Photo : M. Hacène L'ambassadeur de Turquie en Algérie, Ahmet Necati Bigali, indique dans l'entretien qu'il nous a accordé que les échanges commerciaux entre l'Algérie et la Turquie vont augmenter davantage avec la signature d'un accord de libre-échange qu'il estime nécessaire. Le diplomate turc annonce également la mise en œuvre prochaine de la Chambre algéro-turque de commerce et d'industrie. Entretien réalisé par Salah Benreguia La Tribune : Quel constat faites-vous de la dernière session de la commission mixte algéro-turque et, en général, des relations bilatérales entre l'Algérie et la Turquie ? Ahmet Necati Bigali : Six ans après la tenue de la dernière session en Turquie, en 2004, la commission mixte entre les deux pays, qui s'est tenue les 10 et 11 mars derniers à Alger a permis de passer en revue tous les volets relatifs à la coopération économique et commerciale. Le plus important dans ce rendez-vous est le renouvellement du contrat d'achat de gaz naturel liquéfié algérien. Après le premier contrat signé en 1994 et qui a duré 20 ans, les deux parties ont convenu de renouveler le contrat pour une longue durée, après 2014. L'Algérie est un important fournisseur de notre pays, d'autant que la Turquie s'approvisionne à hauteur de 14% en gaz naturel liquéfié de la part de l'Algérie. M. Chakib Khelil, qui a présidé la partie algérienne, nous a rassurés dans ce sens. Vous savez que l'Algérie et la Turquie entretiennent d'excellents rapports et se considèrent comme des partenaires stratégiques. Cela est dû notamment au traité d'amitié qui été signé en 2006 entre nos deux pays. Lors de cet événement, nous avons paraphé un accord sur l'agriculture qui sera signé dans quelques mois. Nous avons également signé un accord de coopération dans le domaine de la communication. En vertu de cet accord, les télévisions de deux pays vont pouvoir entrer en étroite collaboration. Justement, beaucoup considèrent que la coopération entre l'Algérie et la Turquie peut être à un meilleur niveau que celui enregistré jusqu'à maintenant, d'autant que les deux pays entretiennent d'excellentes relations politiques et diplomatiques. Quel est votre avis à ce propos ? C'est vrai qu'il y a un grand potentiel pour une meilleure coopération économique et commerciale entre les deux pays. Mais ce qui manque dans nos relations, c'est l'absence d'un accord de libre-échange. Ce genre d'accord nous l'avons également conclu avec le Maroc, la Libye, l'Egypte et la Tunisie. Donc avec tous les pays maghrébins, sauf l'Algérie. Mais je pense que le gouvernement algérien n'est pas encore prêt à le signer. Il attend l'adhésion de son pays à l'OMC, et là, je pense que, l'Algérie adhérant à cette organisation, nos relations commerciales se développeront davantage. Je peux également vous rappeler qu'en annexe de l'accord d'association signé par l'Algérie et l'Union européenne, entré en vigueur en 2005, il y avait une recommandation pour l'Algérie de signer cet accord avec la Turquie. En effet, l'accord d'association entre l'Algérie et l'UE prévoit la signature d'un accord de libre-échange avec la Turquie, qui est un partenaire de l'UE. Existe-t-il une volonté politique entre les deux pays pour la signature de ce genre d'accord ? Chez nous, cette volonté existe depuis des années. Nous voulons toujours signer cet accord comme nous l'avons fait avec les autres pays du Maghreb. Au niveau algérien, il ne s'agit nullement d'un refus mais d'un report en attendant l'adhésion de l'Algérie à l'OMC. Quel est le volume des échanges commerciaux entre l'Algérie et la Turquie ? S'agissant de volume d'échanges commerciaux entre nos deux pays, pour l'année 2008 il est de l'ordre de 5 milliards de dollars. Mais nous payons chaque année trois milliards de dollars pour le gaz naturel liquéfié (GNL), car nous achetons le GNL de l'Algérie. De ce fait, la balance commerciale est plutôt positive côté algérien. Concernant les investissements turcs en Algérie, ils avoisinent les 350 millions de dollars en 2009. Le volume des investissements turcs en Algérie est, pour moi, très faible, mais il y a, ces jours-ci un grand projet d'investissements à Oran. Il s'agit de la production et de la transformation de fer en acier. Ce projet sera mis en œuvre par le biais d'une société turque qui est établie depuis trois ans en Algérie, en l'occurrence Tosyali Holding. Si au début le montant de cet investissement a été établi à 300 millions d'euros, les investisseurs turcs m'ont fait savoir que ledit projet pourrait monter jusqu'à 1 milliard de dollars. Personnellement, je crois en ce projet car l'Algérie, avec ses différents projets de construction, aura besoin de fer et cela peut ouvrir la voie aux exportations. Combien d'entreprises turques exercent en Algérie, dans quels domaines d'activité, et quels sont les objectifs d'investissements en Algérie ? Il n'y a pas moins de 200 entreprises turques qui exercent en Algérie et dans divers secteurs, dont près de la moitié interviennent dans le domaine de la construction. Il existe des bureaux-conseils turcs pour l'investissement et le commerce qui sont installés également en Algérie ainsi que des firmes spécialisées dans l'import-export. Nous avons également des investissements ici en Algérie, notamment dans l'agroalimentaire, le mobilier, les travaux publics (autoroutes…) et, enfin, dans les carrières (granulats). Pour ce qui est de nos objectifs, c'est de créer une Chambre de commerce et d'industrie algéro-turque. Cette institution rassembler a tous les opérateurs économiques et industriels et les investisseurs des deux pays. Elle sera mise en œuvre dans quelques mois. Au niveau des dirigeants des deux pays, il y a une volonté dans ce sens.