C'est une réalité amère qui dure depuis des années. Le taux de chômage des jeunes diplômés universitaires en Algérie ne cesse de prendre des proportions alarmantes. En effet, d'une année à une autre, ils sont nombreux à avoir obtenu une licence, un magistère, voire un doctorat, et à être à la recherche d'un emploi ! Ainsi, les milliers de diplômés qui quittent chaque année les bancs de nos universités affrontent, à leur grand dam, une terrible précarité. Pour s'en convaincre, il suffit de jeter un coup d'œil sur les pages des petites annonces des nombreux quotidiens nationaux. Or, à entendre les patrons recruteurs, le travail existe, mais ce sont les compétences qui font défaut. «Nos jeunes diplômés sont mal formés. C'est la triste vérité. A chaque fois que nous publions une annonce pour le recrutement d'ingénieurs ou de techniciens, nous recevons des milliers de demandes dont la majorité est honteusement mal écrite. Je m'interroge dès lors comment ces jeunes peuvent occuper un poste de travail», indique le P-DG d'une entreprise privée basée à Boufarik. Un autre manager souligne pour sa part que, pour chaque emploi annoncé, «nous recevons une moyenne des centaines demandes et parmi celles-ci il est vraiment rare de trouver quelqu'un qui donne satisfaction». Et pourquoi donc ? «Eh bien, ces jeunes ont une formation universitaire très déficiente. C'est à peine s'ils maîtrisent les notions générales d'un métier technique. De plus, rares sont ceux qui maîtrisent correctement l'outil informatique. Comment voulez-vous alors qu'on les recrute ?» explique le même manager dont la vision est largement partagée par de nombreux autres chefs d'entreprise. Ces derniers disent tout haut ce que tout le monde pense tout bas : «Le travail, ce n'est pas ça qui manque. Mais nos jeunes sont fainéants et leur formation universitaire accuse de graves lacunes.». Mais est-ce vrai ? Malheureusement oui, car la plupart des spécialistes et des experts reconnaissent que le niveau de nos universitaires ne fait que baisser d'année en année. «La baisse du niveau des universités algériennes est l'une des principales causes qui empêchent nos diplômés de trouver du travail», estime un économiste. De leur côté, les employeurs disent hésiter à embaucher les jeunes diplômés au sein de leur entreprise. Ils les jugent «non qualifiés». Ces patrons reprochent à ces jeunes de ne pas avoir les capacités nécessaires qui leur permettraient d'assumer un poste de travail. De plus, les nouveaux diplômés ont de sérieux problèmes de langue, soit en arabe, soit en français. «Leurs études à l'université sont beaucoup plus théoriques que pratiques. Cela constitue un vrai handicap pour ces jeunes qui ont du mal à accéder au monde du travail. Dans ce contexte, les entreprises sont obligés de chercher des personnes expérimentées», souligne un spécialiste de la gestion des ressources humaines. Quant aux étudiants, ils sont bel et bien conscients de la dégradation du niveau dans leurs universités. Et d'ailleurs, ils ne cessent de les accuser d'être «le premier responsable de leur chômage». D'aucuns estiment que la connexion entre l'université et le monde du travail en Algérie fait grandement défaut. Le facteur aggravant, selon eux, est lié aux programmes qui s'appuient, disent-ils, sur l'aspect théorique du cursus. Selon plusieurs enseignants à l'université, tant que la formation universitaire ne prévoit pas de diplômes dits intermédiaires entre les universités et les entreprises, le chômage des universitaires sera toujours d'actualité. Nos jeunes paient donc la «déconnexion totale» entre l'université et le monde du travail. Les pouvoirs publics sont ainsi appelés à adapter l'enseignement universitaire aux besoins de l'entreprise. Sans une telle démarche, nos jeunes diplômés connaîtront toujours les affres du chômage. A. S.