Le football algérien traverse une période particulière. La sélection nationale est en verve. Est-ce pour autant un signe de bonne santé de la discipline ? En collectionnant les performances, les Verts monopolisent tous les regards au point que des questions qui ne manquent pas d'intérêt ne peuvent plus rivaliser avec l'enthousiasme que suscite le parcours éblouissant des camarades de Gaouaoui. Jamais de mémoire d'Algériens, le football n'a suscité autant d'intérêt populaire depuis 1990, année qui a vu le onze national remporter son premier et seul trophée continental. Aujourd'hui, les Verts sont à quelques heures du Mondial, l'événement qui réunit une fois tous les quatre ans la planète du foot. Si la participation au Mondial justifie toutes les satisfactions, il ne faut pas oublier que l'Algérie vient justement de renouer avec la Coupe d'Afrique des nations. Ce n'est nullement un manque d'ambitions que de le souligner : les Verts ont été absents aux deux précédentes éditions, en Egypte (2006) et au Ghana (2008). Aujourd'hui, ils viennent de signer leur grand retour sur la scène. La domination incontestable du groupe C où figurent le double champion d'Afrique et la Zambie est manifestement la preuve du regain de forme du onze algérien. Invaincue lors des deux phases des éliminatoires jumelées de la CAN et du Mondial 2010, l'équipe algérienne est en train d'imposer le respect à tous les observateurs aussi bien à l'étranger qu'en Algérie. Cette embellie n'a pas visiblement laissé indifférents les responsables d'autres sélections qui n'hésitent pas à solliciter l'Algérie pour des matches amicaux. Si la communion semble être retrouvée entre le peuple et le onze national en cette période de bons résultats, d'aucuns s'interrogent, néanmoins, sur les ressorts de ces présentes performances. On se pose précisément la question de savoir si la bonne santé de l'équipe nationale traduit la bonne santé de la discipline dans le pays. La réponse est sans équivoque : l'actuel onze national est loin d'être le fruit d'une politique nationale. Il est plutôt la résultante des efforts déployés depuis quelques années dans le repérage et la quête de jeunes joueurs algériens évoluant ailleurs. Le divorce est bel et bien consommé avec ce qui se fait quotidiennement en Algérie. Jamais le divorce n'a été aussi scellé entre la sélection nationale et le championnat local. A l'exception du gardien de but, Lounes Gaouaoui, aucun autre élément «produit national» n'intéresse le sélectionneur national obligé de solliciter et de composer avec des joueurs prêts pour le service. Une denrée que notre moribond championnat n'offre plus malgré l'argent colossal qui circule. L'année 2009 est incontestablement un moment de rupture entre les Verts et le Championnat national. Il n'y a plus de lien entre les clubs du pays et le onze national. Les joueurs locaux convoqués dans l'objectif de pallier d'éventuelles défections des professionnels ne le seront plus à l'avenir. Si le constat primaire à établir consiste à dire que le produit national n'est plus compétitif au plus haut niveau, il ne faudrait pas omettre de signaler qu'une telle réalité est un désaveu cinglant aux dirigeants, qu'ils soient au niveau des clubs ou au sein de la fédération. Le coach national ne se sent plus obligé de suivre quelques matches du Championnat national qui, plus que jamais, n'a rien à offrir à la sélection quand bien même il trouve des éléments en mesure de servir les Verts avec un suivi spécifique qui les éloignerait des mauvaises habitudes des clubs. Nous avons vu certains éléments s'imposer dans le onze national il y a deux ans avant de voir leur niveau dégringoler de façon vertigineuse. On peut citer l'exemple de Meftah, un titulaire indiscutable lors des éliminatoires de la Coupe d'Afrique des nations 2008, mais qui n'arrive plus à suivre l'évolution de la sélection une année plus tard. C'est dire que la discipline telle qu'elle est gérée en Algérie n'offre plus des possibilités d'amélioration aux athlètes. Bien au contraire, le talent de certains joueurs s'effrite au bout de deux ou de trois ans alors qu'ils présentent des prédispositions qui justifient tous les espoirs. Pour l'heure, les résultats des Verts font oublier tout le marasme de la discipline. C'est le moment propice, pourtant, pour construire sur du solide dans la mesure où il est établi que l'actuelle équipe possède dix ans d'espérance de vie. A. Y.