Synthèse de Hassan Gherab Au-delà des débats sur son origine, sa dangerosité et l'innocuité du vaccin ou plutôt des effets secondaires de ses adjuvants qui divisent même les scientifiques, la grippe A(H1N1) n'en finit pas de provoquer aussi des remous dans les cercles politiques, remous qui se sont propagés tant et si bien qu'ils ont fini par faire bouger les hautes sphères. Les parlementaires du Conseil de l'Europe ont ainsi signé jeudi dernier une proposition de recommandation demandant une enquête sur l'influence qu'aurait eue l'industrie pharmaceutique sur les autorités sanitaires dans la gestion de cette pandémie. La présidente de la commission des affaires sociales, sanitaires et familiales de l'Assemblée parlementaire du Conseil, la socialiste britannique Christine McAfferty, a fait inscrire à l'ordre du jour de la prochaine session parlementaire -dans le cadre d'une procédure d'urgence- une demande de débat sur le thème «fausses pandémies : une menace pour la santé». Cette demande sera soumise au bureau de l'Assemblée parlementaire (APCE), qui se réunira en session du 25 au 29 janvier à Strasbourg. Cette démarche suit le dépôt, effectué le 18 décembre 2009 par un groupe de quatorze parlementaires du Conseil de l'Europe -mené par l'Allemand Wolfgang Wodarg (SPD), président du sous-comité à la santé-, d'une proposition de recommandation sous le même intitulé. Les signataires n'y vont pas par quatre chemins et soutiennent que les laboratoires pharmaceutiques «ont influencé les scientifiques et les autorités responsables des normes de santé publique» pour «promouvoir leurs médicaments brevetés et leurs vaccins contre la grippe». Les parlementaires jugent que les industriels «ont incité à gaspiller les ressources -déjà peu abondantes- destinées aux soins de santé en faveur de stratégies de vaccination inefficaces» qui «exposent inutilement des millions de personnes en bonne santé au risque d'effets secondaires non connus de vaccins qui n'ont pas été suffisamment testés». «Le soin de définir une pandémie alarmante ne doit pas être soumis à l'influence des marchands de médicaments», écrivent-ils.Epidémiologiste critique à l'égard du traitement contre le virus H1N1, M. Wodarg, qui dira que la grippe a été faussement qualifiée de pandémie «sous la pression de laboratoires», veut que le Conseil de l'Europe demande à ses membres «des enquêtes sur les conséquences du déclenchement de la pandémie et sa prise en charge aux niveaux nationaux et européen». L'élu soutient que les sociétés pharmaceutiques «ont influencé les scientifiques et les autorités de santé publique pour qu'ils alertent les gouvernements sur une pandémie».Il s'agira aussi de savoir comment et sur quelles bases scientifiques l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a décrété qu'il s'agit d'une pandémie «afin de prévenir d'autres fausses alertes». La commission «social et santé» de l'APCE a d'ailleurs invité à cette même session de fin janvier l'OMS et des laboratoires pharmaceutiques pour un débat à huis clos, a-t-il précisé.Dans un entretien accordé au journal l'Humanité, il estime que «rien ne justifiait de sonner l'alerte à ce niveau. C'est une grippe tout ce qu'il y a de plus normale, affirme-t-il. Elle ne provoque qu'un dixième des décès occasionnés par la grippe saisonnière classique. Tout ce qui importait et tout ce qui a conduit à la formidable campagne de panique à laquelle on a assisté, c'est qu'elle constituait une occasion en or pour les représentants des labos qui savaient qu'ils toucheraient le gros lot en cas de proclamation de pandémie». Si la proposition de recommandation devait être validée par l'APCE, elle donnerait lieu à la rédaction d'un rapport qui ne serait pas finalisé avant quelques mois. Mais il faut préciser que les recommandations ne sont pas contraignantes pour les États membres. Toutefois, une recommandation des plus hautes sphères de la politique épinglant les laboratoires et les institutions des Etats ne peut que faire mal et avoir des répercussions.