Entretien réalisé par Wafia Sifouane La Tribune : Pouvez-vous nous dévoiler les raisons qui ont déclenché chez vous cette envie de créer la revue Laabstore ? Salim Brahimi : Tout simplement parce que, tout jeune, je lisais la presse écrite spécialisée étrangère. J'adorais parcourir les magazines traitant des jeux vidéo et des mangas, cherchant un équivalent ici en Algérie. Je n'ai trouvé alors que les passionnés de jeux vidéo et de mangas qui sont bien là et, surtout, ils sont nombreux et d'âges différents, d'où l'idée de rassembler cette communauté qui vivait jusque-là dans le silence autour de la revue Laabstore. Le manga est un style tout à fait étranger à l'Algérie. D'où vient ce penchant pour ce genre ? Ce penchant vers le manga s'explique par une passion intense : les mangas nous plongent dans des aventures fantastiques très bien racontées et, surtout, illustrées avec un style de dessin attrayant qui permet au monde entier de découvrir la culture d'un pays éloigné, le pays du Soleil-Levant. On a commencé officiellement en 2007 bien avant la relance de la BD en Algérie et on est les premiers en Afrique du Nord à encourager ce genre de BD qui est le plus vendu dans le monde (la BD japonaise). Monter un tel projet a dû être difficile. Avez-vous eu du mal à convaincre vos partenaires ? Pas du tout. Au début, je me suis investi tout seul ; personne ne croyait vraiment à cette aventure, surtout les partenaires d'un certain âge. Maintenant, ils commencent à reconsidérer la question et à voir l'évidence. Nous marchons très bien et nous sommes lus par un lectorat passionné. Cela motive les partenaires que nous espérons plus nombreux à l'avenir. En tant que connaisseur, l'Algérie possède-t-elle de nouveaux talents ? L'Algérie peut se vanter d'avoir des talents de haut niveau, il faut juste croire en eux. Par là, je vise les jeunes dessinateurs qui ont une tout autre vision de la bande dessinée. Elle est totalement différente par rapport à ce qui existait auparavant. Il est temps de passer à un autre cap, celui de ce nouveau monde de la BD et de ne plus se cantonner dans le style franco-belge fait souvent par les seniors de la bande dessinée qui ont un humour d'un autre temps. Les temps ont changé, c'est l'ère de la jeunesse... Dans vos produits, quelles tranches d'âge visez-vous ? Franchement, on vise les jeunes adultes. C'est-à-dire les adolescents qui entament le passage à l'âge adulte. On est très bien lus par les 12 -32 ans. Mais comme on dit, il n'y a pas de limite d'âge pour apprécier les bonnes choses. Vous êtes éditeur, auteur de BD et de mangas, journaliste et vous dessinez aussi. Quelles sont vos influences ? Je ne dessine pas vraiment, par manque de temps (gérer la revue de A à Z me pompe tout mon temps). En revanche, mes influences sont Akira Toryama (Dragonball Z), Hayao Miyazaki (Ghibli), peut-être aussi Masashi Kishiomoto et Tite Kubo (des mangakas japonais)… Combien de temps peut prendre la confection d'un manga ? La création d'une bande dessinée peut prendre beaucoup de temps. Alors qu'au Japon leur rythme de travail peut aller de 7 à 15 planches par jour (des fous de travail), en Algérie une planche par jour est un bon niveau. Maintenant, tout dépendra du projet, disons en gros 6 mois minimum. La revue Laabstore en est à son 18e numéro. Pouvez-vous nous dresser le bilan ? C'est grâce aux passionnés qui sont nombreux que nous avons pu en arriver jusque-là. Le bilan est plus que positif. Nous continuons l'aventure Laabstore et nous espérons que ce sera pour longtemps....