Des citoyens s'interrogent sur la destination de l'argent de la solidarité confié au ministère de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Communauté algérienne à l'étranger : où va l'argent de la solidarité ? Une question tout à fait légitime si l'on en juge par le nombre croissant des démunis qui envahissent les rues des grandes et des petites villes d'Algérie, demandant l'aumone. Parmi ces démunis, il y a un grand nombre de personnes handicapées, des malades mentaux et des enfants dont la prise en charge est pourtant prévue dans le cadre des dispositifs mis sous la tutelle de ce département ministériel. D'aucuns ne peuvent ignorer les nombreuses actions de solidarité engagées par ce ministère, notamment durant les mois de Ramadhan, les jours qui suivent les catastrophes naturelles… distribuant des dons alimentaires, des médicaments, des ambulances, des fauteuils roulants, des bus scolaires, des trousseaux scolaires… mais cela reste insuffisant. Fort insuffisant. Aussi, devrions-nous le reconnaître, des établissements d'accueil et de prise en charge de ces personnes en difficulté existent dans différents wilayas du pays et font un travail remarquable grâce notamment au dévouement des agents éducateurs et des responsables des établissements. Il y a aussi les aides des bienfaiteurs, simples citoyens et grands industriels. A sa manière, le mouvement associatif contribue à sortir ces personnes de leur isolement et aide à leur insertion peu à peu dans la société… sans grands résultats. Et pour cause ! Les associations manquent de moyens et certaines ne profitent de ces actions que pour s'aider elles-mêmes, pour ne pas dire carrément s'enrichir sur le dos des pauvres. Un fonds de solidarité a été créé en 1994 et mis sous la tutelle de ce ministère, spécialement pour venir en aide aux victimes du terrorisme et celles des catastrophes naturelles. Comme tous les autres fonds, ce fonds de solidarité est alimenté par les taxes sur les ventes (véhicules, tabac et alcool…). Le chef de cabinet du département d'Ould Abbes, M. Taibia Djamel Eddine, explique que c'est sur ce fonds que sont aussi inscrites les dépenses du mois de Ramadhan. Ce n'est pas sur le budget du ministère. De même que celles qui concernent les soins médicaux pour les démunis non assurés sociaux. Le bilan de l'année 2008 indique que 3 569 millions de dinars ont été dépensés en soins médicaux au profit des personnes démunies non assurées sociales. Ces dernières étaient au nombre de 125 000. Les fauteuils roulants, les vacances scolaires pour les enfants des familles démunies, les médicaments pour les personnes atteintes d'une maladie orpheline, le transport des étudiants du Sud et l'équipement des cantines scolaires, pour ne citer que ceux-là, sont également à la charge du fonds de solidarité. Le représentant du département d'Ould Abbes affirme que la gestion de ce fonds se fait dans le cadre de la loi et de manière transparente. Les dépenses, dit-il, sont réglementées et passent obligatoirement par le contrôle financier. Selon ses dires, rien ne se fait sans l'accord du ministre qui est l'ordonnateur d'une dépense mais aussi aucune dépense n'est permise sans passer par le contrôle financier. «Le visa préalable du contrôleur financier est obligatoire», affirme M. Taibia. Aussi, indique notre interlocuteur, «nous ne prenons pas l'argent des donateurs qui sont d'ailleurs très peu nombreux à venir au ministère proposer leur aide». Si quelqu'un insiste pour donner de l'argent à condition que ce soit pour l'organisation d'une opération bien précise (hadj, omra, circoncision…), «nous nous chargeons de l'organisation de l'opération du début à la fin et nous rendons des comptes à la personne». Le représentant du ministère affirme que «nous n'avons aucun compte pour recevoir des aides en argent. La seule fois où nous avons ouvert un compte, c'était en 2000 dans le cadre de l'opération pièces jaunes». Depuis, «nous n'avons aucun compte et nous ne recevons pas d'argent des citoyens». Pour ce qui est des autres aides (dons alimentaires et autres, «nous sommes tenus de remettre les dons à la personne ou au groupe de personnes, sinon à un établissement que le donateur choisit lui-même». «Le ministère œuvre pour le maintien et le renforcement de la cohésion sociale, ainsi que le respect des droits les plus élémentaires», indique M. Taibia. Interrogé sur les associations qui ont demandé des aides supplémentaires au ministère pour notamment ouvrir des restaurants de la rahma durant ce mois de Ramadhan, M. Yakhlef Messaoud, le directeur du mouvement associatif et de l'action humanitaire au niveau du ministère, affirme qu'il est tout à fait normal de ne pas satisfaire la demande de ces associations : «Je leur ai dit de collaborer directement avec les équipes du Croissant-Rouge algérien, sinon d'intégrer les équipes de volontaires dans les restaurants ouverts par les privés… Elles sont là pour donner et non pas pour prendre.» K. M.