Photo Riad Propos recueillis par Sihem Ammour LA TRIBUNE : Comment êtes-vous venu au dessin de presse ? HIC : Depuis mon jeune âge, j'étais passionné de dessin et de tout ce qui touchait au graphisme. Après avoir obtenu mon diplôme d'ingénieur en aménagement du territoire et protection de l'environnement, j'ai galéré pendant presque trois années avec des petits boulots entrecoupés de longues périodes de chômage. Puis, un jour, en 1998, muni de mes dessins, j'ai courageusement fait du porte-à-porte à la maison de la presse. C'est ainsi que j'ai été recruté par le journal l'Authentique. C'est le début d'une formidable aventure où il y a eu plusieurs escales dans les quotidiens le Matin, le Jeune Indépendant et, depuis trois années, le Soir d'Algérie. Qu'est-ce qui vous passionne dans ce métier ? Ce qui est vraiment passionnant, c'est le fait de relever chaque jour des défis de création. Le chalenge est de faire quotidiennement un dessin conditionné par l'actualité. Ce qui me plaît aussi, c'est l'interactivité avec les lecteurs. Aujourd'hui, grâce à l'Internet, il y a un véritable échange instantané avec eux. Ils rebondissent à chaque fois sur les différents sujets abordés dans mes caricatures avec souvent des critiques constructives qui me motivent à aller de l'avant et à donner le meilleur de moi-même à chaque dessin. Et quelle est votre source d'inspiration ? Sincèrement, c'est un ensemble. C'est aussi une question de feeling, cela peut jaillir après avoir fait la revue de la presse, après des discussions avec des amis, après avoir croisé des personnes ou vu une scène qui m'a marqué. La période des élections est aussi une source inépuisable d'inspiration dans les dessins ayant trait au domaine politique. Mais les sujets qui me tiennent le plus à cœur, ce sont les phénomènes sociaux. Plus précisément, les sujets qui bouleversent la société, comme, récemment, l'annulation des crédits ou le changement du week-end. Il y a aussi le phénomène des harraga qui me tient beaucoup à cœur. Justement, pourquoi avoir choisi cette thématique pour illustrer la couverture de votre recueil ? Il était important pour moi de mettre en relief le phénomène des harraga, car je trouve que c'est inadmissible que, dans un pays riche comme l'Algérie, producteur de pétrole et de gaz, des jeunes décident de partir, en étant conscients qu'ils risquent leur vie. Au-delà d'un phénomène social, je trouve que c'est un véritable drame que vit notre pays. Vous savez, le sujet des harraga est inépuisable pour les dessinateurs de presse. Sur la quinzaine de dessinateurs de presse, vous avez au moins un dessin par semaine sur le sujet, car le phénomène va crescendo. Au début, il y avait un harrag, ensuite un bateau, aujourd'hui il y a dix bateaux et, demain, il y aura certainement plus. Il est important, face à l'ampleur de ce drame, de continuer de faire des dessins de presse afin de sensibiliser et d'interpeller l'opinion publique et les responsables. Même le titre du recueil Nage dans ta mer traduit une expression populaire, illustre ce monde impitoyable du capitalisme sauvage dans lequel baignent les Algériens aujourd'hui. A propos du métier de dessinateur de presse en Algérie, quel est votre constat aujourd'hui ? Je pense que le dessin de presse est en train de s'essouffler, à l'image de la presse algérienne. Depuis une quinzaine d'années, il a connu une progression en dents de scie. Certes, il a eu son heure de gloire, mais il faut avouer qu'il existe plusieurs frustrations dans ce domaine. Tout d'abord, le métier de dessinateur de presse n'est pas reconnu en tant que métier à part entière. On est souvent assimilé à des journalistes, alors que notre vocation est complètement différente. Le métier de journaliste est celui d'informer sur l'actualité alors que celui de dessinateur de presse est le commentaire et de tourner en dérision cette actualité. Cet amalgame déteint même sur la protection du dessinateur de presse qui dispose du même cadre que celui du journaliste, alors qu'il est illogique d'attaquer pour diffamation une caricature dont l'essence même est la parodie de la réalité par le graphisme. Il y a aussi la frustration du manque de cohésion dans cette profession. Il n'existe pas d'association de dessinateurs de presse, il n'y a ni événement ni support pour mettre en valeur cette profession, alors que, dans d'autres pays et même chez nos voisins frontaliers, il existe des festivals et des publications spécialement dédiés à ce métier. De plus, les dessinateurs de presse publient chaque année un recueil de leurs meilleurs dessins parus durant cette période, mais chez nous cela reste des exceptions. C'est cette exception qui permet aux lecteurs de découvrir le recueil de vos dessins publié par les Editions Dalimen. Comment cela a-t-il pu être concrétisé ? C'est grâce à un heureux concours de circonstance.A l'occasion du Festival international de la bande dessinée d'Alger (FIDBA), j'ai rencontré la commissaire du festival, Dalila Nadjem, qui est également directrice générale des Editions Dalimen. Au fil des discussions, elle m'a proposé de publier mes dessins, et c'est ainsi que l'idée du recueil à pus voir le jour. On a choisi de publier les dessins qui sont sortis sur le quotidien le Soir d'Algérie depuis 2006. Ensuite, j'ai fais une sélection de près de 300 dessins en espérant apporter autant de bonheur aux lecteurs que j'ai eu à les faire. La sortie officielle du recueil aura lieu le 28 août prochain. A cette occasion, je convie les lecteurs à une vente dédicace qui se déroulera à la bibliothèque Point-Virgule à Chéraga où une soirée ramadhanesque conviviale sera organisée.