Alors que sa visite à Alger a été entourée de la plus grande discrétion, le secrétaire général du Palais présidentiel français, Claude Guéant, a finalement bien été reçu à un haut niveau pour son deuxième déplacement en Algérie. Par Abdelkader Bachiri Alors que sa visite à Alger a été entourée de la plus grande discrétion, le secrétaire général du Palais présidentiel français, Claude Guéant, a finalement bien été reçu à un haut niveau pour son deuxième déplacement en Algérie. Lui qui avait été rabroué lors de sa première visite à Alger en exprimant le vœu de rencontrer le président Bouteflika devrait être bien content cette fois-ci d'avoir pu aller au bout de sa mission. Pourtant, le climat politique entre les deux pays jusqu'à ces derniers jours n'était pas de nature à faciliter une rencontre en haut lieu surtout après la dernière sortie médiatique de Claude Guéant lui-même il y'a quelques jours qui avait, à la suite de la mort du général Bigeard, vanté «l'humanisme» de ce tortionnaire de la Guerre de libération nationale. Les observateurs s'attendaient donc à ce que la visite de l'émissaire de Sarkozy tourne à un remake de son dernier déplacement à Alger où il n'avait été reçu que par le Premier ministre Ahmed Ouyahia. Contrairement à ce que l'on pouvait donc s'attendre, la délégation française a bénéficié d'un traitement meilleur que celui auquel elle avait eu droit en février dernier. Le SG de l'Elysée et le conseiller diplomatique du président Sarkozy, Jean-Claude Levitte, ont ainsi été reçus par Bouteflika lors d'une audience à laquelle ont assisté le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, et le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel. Bien que jamais annoncée officiellement, la visite à Alger du plus proche conseiller de Nicholas Sarkozy était présentée comme «sûre» et intervenant comme une «suite» de la rencontre entre Bouteflika et le chef d'Etat français à Nice, lors du sommet France-Afrique. Mais, que s'est-il finalement passé pour que l'information relative au déplacement en question soit entourée de cette discrétion ? Dans ce dossier sensible des relations entre Alger et Paris, c'est décidément les pincettes qui sont de mise en raison du nombre incalculable de contentieux entre les deux parties. Mais ce qui est étonnant dans ce déplacement de hauts responsables français en Algérie, c'est la discrétion et le manque de communication qui a entouré le voyage pourtant officiel. De part et d'autre, on semble privilégier une visite loin des feux de la rampe pour des raisons qui restent incompréhensibles. Mais, la question qui se pose maintenant c'est de savoir si cette visite va permettre réellement de relancer des relations politiques timorées par de lourds dossiers historiques. Il est évident que le fait que le président Bouteflika a décidé cette fois-ci d'accorder une audience à la délégation française est déjà en soit un geste important qui exprime une volonté d'aller de l'avant, de dépasser les malentendus qui existent entre les deux pays. Malentendus exacerbés, du reste, par la sortie médiatique de Bernard Kouchner qui avait conditionné l'amélioration des relations entre les deux pays par le départ du pouvoir de la « génération des anciens combattants de la guerre » de libération, comprenez les anciens moudjahidines. Cela a suffit pour envenimer encore les rapports bloqués entre les deux pays depuis l'épisode de l'arrestation du diplomate algérien Mohamed Hassani. D'un autre côté, la relance de la polémique sur la mort des moines de Tibhirine et la prétendue implication de l'armée algérienne n'étaient pour ainsi dire des signes allant dans le sens de l'apaisement pourtant souhaité par la société civile et les acteurs économiques. Elément encore plus pesant dans le pourrissement que connaissent les relations entre les deux pays, cette initiative française de classer l'Algérie dans la liste des pays à risque. Cette situation a poussé les autorités algériennes à durcir davantage le ton dans le débat sur les crimes commis par l'armée coloniale durant la présence française en Algérie. Les relations en sont restées là jusqu'à ce déplacement surprise du président Bouteflika à Nice pour le sommet France-Afrique. Le chef de l'Etat qui répondait favorablement à une invitation de son homologue français fait donc le choix de l'apaisement. S'ensuivit cette accolade bien appuyée entre les deux présidents et cette déclaration perçue presque comme une supplication de Sarkozy à l'adresse de Bouteflika : « Je t'en prie, viens… ». Cette ambiance était peut-être annonciatrice d'une détente, mais, faut-il le dire, les rapports sont encore trop froids pour pouvoir rapidement avancer dans ce sens là. En envoyant Guéant, son plus proche collaborateur à l'Elysées, Sarkozy espère certainement profiter de la nouvelle situation née du déplacement de Bouteflika à Nice pour tenter ce qui s'apparente à une redynamisation des relations entre les deux rives.