Photo : Riad Par Karima Mokrani Cela fait cinq ans que le ministre de tutelle, sur instruction du président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, a lancé une réforme de tout le système éducatif, avec de nouveaux programmes et de nouvelles méthodes d'enseignement, dans l'objectif de sortir l'école de son marasme. L'école algérienne n'offrait plus aux enfants qui la fréquentaient l'éducation et les valeurs morales nécessaires pour leur construction. L'école était sinistrée. Véritablement sinistrée, si bien que des voix fusaient de toutes parts pour dénoncer son déclin qui ne servait personne. Le président Bouteflika a donc décidé d'y mettre le holà, annonçant au lendemain de son investiture un ensemble de mesures à même de remettre la machine sur les rails. La réforme de l'école a démarré officiellement en 2003. L'année scolaire 2007/2008 marque son parachèvement. L'argent consacré à l'éducation nationale, représentant la part du lion du budget de l'Etat, est utilisé, entre autres, dans la production de nouveaux manuels scolaires qui, jusque-là, manquaient de façon très inquiétante dans les établissements. Aujourd'hui, les manuels scolaires sont en nombre plus que suffisant. Ils sont même en surplus. 50% des élèves scolarisés en bénéficient gratuitement (les élèves en 1re année moyenne, les élèves démunis et les enfants des enseignants). Côté livres, il n'y a donc plus de problème. Aussi, constatons-nous, ce sont pratiquement tous les établissements scolaires du pays qui font l'objet de rénovation, avec de nouveaux équipements et outils de travail (chauffage, peinture, tables, chaises, tableaux blancs…). Les établissements se dotent aussi de micro-ordinateurs connectés à Internet, et l'enseignement de l'informatique se généralise, de façon remarquable, dans les établissements du secondaire et du moyen. Et pour faire face à la double vague des élèves qui passeront, la prochaine rentrée scolaire, du primaire au moyen (une augmentation induite par la réforme), le ministère a pris ses dispositions bien à l'avance : «Nous ne devrions pas avoir de problème dans ce sens du moment que nous avons lancé la construction de 410 nouveaux CEM que nous devrions réceptionner juste à la rentrée scolaire. En cas de non-réception de certains CEM, nous pourrons utiliser des salles du secondaire ou des écoles primaires, en attendant que ces CEM soient livrés», assure le ministre, M. Boubekeur Benbouzid. D'autres établissements sont en cours de construction dans les trois paliers de l'enseignement. Pour assurer de meilleures conditions de travail aux élèves, le ministère s'est aussi engagé à ouvrir un maximum de cantines scolaires et généraliser progressivement le transport, en particulier dans les régions désenclavées du pays. Restent maintenant la qualité et le contenu de l'enseignement : le fondamental a cédé la place à l'enseignement moyen, les programmes ont été changés dans les trois paliers et une nouvelle méthode d'enseignement a été introduite, c'est-à-dire l'approche par compétences. Les résultats des derniers examens de fin d'année (ex-6ème, BEM et bac) font croire à une nette amélioration du niveau des élèves et, par conséquent, une réceptivité pour le changement. Les chiffres annoncés atteignent des taux record jamais enregistrés depuis l'indépendance du pays. «Sont-ils réels ?» demandent toutefois de nombreux citoyens dont des membres de la famille éducative qui, quoiqu'ils semblent favorables à la réforme et à la nouvelle méthode d'enseignement, estiment que les conditions ne s'y prêtent pas. Entre autres problèmes qui handicapent la réforme, ces citoyens citent notamment la surcharge des classes : «L'approche par compétences nécessite un traitement individualisé de tous les élèves. Chaque élève doit être suivi à part. Et cela ne peut être possible dans une classe de 40 élèves, voire plus.» Des citoyens refusent de croire en la réussite de cette réforme, accusant carrément le ministère de gonfler les notes. Beaucoup pensent que des orientations ont été données aux correcteurs pour travailler de façon que les élèves aient de bonnes notes dans certaines matières même s'ils n'ont pas bien travaillé et en aient de mauvaises dans d'autres même s'ils ont bien réussi leurs exercices. Une enseignante va même jusqu'à accuser les services du ministère d'avoir fixé à l'avance le nombre de lauréats, se basant sur le système des quotas, et non sur le rendement réel des élèves. «Et on se demande pourquoi les bacheliers abandonnent vite leurs études une fois arrivés à l'université !» s'étonne-t-elle.