Photo : S. Zoheïr Par Smaïl Boughazi Six mois après sa promulgation, la loi de finances complémentaire 2009 a eu ses premiers effets sur les différents créneaux de l'économie algérienne. Ayant été la cible de plusieurs parties, les mesures contenues dans cette loi étaient un frein idéal à un certain nombre de phénomènes- particulièrement les importations anarchiques- qui portaient un préjudice au système économique et au Trésor public. Il faut dire que la baisse des recettes du pays, un des impacts indirects de la crise économique, a été aussi l'une des raisons principales de ces mesures. Le premier élément ou impact qui pourrait faire réjouir les responsables économiques est cette baisse de 11% du nombre d'importateurs au cours des dix premiers mois de 2009. Cette baisse est due, selon le directeur du CNIS, M. Hocine Houri qui s'exprimait à l'APS, à la procédure de généralisation de l'utilisation de la carte magnétique du numéro d'identification fiscale (NIF). Néanmoins, d'autres facteurs étaient derrière cette baisse du nombre d'importateurs, telle l'institution du crédoc (crédit documentaire), qui a contraint, à coup sûr, bon nombre d'entre eux à mettre la clé sous le paillasson. Il faut rappeler que cette formule de paiement a provoqué un tollé général chez les opérateurs économiques mais le brouillard n'a pas tardé à se dissiper pour laisser la place à la raison et à la réalité amère qui caractérise les importations du pays. Il ne faut pas oublier également que l'Algérie a connu, durant la dernière décennie, l'apparition de pas moins de 45 000 importateurs. Ce chiffre est un exemple de l'anarchie qui caractérisait l'activité commerciale du pays. Outre les méfaits qu'avait engendrés une telle situation, pour des raisons évidentes, une bonne partie de ces importateurs échappe au contrôle de l'Etat. Ces importations, faites dans une totale opacité et anarchie, ont eu, entre autres, pour résultat l'inondation du marché par des produits périmés et contrefaits. Cette situation, il convient de le rappeler, a poussé les autorités à assainir le commerce extérieur en 2005, en exigeant notamment des importateurs un capital social d'au moins 20 millions de dinars. Suite à cette décision, 10 000 importateurs ont disparu du marché.Pour en revenir à la carte magnétique du numéro d'identification fiscale (NIF), cette dernière a également permis «un meilleur échange d'informations, une facilité dans les contrôles fiscaux, surtout après la prise par les pouvoirs publics à partir de cette année de mesures d'encadrement», a tenu à affirmer M. Hocine Houri. Selon la même source, l'enregistrement des opérations d'importation et d'exportation au niveau des bureaux de douane est soumis obligatoirement depuis le 10 janvier 2009 à la présentation de cette carte. En chiffres, plus de 17 800 interventions ont été enregistrées lors des 10 premiers mois 2009, contre quelque 20 000 à la même période 2008, soit une baisse de 10,98%, dont 851 concernent le secteur public (-13,78 %) et plus de 16 900 le privé (-10,83%), selon les données avancées par le responsable. La même source a également promis de renforcer davantage le dispositif de contrôle et ce, grâce aux interventions coordonnées avec les autres institutions (ministère du Commerce, Banque d'Algérie et services des Impôts), notamment avec la généralisation du NIF, ce «qui générera des recettes douanières nettement plus importantes». L'autre élément qui résulte de l'application des mesures de la LFC est la baisse des produits destinés à la revente en l'état. Les importations de blé ont ainsi diminué de près de 40,5%, celles de lait de 29% et celles des médicaments de 6%. En ce qui concerne les produits «superflus» (boissons, conserves, dérivés de produits laitiers, chocolat, etc.), la facture pour les 10 premiers mois 2009 est de 861 millions dollars avec une prévision de clôture de 1,3 milliard de dollars, entraînant ainsi une diminution de près de 13% par rapport à 2008 (1,17 milliard de dollars). Dans le même ordre d'idées, signalons la baisse d'activité du port d'Alger ces derniers mois dans le sillage des mesures de désengorgement de cette structure décidées en Conseil des ministres. Selon les chiffres communiqués par les Douanes algériennes, cette baisse est de 20,37% pour les opérations d'importation suite à l'arrêt au port d'Alger du trafic de marchandises non conteneurisées. Ces opérations d'importation sont passées de 394 770 tonnes en octobre 2008 à 314 348 tonnes au même mois en 2009. En valeur, cette chute des activités portuaires est estimée à 38,37%, soit de 615 millions de dollars en octobre 2008 à 379 millions de dollars à la même période en 2009. Si les importations d'une manière globale ont connu une baisse drastique ces derniers mois, celle des véhicules était très visible pour le commun des mortels puisque l'impact de la suppression du crédit automobile était direct, notamment sur les concessionnaires, qui affirment que les baisses étaient considérables, frôlant même les 30%. Cependant, les chiffres des Douanes relativisent. Selon cet organisme, l'Algérie a importé 228 520 véhicules au cours des dix premiers mois de 2009, contre 278 996 unités durant la même période de l'année écoulée, soit une baisse de 18,09%. Cette baisse a eu aussi pour effet l'annonce de plusieurs projets dans le secteur automobile et même le lancement d'un débat sur cette industrie en Algérie, laquelle, malgré l'existence d'un potentiel énorme pour son développement, est toujours inexistante. Il apparaît, somme toute, que les effets de la LFC 2009 n'ont pas tardé à se manifester bien que les spécialistes affirment que l'impact de cette loi ne se révélera que dans plusieurs mois. Il en ressort que les orientations prônées par l'Algérie dès l'apparition de la crise financière ont pu prémunir une bonne partie de notre économie contre les effets néfastes du cataclysme qu'a connu le monde entier. Enfin, inutile de rappeler que cette orientation n'est qu'un volet d'une stratégie globale qui comprend aussi le développement des investissements productifs et le tissu industriel qui reste toujours sous perfusion.