubrité publique du voisinage (absence de parkings, sonorisation). Mais de l'avis des exploitants pénalisés, ces motifs sont infondés. Ils crient tous à l'injustice et c'est pour être entendus par les pouvoirs publics qu'ils se sont constitués en association et ont créé la commission nationale des salles des fêtes. Ils s'indignent contre le fait que le décret en question ait été appliqué un mois après sa promulgation, sans laisser le temps à certains d'entre eux d'effectuer les réajustements nécessaires, et que celui-ci ait eu un effet rétroactif. Un acte illégal, selon le vice-président de la commission des salles des fêtes, M. Kraïmia Benalia, concerné lui aussi par la fermeture. «Le décret a ciblé même les salles qui existaient depuis 20 ans comme cette salle de Bouzaréah logée dans un château turc, ce qui est aberrant.» Que le texte en question freine dans leur élan des personnes qui ont investi dans ce créneau parce qu'elles n'ont pas encore 30 ans et qu'il soit «un obstacle» pour des employés de moins 25 ans, c'est pour les exploitants une autre aberration. Tout comme le classement des salles des fêtes dans la même catégorie que les salles de jeux et autres boîtes au cachet particulier. Des démarches ont été effectuées auprès du ministère de l'Intérieur et des Collectivité locales et auprès du wali d'Alger, et c'est la directrice de la réglementation au niveau du ministère en question qui a reçu une délégation des exploitants. Riches de promesses, ces derniers sont toujours confrontés à l' impossibilité d'exercer leur activité. Ce qu'ils considèrent comme une pénalisation non seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour les citoyens soumis au «diktat» de ceux qui occupent seuls le terrain et qui ont plus que doublé leur tarif, et pour les employés qui se retrouvent sans travail. «Ce décret n'arrange ni le citoyen ni l'exploitant, ni l'Etat, estime M. Kraïmia. Avant, nous avions au minimum 12 emplois directs, sans compter les emplois indirects. Il faut aussi relever le manque à gagner pour l'Etat qui percevait des impôts.» Les exploitants les plus pénalisés par ces fermetures sont ces jeunes qui ont bénéficié de prêts bancaires dans le cadre du dispositif de l'ANSEJ et qui, selon notre interlocuteur, sont pris en otages. «Après avoir bénéficié d'un prêt et investi dans une salle des fêtes, ils se retrouvent bloqués et obligés en même temps de rembourser leur prêt.» Le vice-président de la commission nationale des salles des fêtes relève l'inégalité dans l'application du décret 05-207 du 4 juin 2005, considérant que seules les salles de la capitale sont sévèrement sanctionnées, même pour non-conformité de la bâtisse alors que c'est l'étage qui abrite le local qui doit être pris en considération. Selon ses propos, dans les autres wilayas du pays, les autorités ont compris les termes du texte, ne ciblant que la conformité de l'activité et ne sévissant que pour les «cas flagrants». La solution, M. Kraïmia la voit chez le nouveau chef du gouvernement. «Notre souhait, c'est que M. Ouyahia, qui a fait ce décret, y apporte des rectificatifs. Nous lui lançons un appel solennel.» En attendant, les exploitants qui ont la chance de poursuivre leur activité échappent à tout contrôle, surtout en matière de prix –ces derniers ont pratiquement triplé– profitant au maximum de la fermeture d'un grand nombre de salles pour plumer leurs clients.