Photo : S. Zoheïr Par Smaïl Boughazi Le secteur de la pêche en Algérie revêt une importance considérable. Les pouvoirs publics, conscients de cet état de fait, ont, depuis quelques années, élaboré une réglementation et une stratégie à long terme. Ils projettent de le booster en mettant en place un programme qui s'étalera d'ici à 2025 et une enveloppe de 300 milliards de dinars y sera consacrée. Il s'agit, selon le ministère de la Pêche, de mettre en place des espaces économiques performants et viables en fonction des principes de rentabilité et de complémentarité définis en plusieurs zones, à savoir les zones de gestion intégrée de la pêche et de l'aquaculture (GIPA) et les zones d'activité de l'aquaculture (ZAA). Le ministère énumère trois phases nécessaires pour la mise en œuvre de cette politique de développement sectorielle. Il est question, dans ce cadre, d'une première phase qui sera axée sur une refondation et une restructuration du secteur. Cette première étape, qui s'étalera jusqu'à 2010, a été entamée il y a trois ans (2005). Durant cette période, l'effort sera accentué pour l'optimisation des capacités de production et celles de transformation des produits de la pêche en Algérie grâce à la restructuration de la flottille, à la réhabilitation et la modernisation des ports de pêche. Concernant l'aquaculture, le département de la pêche prévoit d'identifier les différentes filières et les sites à même d'accueillir les projets d'investissement dans les différentes filières aquacoles. 186 sites ont été déjà identifiés. Parallèlement à cette projection, il faut dire que le secteur connaît actuellement une dynamique particulière même si elle est loin d'atteindre le seuil requis. Les statistiques reflètent cet état de fait. Ainsi, selon le ministère, l'Algérie recèle une moyenne de 2,2 millions d'hectares sur l'ensemble de la superficie exploitable sous juridiction nationale estimée à 9,5 millions d'hectares. Il est fait état d'une production annuelle d'environ 130 000 tonnes, constituée à 80% de petits pélagiques (sardine, anchois), et de 500 tonnes issues d'une aquaculture naissante. Le consommateur algérien, lui, consomme en moyenne 4,58 kg/hab./an, alors que le seuil minimal recommandé par l'OMS est de 6,2 kg/hab./an. Ce sont, entre autres, les raisons qui ont fait surgir une nouvelle vision pour ce secteur. Comment augmenter le rendement ? Comment combler le déficit nutritionnel de nos populations en protéines animales d'origine halieutique ? Les objectifs tracés par le ministère pour répondre à cette question et en même temps contribuer au développement du pays sont axés sur un nombre d'actions à entreprendre ou qui sont envisagées. Il s'agit, en effet, d'augmenter la production, souligne le département de la pêche, consécutivement à l'injection de navires, de contribuer à la sécurité alimentaire à travers la disponibilité du produit et sa distribution sur tout le territoire national, de la création d'emplois en développant les différents créneaux de la pêche et de l'aquaculture. Le ministère a également mis au point l'année dernière une batterie de mesures, dont l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation du secteur de la pêche. Un cadre réglementaire, faut-il le souligner, qui a institué de nouvelles règles destinées aux intervenants dans le secteur. Parmi les points à citer, il y a l'exigence d'une autorisation de pêche, l'assurance des embarcations et la connaissance de tous les détails afférents aux moyens de pêche. Le ministère justifie l'élaboration de cette réglementation par le souci d'une «exploitation optimale des ressources halieutiques». Des assises nationales ont été également organisées en vue de remettre de l'ordre dans ce secteur. Parmi les résultats de ces assises, les participants ont mis le doigt sur la plaie et préconisé une panoplie de mesures. Celles-ci concernent quatre points essentiels : gestion et l'exploitation des ressources halieutiques et aquacoles, organisation de la profession, financement du secteur, formation des ressources humaines et recherche appliquée. La régulation du marché pose problème Le directeur de la pêche de la wilaya d'El Tarf avait indiqué récemment à l'APS que «les marins n'hésitent plus à jeter d'importantes quantités en mer afin de maintenir le prix élevé au détriment d'une demande qui se fait de plus en plus forte notamment avec l'arrivée en masse des vacanciers». Ce qui ouvre un autre dossier à ne pas prendre avec légèreté. La régulation du marché ainsi que le stockage de la production restent une condition sine qua non pour tirer bénéfice des produits halieutiques. Or, ce responsable a constaté que «les prix [qui oscillent entre 70 et 100 DA] sont justifiés par l'absence d'une halle à marais par laquelle doit transiter le produit de la mer. Cela peut donner une idée précise sur la commercialisation du poisson avec une fiabilité des quantités péchées et aider l'administration de tutelle à avoir des données précises sur les mareyeurs». Il est vrai que la régulation du marché pose problème. Toutefois, il est difficile, selon certains, de situer les responsabilités. Car, souvent la production est vendue à des mandataires qui dictent les règles. Ce qui se répercute souvent sur les prix et même la disponibilité du produit. Ce raisonnement confirme, à n'en point douter, qu'une industrie de transformation réelle doit voir le jour. D'ailleurs, faut-il le rappeler, certaines recommandations des assises de la pêche vont dans ce sens : la réhabilitation, la mise à niveau et la modernisation des installations de transformation existantes, l'allégement des taxes douanières en ce qui concerne l'importation des matières premières destinées à la transformation des produits de la pêche et de l'aquaculture et l'implantation au niveau des ports de pêche de halles à marées, constituant une mission de puissance publique, et l'uniformisation du mode d'organisation, de fonctionnement et de gestion.