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Le microcrédit, une issue pour les jeunes, mais…
Avec plus de 3 000 entreprises financées et des milliers de dossiers en instance à Tlemcen
Publié dans La Tribune le 17 - 08 - 2009

De notre correspondante à Tlemcen
Amira Bensabeur

Dans le cadre de la politique de lutte contre le chômage et pour favoriser l'emploi, le gouvernement poursuit la mise en place d'un cadre institutionnel,
juridique et social propice pour les entreprises. A Tlemcen, les statistiques de l'Agence nationale de soutien à l'emploi des jeunes, montrent à quel point le dispositif est pourvoyeur d'emplois avec la création de plus de 3 400 microentreprises dans le secteur des transports, du bâtiment, des services, etc. A titre d'exemple, le secteur de la santé a vu la création de 75 microentreprises. Divers avantages ont été consentis, dont des prêts sans intérêts non
rémunérés sur dix années, bonification de taux d'intérêt bancaire, exonération de la taxe sur la valeur ajoutée (équipements, aménagements, services...)
exonération totale des impôts pendant trois ou six années si le projet est localisé dans une commune à promouvoir, inscription sur les transactions
immobilières, etc. Notons que, dans ce cadre et depuis l'année 2008, il a été créé un comité local d'étude et de financement des projets. A travers la wilaya de Tlemcen ces microentreprises ont généré, a-t-on souligné, plus de 11 350 emplois directs et près de 6 300 emplois indirects. Ainsi, l'objectif de ce dispositif est de lutter de manière ciblée contre l'exclusion et la pauvreté, particulièrement en milieu rural. Les dossiers, a-t-on indiqué, sont soumis à une commission à laquelle prennent part cinq banques (BADR-BDL-BEA-CPA-BNA), outre des partenaires sociaux, entre autres, les directions de l'emploi, de l'agriculture, des transports ainsi que la chambre de métiers, dans le but d'étudier le volet technique et la conformité du projet. Le financement du projet retenu se fera dans un délai maximum de 40 jours, dont le montant varie entre 500 000 et 10 000 000 DA. Par ailleurs, lors de la dernière réunion de ladite commission, plusieurs projets dans diverses activités, entre autres, dans le bâtiment, le transport, les services et l'agriculture, ont été avalisés et financés.
Le rôle de cette commission consiste à soutenir, conseiller et accompagner les jeunes promoteurs dans le cadre de la mise en œuvre de leurs projets d'investissements, et que le dispositif, géré par l'ANSEJ,s'inscrive en rupture avec les approches antérieures et traite le chômage par l'économique. Cette commission étudie également la possibilité de former, en collaboration avec le secteur de la formation professionnelle, les jeunes promoteurs aux métiers pour la création des microentreprises visant des activités que peuvent créer des richesses au plan local, pour le développement de la wilaya de Tlemcen. L'impact des politiques d'incitation et des investissements publics engagés par l'Algérie sur l'esprit entrepreneurial, notamment à travers le dispositif ANSEJ,
est conçu comme un outil de développement local. Ainsi, le dispositif de création de la microentreprise demeure à Tlemcen, à l'instar d'autres villes algériennes, comme un outil d'encouragement des initiatives des jeunes. Il s'agit, a-t-on expliqué, de diverses mesures d'incitation et programmes
d'investissement engagés par l'Etat pour rehausser l'esprit entrepreneurial des jeunes à travers ce dispositif.
Le microcrédit a été défini comme «une offre de services financiers à des individus ou des groupes d'individus socialement démunis, qui n'ont pas accès
aux services financiers formels, dans le but de satisfaire les besoins de leur ménage ou de leur microentreprise» ; comme il s'identifie aussi usuellement à des prêts à court terme permettant la constitution d'un fonds de roulement et la réalisation de petits investissements (par exemple une machine à coudre pour les artisans). D'autres définitions ont également été données selon les critères définitionnels retenus et selon les objectifs poursuivis par chaque pays. Cependant, on retrouve en général dans toutes les définitions proposées les principaux éléments définitionnels (élément communs).
Selon les économistes, la définition du microcrédit retenue au niveau international, celle notamment utilisée par les Nations unies, est la suivante : «Le
microcrédit a pour objet d'ouvrir accès au capital à des personnes démunies, qui n'ont pas habituellement accès au crédit bancaire afin de leur permettre de développer des activités économiques génératrices de revenus, créant ainsi leur propre emploi et, le cas échéant, d'autres emplois. Cet objectif social se combine en même temps avec une approche financière visant à terme à couvrir ses coûts. Cette approche est la seule permettant d'étendre et de pérenniser le service financier proposé.» Ce que l'on peut relever à travers cette définition large du microcrédit, c'est qu'il se différencie du crédit classique par son orientation sur une cible nouvelle, à savoir les pauvres et les exclus. Ce système de microcrédit, au lieu d'éliminer par avance les pauvres et les exclus comme c'est le cas pour le système du crédit classique au regard des méthodes, des critères et des garanties qui ne sont pas adaptées à leur situation, introduit des
méthodes et des garanties qui conviennent à la situation des personnes sans ressources.
Soulignant la genèse du microcrédit, un spécialiste affirme à ce sujet que «le microcrédit tel qu'on le conçoit actuellement a été mis pour la première fois en pratique dans les années 1970 par le professeur Muhammad Yunus, un universitaire bangladais, formé aux Etats-Unis puis revenu dans son pays, résolu à contribuer à améliorer le sort de ses compatriotes, paysans pauvres, quasi totalement marginalisés dans les programme de développement du pays {en l'occurrence le Bangladesh]. Le professeur Muhammad Yunus [qui a reçu le prix Nobel de la Paix, il y a deux années, en reconnaissance à sa géniale entreprise contre la pauvreté] est parti d'un constat très simple.»
Selon le Dr Boutaleb, Muhammad Yunus a évoqué le problème des pauvres qui n'ont pas accès aux banques, et donc au crédit, car ils ne peuvent offrir de garanties, puisque ne possédant rien. Ils sont donc à la merci des usuriers et autres banquiers des rues, qui leur prêtent chaque matin de quoi assurer une activité économique minimale, génératrice d'un faible revenu dont une grande partie servira à rembourser le prêt du matin, et ce qui reste à acheter de quoi se nourrir et nourrir sa famille. C'est un cercle vicieux qui empêche de dégager le moindre surplus et qui, la plupart du temps, génère des dettes s'étendant sur plusieurs générations.
Cette expérience de microcrédit n'est qu'une autre forme originale sans aucun doute de microfinance. Car, d'autres formes de microfinance ont été pratiquées
depuis très longtemps dans de nombreux pays, notamment en Algérie où il a été «tardivement» mis en place durant l'année 1999.
Il s'inspire naturellement des nombreuses expériences vécues à travers le monde qui ont démontré que la création d'activité pour son propre compte dans certains créneaux a été un moyen assez efficace de réduire le chômage notamment chez les jeunes.
«En Algérie, comme dans de nombreux pays, c'est au niveau du financement que le problème se pose, même s'il s'agit de l'allocation de petites sommes pour aider au lancement d'une petite activité, souvent de nature artisanale. Le système bancaire algérien demeure, d'une manière générale, sans doute beaucoup plus qu'ailleurs, très hermétique au financement du secteur privé. Le crédit alloué au secteur privé est jugé insignifiant. Les banques algériennes, dont l'activité principale semble se limiter aux opérations de caisse, ne distribuent en fait qu'une partie de leur dépôts, [cette part représentait à peine 45% il y a peu de temps encore alors qu'elle s'élevait à 65-70% pour la Tunisie et le Maroc].» Sur ce sujet en question, notre interlocuteur s'est attardé sur la réticence des banques à répondre aux demandes de cette catégorie d'«investisseurs», les microentrepreneurs, qui est encore plus marquée, compte tenu du
problème de leur solvabilité difficile à prouver puisque le plus souvent ils ne disposent d'aucune garantie, matérielle d'une part, et que les taux élevés d'intérêt demeurent dissuasifs à l'égard de ceux qui arrivent à dépasser l'obstacle des garanties, d'autre part. «Devant cette situation, l'Etat s'est donc engagé à solutionner ces obstacles en instaurant au cours de l'année 1999 le microcrédit», note-t-il. Tout en étalant les conditions d'accès au microcrédit, les conditions d'accès aux prêts sans intérêt, la procédure d'accès au microcrédit. Evoquant l'évaluation de l'expérience algérienne à ce sujet, M. Boutaleb a déclaré qu'en Algérie très peu d'études ont été consacrées à l'expérience du microcrédit dans ce pays. En effet, en dehors des articles de presse, les études
académiques sont rares.
Néanmoins, en se référant au séminaire qu'a organisé l'ADS en décembre 2002 sur le microcrédit en Algérie, séminaire international qui a rassemblé, outre
des intervenants algériens (universitaires et représentants d'institutions publiques et privées), des experts et autres représentants d'institutions de microfinance étrangers venus des pays voisins (Maroc, Tunisie, Egypte) et d'Europe principalement, on relève des éléments d'évaluation comme les bénéficiaires du microcrédit qui sont d'abord des sans-emploi ; les activités créées concernant le secteur agropastoral , les petits métiers et, enfin, les biens et services ainsi que la création d'emplois soutenue par le microcrédit. Cette dernière est comprise entre 1 et 2 emplois (85%) et entre 3 et 5 emplois (15 %)… «Il a été relevé que le problème principal est celui de l'interprétation et de la perception par les bénéficiaires du microcrédit. Pour la quasi-majorité il s'agit de dons que l'Etat leur fait, et ils ne sont pas tenus de rembourser !...» Certes, l'expérience du microcrédit en Algérie est relativement récente dans la
mesure où elle fut initiée en 1999. Mais, depuis lors, certaines défaillances ont été relevées : notamment la longueur des délais de traitement des dossiers,
procédures lourdes, longues, inégalité de traitement, etc.»
Lors de notre entretien, le Dr Boutaleb Kouider a précisé que le microcrédit a été introduit en Algérie, à l'instar de nombreux autres pays, pour lutter
essentiellement contre le chômage qui constitue incontestablement la principale cause d'appauvrissement des populations du fait de ses conséquences sur les revenus des ménages.
«Le dispositif du microcrédit s'inscrit en Algérie dans ce cadre et cible conséquemment l'insertion de larges franges des populations sans emploi, à emploi précaire non durable ou à faible revenu. Au vu des résultats réalisés, on peut dire que les objectifs auxquels aspiraient les pouvoirs publics sont loin d'être atteints. Comme on a pu le voir très succinctement, le microcrédit, depuis son lancement, n'a pu atteindre qu'une très faible proportion de jeunes chômeurs
démunis. Ainsi, malgré les efforts incontestables fournis par les pouvoirs publics, le microcrédit n'arrive pas à s'étendre», témoigne M. Boutaleb, tout en
enchaînant : «Ce qui est mis en exergue comme cause bloquante, c'est le quasi-rationnement du crédit par les banques publiques, en raison de l'importance des coûts de transaction et du risque qu'elles inspirent. D'où, a-t-on déduit, les institutions formelles, les banques en l'occurrence, ne sont pas adaptées à attribuer des crédits aux microentreprises. Car, d'une part, elles doivent couvrir les charges générées par le traitement des dossiers de prêt et, d'autre part, il faut qu'elles soient informées de la capacité de remboursement des emprunteurs Cependant, avec la création du fonds de garantie financé par l'Etat, cette question du risque de non-recouvrement est pratiquement résolue et, par conséquent, l'un des principaux obstacles à l'attribution des prêts à cette clientèle
spécifique ne disposant pas de moyens de nantissement est levé. De ce fait, les banques peuvent parfaitement contribuer, en théorie, au développement de la microentreprise par un plus grand engagement dans le financement des diverses activités initiées.
Or, il ne semble pas qu'avec la levée de cette contrainte la dynamique du microcrédit ait pu être enclenchée. Par conséquent, c'est toute la philosophie du
microcrédit, décidée et appliquée par les pouvoirs publics, qu'il faudrait repenser et, sans doute, s'orienter vers sa prise en charge par les associations civiles, considérées comme étant mieux outillées pour une telle entreprise, comme en témoignent à travers le monde et, plus près de nous encore, au Maroc, les expériences positives de la prise en charge du microcrédit par les associations de la société civile», conclut-il.


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