Photo : S.Zoheïr De notre correspondant à Tizi Ouzou Lakhdar Siad Le musée de Abane Ramdane sera inauguré ce jeudi, à l'occasion de la commémoration du double anniversaire du 20 Août 1955. C'est pourtant l'ambiance des préparatifs, les allers-retours de membres des organisations des ayants- droits et l'activité des adhérents du comité de village de Azouza qui confirment cette annonce. «Ils sont tous en congé, je ne peux pas vous dire exactement si le musée de Abane sera inauguré à cette occasion ; vous venez ce jeudi au salon d'honneur de la wilaya pour participer au programme des festivités» a été la réponse d'un employé de la cellule de communication à la question de savoir si la réception du musée de Abane Ramdane est officielle ce jeudi. En tout, c'est le remue-ménage dans les parages de la demeure familiale de l'«architecte de la révolution» algérienne contre le colonialisme français. L'endroit a connu des aménagements et un embellissement qui n'étaient pas visibles lors de la dernière visite du site, fin avril dernier, à l'occasion du mois du patrimoine et classé monument historique national par la direction de la culture de la wilaya après accord du ministère de tutelle. «Le musée va être enfin inauguré après demain [jeudi ndlr] avec, en principe, la présence de hautes autorités de l'Etat», nous dit un organisateur de la cérémonie qui attendait ses collègues partis chercher des «articles, de la logistique pour la réception en l'honneur de nos invités» prévue dans l'enceinte de la maison de Abane. Le 10 juin dernier, à l'occasion de la commémoration de l'anniversaire de la naissance de Abane Ramdane (il est né le 10 juin 1920 en Kabylie et assassiné le 27 décembre 1957 à Tétouan, au Maroc) le comité du village d'Azouza avait annoncé la date de l'inauguration officielle du musée Abane Ramdane le jeudi 20 août 2009. Une annonce prise à la légère comme les précédentes par la direction de la culture parce qu'aucune date donnée pour la réception du «projet» n'a été respectée depuis le début des travaux de la restauration et de reconversion de la maison de Abane en mai 2007 ; d'ailleurs la première date officielle de sa réception était prévue pour le 27 décembre 2007. Après près de deux années de retard, ce jeudi sera le jour de l'inauguration intégrale du musée ou d'une partie de celui-ci, sachant que l'idée initiale était d'aménager une bibliothèque, un hall pour exposer les œuvres et les effets de Abane et de la guerre pour l'indépendance avec, en plus la désignation par la direction de la culture d'un responsable pour la conservation de ce musée. En juin 2009, son village natal, Azouza, à travers son dynamique comité de village et des représentants de la «famille révolutionnaire» avaient pris les choses en main pour enfin réaliser deux fresque à l'effigie de Abane, à l'entrée et à la sortie du village sur la route nationale, à une vingtaine de kilomètres de Tizi Ouzou. Un élu du comité du village déclarera devant l'assistance que les deux fresques sont un «hommage qui n'égaleront jamais la grandeur et le sacrifice de ce grand homme de la Révolution algérienne. L'essentiel, pour nous, est que cet hommage soit rendu par son village et par une génération de jeunes avides de repères, de liberté, de justice et de démocratie». Pour rappel, en 2008, la famille et les héritiers de Abane Ramdane, notamment ses neveux, étaient entrés dans une colère indescriptible suite «à l'abandon aux intempéries de la maison familiale de Abane Ramdane». Cette colère a été justifiée par la lenteur des travaux de restauration de la maison en musée, travaux interrompus en plein hiver, laissant la pluie s'introduire à l'intérieur des pièces de l'historique demeure par les fissures provoquées par les machines utilisées par les travailleurs affectés sur le site ainsi que la remise en cause de la qualification de l'entreprise choisie pour la réalisation du musée et le personnel technique posté sur place. L'un de ses neveux avait accusé un clan au pouvoir de vouloir saborder le musée de Abane qui «même mort dérange», avait-il déclaré à la presse après les constations négatives et le laisser-aller caractérisant l'avancement des travaux. Le projet devait coûter 13 millions de dinars, selon des données de l'administration. Abane Ramdane, comme tant d'autres chefs de la guerre d'Algérie (1954-1962), ne sont pas assez ou pas du tout enseignés aux nouvelles générations d'Algériens à l'école et ailleurs dans les œuvres d'art. beaucoup de jeunes (la majorité ?) ignorent ce qui s'est passé réellement avant que la France ne se décide à rentrer chez elle et laisser «théoriquement» l'Algérie libre dirigée par ses propres enfants. Ceci est confirmé aussi par le peu d'intérêt que lui portent les responsables à tous les niveaux lors des cérémonies commémoratives de l'anniversaire de son assassinat par sa famille et une poignée de ses proches. Ses cendres n'ont été rapatriées qu'au début des années 1980 sous le règne de l'ancien chef d'Etat Chadli Bendjedid. Dernier exemple : le 27 décembre dernier, au cimetière El Alia, à Alger, a rassemblé seulement une trentaine de personnes, en majorité des anonymes. Aucun responsable en poste dans le gouvernement ou dans les autres institutions n'avait senti le devoir de mémoire et de reconnaissance de se déplacer à El Alia. Abane a-t-il nui à l'Algérie ?