L'initiative prise par la tutelle de créer un conseil interprofessionnel de la filière pomme de terre n'a apparemment rien de fortuit ou de hasardeux dans la mesure où cette filière connaît encore des incohérences et cela malgré la mise en place, en 2008, du Syrpalac dans le but de mettre fin à la spéculation sur les produits de large consommation et d'offrir aux agriculteurs des espaces pour leurs produits tout en les encourageant à augmenter leurs rendements. Mais, à ce jour, le système de régulation en question s'est révélé impuissant dans certains segments du circuit de la production et de la commercialisation. Citons, à titre d'exemple, les établissements de production de semences dont nombre ne respectent pas les textes de loi en vigueur dans le domaine. Des importateurs de semences de pomme de terre sont aussi responsables de l'incohérence. En effet, certains importateurs, même disposant d'un agrément du ministère de l'Agriculture, ont ramené des semences de dernière génération. Ce qui est en totale contradiction avec les règles des cultures locales. Car, pour être adopté par les producteurs algériens de pomme de terre, elles doivent être expérimentées sur champ. En somme, l'importation des semences s'est faite dans l'anarchie avec des volumes importants et des classes inappropriées (la semence est répertoriée par classes) et cela dans un but clair : mettre les producteurs à la merci des importateurs de semences, en d'autres termes s'assurer de revenus annuels lucratifs. Faut-il rappeler que 80% des besoins en semences pour la campagne 2008 proviennent de l'importation. Signalons également dans la foulée que les besoins globaux de l'Algérie en semences sont de l'ordre de 220 000 à 240 000 tonnes. La tutelle assure la couverture de ces besoins à raison de 60% pour les programmes d'arrière-saison et primaire d'une valeur de 200 millions de dollars. Le ministère s'attelle à réduire au maximum cette dépendance vis-à-vis du marché international. Il a commencé par instaurer de nouvelles règles d'importation des semences de pomme de terre inscrites dans le cahier des charges pour, du moins, annihiler les irrégularités dans les importations. Toujours au chapitre des irrégularités relevées sur le terrain, il y a lieu de signaler que, depuis quelques années des périmètres qui devaient être consacrés à la production de la semence ont été laissés à la libre appréciation des opérateurs privés. En clair, ces derniers décidaient seuls de semer ou non les surfaces qu'ils exploitent et de la quantité qu'ils veulent eux-mêmes semer. Des manœuvres rendues possibles du fait de l'absence d'interdits en la matière. Ils devraient en tout cas exister, car ces opérateurs ont des engagements à tenir et des objectifs à atteindre. C'est pour dire, enfin, que, dans la filière pomme de terre, c'est le segment semences qui accuse beaucoup d'irrigularités. Et c'est ce que précisément devrait s'atteler à remédier le conseil interprofessionnel de la filière pomme de terre. Cette institution va devoir décider de la quantité des semences à importer selon trois critères : en fonction de la production nationale de semences de pomme de terre, de sa qualité et des besoins du marché. Il faut retenir également qu'à travers l'initiative de créer un conseil interprofessionnel de la filière pomme de terre, le ministère de l'Agriculture et du Développement rural vise, bien évidemment, à mettre de l'ordre dans cette dernière, et c'est de bon augure, compte tenu de l'importance de ce tubercule du fait de sa large consommation et qui, en somme, ne devrait pas connaître de période de crise, synonyme de flambée des prix de la pomme de terre sur les étals du détail. C'est d'autant plus possible à condition que tous les intervenants, à savoir l'agriculteur, le producteur de semences, le stockeur, l'importateur et les fournisseurs d'intrants travaillent en synergie totale sous la coupe de la Chambre d'agriculture. Une synergie une fois en place et opérationnelle, l'objectif d'atteindre annuellement les 40 millions de quintaux à l'horizon 2014 serait facilement réalisable. A la fin du mois de juin 2010, période de grande récolte, il sera possible de juger si le conseil interprofessionnel a rempli sa mission ou non. Rendez-vous est donc pris pour cette date. Z. A.