Deuil au Pakistan hier après le massacre de 93 villageois vendredi lors d'un match de volley-ball dans le Nord-Ouest. L'attentat suicide est le plus meurtrier jamais perpétré dans le pays. L'année 2010 a commencé au Pakistan comme elle s'était achevée en 2009 : dans le sang et l'horreur. Hier, les autorités s'affairaient toujours autour des décombres de l'attaque de Shah Hassan Khan, un village du district de Bannu, voisin des zones tribales où l'armée combat toujours les talibans. Ces derniers sont considérés comme les principaux auteurs de la vague d'attentats sanglants qui ont causé plus de 2 800 morts dans le pays en l'espace de deux ans et demi. Une tendance qui s'est accélérée depuis octobre, lorsque l'armée a lancé une offensive anti-taliban dans leur fief du Waziristan du Sud. Les funérailles des victimes de l'attentat de vendredi après-midi ont eu lieu hier. Sur le qui-vive, les autorités craignent de nouveaux attentats lors de ces rassemblements populaires. Le kamikaze avait fait exploser sa voiture, chargée de 300 kg d'explosifs, sur un terrain de volley-ball où se déroulaient un tournoi entre villages organisé par le «comité de paix» local, un groupement de villageois. Ce comité aurait soutenu l'armée lorsqu'elle est intervenue l'an dernier pour chasser les talibans de Bannu. Quelques mois plus tard, les responsables militaires avaient annoncé que le district était délivré des rebelles. Ce qui n'a pas manqué de susciter une atmosphère tendue dans la zone. Et l'attentat de vendredi est venu confirmer les appréhensions. La police a annoncé un dernier bilan de 93 morts. Seules deux autres attaques suicides ont été plus meurtrières par le passé au Pakistan : celle du 18 octobre 2007 à Karachi lors du retour de l'ancien Premier ministre Benazir Bhutto avec 139 morts et celle sur un marché bondé de Peshawar le 28 octobre dernier avec au moins 118 victimes. Mais la situation sécuritaire s'annonce difficile au Pakistan. Il s'agit du second attentat meurtrier de la semaine visant expressément des civils, après celui qui a fait 43 morts dans une procession de chiites, lundi dernier à Karachi, revendiqué par les talibans. La tendance morbide semblant suggérer que les rebelles, actuellement acculés par l'armée dans les zones tribales, rechignent de moins en moins à frapper au cœur de la population, causant les dégâts humains les plus lourds. L'attaque a été condamnée par la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, deux puissances occidentales qui ne cessent de presser leur allié pakistanais à faire davantage preuve de vigueur contre les talibans et Al Qaïda dans les zones tribales, frontalières d'un Afghanistan à feu et à sang. La chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, s'est dit «choquée» par l'attentat et a réaffirmé le soutien de l'UE au gouvernement et au peuple pakistanais. Un peuple qui semble pour l'heure contraint, à cause de contingences liées à la géopolitique, à vivre l'horreur répétée. R. S.