Construire dans chaque ville, chaque village, chaque quartier, un bâtiment au moins qui accueillerait artistes et activités culturelles, tout en finançant les nombreux projets, manifestations et actions devant l'être, nécessiterait assurément un gros budget, plus gros que celui accordé au secteur de la culture, même si ce dernier est relativement important (21 630 130 000 dinars pour 2010, soit environ 307 millions de dollars, en augmentation de 34% par rapport au budget de l'année 2009, un record jamais atteint). Aussi s'agira-t-il de trouver une alternative qui permettra de doter la culture d'infrastructures sans trop grever les budgets. Il y a, évidemment, l'option investissements privés. Mais cela exigerait au préalable l'intéressement des opérateurs économiques privés pour les amener à nvestir dans le secteur de la culture, ce qui nécessiterait l'élaboration de mesures incitatives, voire la mise en place d'une politique dans ce sens. En attendant, et en espérant, que cela se fasse et que nos investisseurs s'intéressent à la culture, il y a toujours l'option «récupération et réaffectation» de structures désaffectées. L'exemple du Musée national des arts contemporains et modernes aménagé dans le bâtiment qui abritait les ex-Galeries algériennes (Alger) illustre parfaitement les opportunités qu'offre cette option. Et des bâtiments désaffectés, il y en a un peu partout. Rien que pour la capitale, on peut en dénombrer une bonne dizaine, dont les Abattoirs, l'ancien théâtre de Mogador, les bâtiments de l'ex-Enafroid et tous ces hangars et édifices fermés. Chaque ville a ses Galeries algériennes ou Souks el fellah fermés et inutilisés depuis la dissolution de ces deux entreprises. On en trouve même dans des villages, sans parler des églises qui peuvent être transformées en centres culturels ou en bibliothèques, comme dans le cas de la cathédrale d'Oran. A ce propos, l'historien de l'architecture et de l'urbanisme, Sylvain Malfroy, affirme qu'«un bâtiment désaffecté se trouve relégué, par définition, hors du temps présent. Sa caractéristique est d'être inactuel […]. On peut alors explorer trois pistes : on adapte l'objet à un nouvel usage sans trop se préoccuper de ce qu'il était auparavant, ou alors on cherche un usage compatible avec la forme initiale de l'objet, parce que c'est elle qu'il s'agit de mettre scrupuleusement en évidence à cause de sa valeur de témoignage. Ou encore, on cherche un compromis parce que le maintien intégral de la forme bâtie n'est pas possible faute d'utilisateurs en nombre suffisant...». «Conservons l'héritage du passé en le transformant», résume-t-il. Ces «récupérations et réaffectations» sont d'autant plus réalisables qu'elles peuvent être opérées aussi bien par le ministère que par le maire soucieux de donner à la culture une place dans sa commune. Toutefois, comme le soulignent M. Malfroy et d'autres architectes et urbanistes, il faut observer certaines «règles» dans la réhabilitation de bâtiments anciens, qui est fortement préconisée dans le cas qui nous concerne. Il s'agira, souvent, de conserver les caractéristiques du patrimoine immobilier existant. Car garder ces caractéristiques participera à la préservation de l'identité du quartier, du village ou de la ville et de leur attrait esthétique. Au final, on aura suffisamment d'infrastructures culturelles, et il ne restera plus qu'à les exploiter à bon escient et de manière optimale, mais ce sont, là, une autre question et d'autres problèmes et écueils qui font de la diffusion et de la socialisation de la culture une revendication sans cesse brandie et un défi attendant toujours d'être relevé. H. G.