Nombreuses sont les jeunes filles qui s'engagent dans la vie active non seulement pour avoir leur autonomie et donc répondre à leurs propres besoins mais aussi pour venir en aide à des parents, des frères et des sœurs qui peinent à joindre les deux bouts. La jeune fille seconde son père et, dans certains cas, le remplace carrément dans la gestion financière de la maison. Elle se retrouve bon gré mal gré dans des situations où elle est constamment appelée à apporter une aide somme toute indispensable pour le bien-être des siens. Une manière de maintenir un équilibre très souvent fragile en ces temps de grande cherté de la vie mais aussi de déchirements entre les membres d'une même famille. «Le petit frangin a besoin d'une paire de baskets et la paye du père ne suffit pas pour couvrir les frais de la fête de l'Aïd […]», lance la mère ou la grande sœur. La réponse est toute faite : «J'envoie l'argent demain sur le numéro CCP de […].» Ce n'est pas la peine d'essayer de dire non ou de tergiverser sur la question. Encore moins de faire un quelconque reproche à ce petit frère qui ne veut pas attendre que la fête de l'Aïd passe ou à cet autre frère qui a tout pour appuyer son père dans la construction de la maison familiale mais qui passe son temps à «errer» à la recherche d'on ne sait quel bonheur imaginaire. «Aujourd'hui, il ne faut pas trop compter sur les garçons. Ils refusent d'assumer leurs responsabilités et cherchent trop la facilité […] Les filles sont bien meilleures», entend-on dire de nombreuses mères qui, malheureusement pour elles, ne peuvent pas faire face à «l'impassibilité» pour ne pas dire carrément à «l'insensibilité» de leurs garçons. Un laisser-aller qui peut toutefois trouver son explication dans les difficultés d'accès à un emploi décent pour ces garçons, nombreux à abandonner leurs études à un âge précoce. Une situation que connaît aussi, devrions-nous le reconnaître, de nombreux diplômés universitaires qui ne pensent aujourd'hui qu'à partir ailleurs, outre-mer, à la recherche de leur propre destinée. Il ne faut pas donc trop philosopher, sommes-nous tentés de dire, pour chercher à comprendre certains comportements de ces jeunes en perte de repères. Les filles ne sont pas mieux nanties mais au lieu de se laisser faire par les caprices des temps qui ne font que se dégrader, elles décident de faire face et surmontent les obstacles. Pas toutes mais un grand nombre d'entre elles. De toutes les façons, se disent-elles, elles n'ont pas le choix. Se soumettre à une prétendue fatalité qui n'est en fin de compte que le résultat d'un conditionnement de femmes «diminuées» par l'homme et par la société n'est pas à encourager. Les temps ont changé et la supériorité de l'homme sur la femme n'est qu'un mot, vide de tout sens. Un mot qui n'a de place que chez les arriérés, ceux-là mêmes qui refusent de reconnaître les nombreuses qualités de ces femmes combattantes, étant eux-mêmes incapables de faire face aux problèmes de la vie. De nombreuses femmes s'engagent alors dans la grande bataille pour leur survie et la survie des leurs mais, mieux que cela, pour s'affirmer dans la société et gravir les échelons du succès jusqu'à occuper des postes de responsabilité considérés jusque-là comme l'apanage des hommes. La jeune femme se débrouille comme elle peut, se libère de l'emprise de l'homme et de toute une société qui, souvent, lui jette un regard accusateur, parfois haineux et combien de fois méprisant. Elle prend sa vie en main, garde l'œil fixé sur son objectif […] pensant sans cesse à ceux qui attendent beaucoup d'elle et qu'elle ne doit surtout pas décevoir. Elle prend sur elle, se bat avec les moyens dont elle dispose et oublie ses propres problèmes sur les plans personnel et professionnel. Pas de droit à l'erreur même pendant les pires moments d'abattement et de désespoir… K. M.