De notre correspondant à Constantine Abdelhamid Lemili La Tribune a, au courant de cette semaine, eu à évoquer la question lancinante de l'urgence en matière de prestations médicales. Bien évidemment, en raison de sa spécificité, le mois de carême avait constitué une autre opportunité de voir les travers de gestion générale des différentes structures des établissements hospitaliers dont les dysfonctionnement font partie de la culture ambiante sans avoir à les passer à la loupe uniquement durant cette trentaine de jours quelque peu «étranges». De passage à la clinique de maternité de Sidi Mabrouk, nous avons été confrontés à une paradoxale mésaventure survenue à un jeune homme dont l'épouse allait mettre au monde son premier bébé (une fille). Saadoune C. D. avait au préalable, comme tout citoyen discipliné, pris la mesure d'emmener son épouse que les premières douleurs tenaillaient, vers l'hôpital de son lieu de résidence, en l'occurrence celui du Khroub. Mais, une fois sur place, il sera confronté à une délicate situation. Le personnel paramédical de service lui annonce d'emblée que la patiente ne peut être admise au service de maternité dudit hôpital au motif de «l'indisponibilité d'un médecin spécialisé», d'une part, mais aussi, face à l'insistance de S. C. D., que «les sages-femmes présentes n'étaient même pas qualifiées pour procéder à une injection» (sic). Mieux encore, voire non sans cynisme «…et puis nous n'avons pas de moyens, la direction a enjolivé l'aspect extérieur des lieux sans plus. Nous ne disposons pas des moyens adéquats pour travailler». Toutes les démarches de C. D. S. n'aboutiront pas, le personnel sur place lui étant d'un «grand secours» en lui conseillant de se rendre à la maternité précédemment citée. Mieux encore, dans leur jargon, ils lui feront savoir qu'effectivement, «…l'ouverture laissait présager une probable et immédiate naissance». Notre interlocuteur continuera : «…Nous nous sommes donc résolus à nous rendre vers la clinique recommandée au moment où tout le dossier retraçant l'historique de la grossesse de mon épouse était entre les mains d'une commise de salle.» Une fois sur place, il allait encore une fois affronter des comportements tout autant immatures, irresponsables que surréalistes dans la mesure où, au-delà des attitudes bureaucratiques et de méthodes à la limite de la non assistance à personne en danger, les paramédicaux, comme si le personnel médical s'était volatilisé, lui feront savoir que «c'est une erreur d'avoir ramené la patiente ici et qu'ils aurait fallu se bagarrer (sic) avec le personnel de l'hôpital du Khroub pour faire valoir votre bon droit», ajoutant : «En tout état de cause, votre épouse n'est pas prête d'accoucher, l'ouverture anatomique l'indique nettement [sic]. Quoi qu'il en soit, nous vous conseillons de la transporter vers le CHU sinon la retourner à l'établissement de votre lieu de résidence». Ce que fera C. D. S, déclenchant à nouveau la colère du personnel de l'établissement, sans doute dérangé dans ses ronronnements habituels, rencontrant même des difficultés à récupérer des documents administratifs qui pourraient mettre en cause, ultérieurement, tous les protagonistes de ces péripéties. Il y avait, par voie de conséquence, velléité délibérée d'éliminer toutes traces de son passage sur les lieux. Le personnel concerné jugeant opportun d'assurer ses arrières au cas où un malheur aurait à survenir ultérieurement, d'autant que les exemples funestes donnés autour de services mouroirs plus que de maternité foisonnaient et alimentaient régulièrement les discussions. Ce n'est que sur le tard et devant sa patience, pour ne pas dire sa passivité, qu'une sage-femme lui proposera de faire admettre son épouse pour parer à toute éventualité. Méfiant, surtout après tout ce à quoi il a été confronté, il choisira de ramener son épouse à la maison. «Très sincèrement, j'avais énormément d'appréhension à la laisser dans un tel milieu, j'avais très peur de la perdre par la plus assassine des négligences. Or, nous nous sommes tellement préparés à cette naissance, j'ai accompagné ma femme durant ces neuf mois et je peux vous assurer qu'elle était prête en ce qui la concerne à accoucher sans la moindre difficulté et surtout à faciliter la tâche à ceux qui auront à l'assister. Je peux vous dire qu'elle était totalement effarée par ce qu'elle voyait alors que je lui avais brossé un tout autre tableau parce qu'étant moi-même persuadé que tout ne pouvait que bien aller. Mettre au monde, ce n'est quand même pas de l'ordre d'une transplantation cardiaque… non !». Pour l'histoire, il nous dira en aparté : «J'ai eu des sueurs froides, une fois à la maternité de Sidi Mabrouk, de voir une parturiente sur le point d'accoucher… assise sur une chaise… ensanglantée et le nouveau né se présentant vraisemblablement en position siège. Une représentation allégorique de l'inhumanité faite homme». C. D. S conclura : «Ma femme, avec l'aide de Dieu, accouchera, j'en reste persuadé, aujourd'hui ou demain peu importe, mais je fais le serment devant l'Eternel que j'engagerai une procédure judiciaire contre toute la chaîne humaine à laquelle j'ai été confronté.»