En envoyant à Alger Claude Guéant, secrétaire général de la Présidence et son homme de confiance, Nicolas Sarkozy a pensé bien faire. Mais de cet énième voyage algérien, il ne reste rien de concret. Ou presque. Il est vrai, compte tenu de la place qu'il occupe dans l'échiquier politique français, Claude Guéant, accompagné du sherpa de Sarkozy, David Levitte, a été reçu par Abdelkader Messahel, ministre délégué chargé des affaires maghrébines et africaines et par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia. C'est tout de même une première. Mais la récolte du secrétaire général de la présidence de la République française est tout de même maigre. Parce que, selon des informations de presse rapportées des deux côtés de la Méditerranée, les autorités françaises ont espéré une audience à la présidence de la République algérienne. Niet. Du côté d'El Mouradia, on ne juge toujours pas que le temps est venu pour que le secrétaire général de la présidence française soit reçu à un tel niveau. Il est vrai que, pour les Français, l'heure n'est pas au désespoir, malgré le poids de plus en plus lourd des griefs algériens. La dernière sortie –ratée- de leur ministre des Affaires étrangères en est la preuve accablante. Et puis, il y a ces écarts à répétition. A commencer par cette pression exercée sur le Mali (par le même Kouchner) pour libérer des prisonniers –terroristes- en contrepartie d'un otage français. Cela va à l'encontre de la proposition de l'Algérie qui, par le biais de l'ONU, a fait passer une résolution criminalisant la rançon dans les opérations de libération des otages. Mais avant d'atterrir à Alger, Claude Guéant savait tout cela, lui qui avait déjà accompagné Kouchner à Bamako pour concrétiser cette opération. Cela n'est, a contrario, qu'un point parmi tant d'autres qui discréditent de plus en plus les intentions de Paris vis-à-vis de l'Algérie. On a beau dire, à Paris, que cette virée du secrétaire général de la présidence française est «ordinaire». On a même annoncé que «la visite est programmée» depuis longtemps. Pourtant, un diplomate français parle de «sortir de cette période d'aigreur» qui caractérise les relations entre les deux pays. Cela veut tout simplement dire que les choses ne vont pas bien. Et cela depuis longtemps. Car, depuis le début de l'affaire Hasseni, en août 2008, la situation, déjà fragile, n'a fait que se dégrader. Preuve en est, le président Abdelaziz Bouteflika n'a reçu aucun responsable français depuis la visite du Premier ministre François Fillon en juin 2008. Ce qui était une sorte de vieux conflit autour de la mémoire a vite dégénéré. Et chaque mois qui passe, les raisons de la crispation des relations entre les deux pays. Car, avant les fâcheuses déclarations de Bernard Kouchner, les Français ont multiplié les maladresses. La plus révoltante étant cette liste de pays à risque sur laquelle figure l'Algérie. Pourtant, tous les responsables français accordent à notre pays le statut de pays qui lutte contre le terrorisme. C'est d'ailleurs ce que vient de confirmer le département des Affaires étrangères britanniques. Londres considère, en effet, qu'«il n'existe aucune raison justifiant l'inscription de l'Algérie sur la liste des pays à risque». Tous ces éléments, conjugués aux multiples rendez-vous ratés dans l'élaboration de la «relation d'exception» ont donc fini d'inscrire les liens algéro-français dans une saison de grand froid. Cette ultime visite de Claude Guéant est peut-être un baroud d'honneur de Nicolas Sarkozy. On parle, des deux côtés, d'une virée de Kouchner. Mais rien n'est encore officiel. Même s'il est établi que Claude Guéant est souvent le pompier diplomatique du président français. Il l'a prouvé durant l'été 2007 lorsqu'il avait grandement participé à la libération des infirmières bulgares. Ces dernières étaient condamnées à mort en Libye. Elles étaient accusées d'avoir transfusé du sang contaminé du sida pour des enfants libyens. Réussira-t-il à éteindre le feu qui ronge les relations algéro-françaises ? A. B.