La Confédération africaine de football n'est pas intervenue sur les événements qui ont accompagné et suivi les dernières rencontres entre l'Algérie et l'Egypte. Cette organisation continentale a brillé par son mutisme. Même si la FIFA a pris en main, de manière bizarre d'ailleurs, ces faits en envoyant ses commissaires, il ne faut pas oublier que le match du 14 novembre au Caire entrait dans le cadre des qualifications jumelées Coupe du monde et Coupe d'Afrique des nations. Donc, la CAF avait son mot à dire. Pourtant, cette dernière s'est réfugiée derrière l'instance internationale de football, sans faire valoir ses compétences et prérogatives. Plutôt que de jouer ne serait-ce qu'un rôle modérateur entre les belligérants qui sont membres de cette organisation, elle laisse faire et se focalise sur l'organisation de la prochaine CAN 2010. Mais est-ce étonnant ? Depuis sa création en 1957 à Khartoum (Soudan), la CAF est devenue un satellite de l'Egypte. En plus du fait que la tête du secrétariat général de l'organisation est monopolisée par les Egyptiens, ce poste se transmet par voie héréditaire. L'actuel secrétaire général Mustapha Fahmy qui occupe le siège depuis 1982 n'est autre que le fils de Mourad Fahmy, secrétaire général de 1961 à 1982. Avant, de 1957 à 1958, le poste était attribué à Youssef Mohamed (Egypte) et de 1958 à 1961 c'était à Mustafa Kamel Mansour (Egypte). Et pour ne rien gâcher, le directeur adjoint de l'équipe nationale des compétitions et disciplinaire Amr Fahmy confirme l'hégémonie de la famille et de l'Egypte sur l'instance sportive africaine. Le fait que le siège de la CAF soit installé au Caire est certainement un facteur déterminant dans cette domination. Il est étonnant qu'à chaque phase de qualifications décisives où des matchs aller-retour sont programmés contre l'Algérie, à tous les coups, la dernière rencontre se joue en Egypte. C'est dire si le lobby égyptien est puissant au sein de la CAF. Cela explique presque la position de la Confédération africaine qui préfère déléguer la prise de décision pour les événements du match du Caire à la FIFA. A toutes fins utiles, rappelons que l'un des buts de la CAF est d'«empêcher toutes méthodes et pratiques de nature à mettre en danger l'intégrité du jeu ou des compétitions, ou à donner lieu à des abus dans le football». Une commission d'éthique et de fair-play chargée de s'occuper de toutes les questions d'éthique dans le football existe au sein de l'organisation. Le code disciplinaire de la CAF prévoit des sanctions pour de tels débordements. L'article 83 précise que «l'association organisatrice [d'une rencontre] ou le club organisateur répondent de l'ordre et de la sécurité dans l'enceinte du stade et dans ses abords immédiats avant, pendant et après le match. Ils sont rendus responsables de tout incident et sont passibles de mesures disciplinaires». L'article 151 stipule que les associations nationales qui organisent des rencontres doivent : «respecter et mettre en œuvre les règles de sécurité existantes (réglementation de la FIFA et de la CAF, lois nationales, conventions internationales) et prendre toutes les autres mesures de sécurité exigées par les circonstances, que ce soit avant, pendant ou après le match, ainsi que lors de la survenance d'incidents» ; «assurer la sécurité des joueurs et officiels de l'équipe visiteuse durant tout leur séjour sur le territoire national». Dans son article 11 sur les prérogatives du jury disciplinaire, il est écrit : «Le jury disciplinaire est compétent pour sanctionner les infractions qui se sont produites avant, pendant, ou après l'établissement du calendrier.» S'agissant des dispositions générales du droit disciplinaire, l'article 146 dénonce les incitations à la violence. «1. Le joueur ou l'officiel qui incite publiquement à la haine ou à la violence est puni d'une suspension de match pour une année (1) au moins et d'une amende de dix mille USD (10 000 $) au moins. 2. Dans les cas graves, notamment lorsque l'infraction est commise à l'aide d'un média de masse (par exemple la presse écrite, la radio ou la télévision), ou si elle a lieu le jour du match à l'intérieur de l'enceinte du stade ou dans ses abords immédiats, l'amende est de vingt mille USD (20 000 $) au moins et la suspension d'un (1) an au moins.» Que dire des déclarations du président de la Fédération égyptienne de football, Samir Zaher, à quelques jours de la rencontre du Caire, reprises par la presse de son pays, exhortant la population à faire vivre un climat de terreur aux joueurs et supporters algériens !? Devant cet arsenal juridique, le mutisme de la CAF demeure incompréhensible. Le tapage médiatique fomenté par les Egyptiens et orchestré par les plus hautes autorités du pays au lendemain de la rencontre de Khartoum ne peut pas faire oublier l'affront qu'ont subi les Algériens au Caire. Les agressions subies par les supporters algériens ont dépassés le caillassage du bus de l'équipe nationale et les blessures occasionnées aux joueurs. C'est un précédent historique qu'une délégation officielle de joueurs soit attaquée. Et la CAF ne réagit pas. Le lobby égyptien a bien joué son rôle. Il est temps de délocaliser le siège de la Confédération africaine de football. Il y va de la crédibilité de cet organisme continental. S. A.