L'adoption, dimanche dernier au Congrès américain, d'une réforme historique du système de santé, assurant une couverture à la quasi- totalité des Américains prouve que les Etats-Unis restent capables de «grandes choses», telle a été la première réaction du président Obama à cette victoire politique sans conteste. Intervenant depuis «l'East Room» de la Maison-Blanche, un lieu souvent réservé aux moments importants d'une présidence, Obama a ajouté, sourire aux lèvres : «Ce soir, nous avons surmonté le poids de la politique, alors que tous les spécialistes nous affirmaient que ce n'était plus possible.» Quelques minutes plus tôt, 219 représentants démocrates lui avaient offert la plus grande victoire législative de sa jeune présidence, en adoptant la plus importante réforme de la couverture santé depuis des décennies. Une réforme dont il a revu certains objectifs à la baisse mais qui restera probablement le symbole de sa législature et fait aboutir un combat mené par les Démocrates depuis un siècle. En début d'après-midi, pourtant, l'issue du vote n'était vraiment pas certaine. Pendant les débats, les Républicains avaient réitéré leur opposition à un plan jugé trop coûteux. Mike Pence, numéro trois de l'opposition, avait même ironisé : «Il n'y a qu'à Washington qu'on peut dire qu'on dépense 1 000 milliards tout en faisant économiser de l'argent aux contribuables.» Mais les chefs démocrates ont fini par obtenir le ralliement du Démocrate anti-avortement Bart Stupak et de ses partisans. Un précieux soutien rendu possible grâce au compromis passé avec Barack Obama qui s'est engagé à signer un décret pour réaffirmer l'interdiction des financements fédéraux pour l'avortement. Certains Démocrates ont néanmoins refusé de s'engager pour une réforme que les sondages disent impopulaire. Selon un récent sondage du Wall Street Journal, 36% des Américains jugent la réforme positive, contre 48% qui l'estiment négative et 15% sans opinion. Au total, 34 Démocrates ont finalement voté contre le projet de loi tout comme la totalité des 178 Républicains. Ce texte devrait permettre de garantir une couverture santé à 32 millions d'Américains qui en sont actuellement dépourvus. L'objectif est de couvrir 95% des citoyens de moins de 65 ans et des handicapés, les plus âgés étant déjà protégés par un système d'assurance public, le Medicare, tandis que le Medicaid protège les foyers à très faibles revenus. La plupart des Américains seront désormais obligés de s'assurer, sous peine de se voir affliger des pénalités. Des aides et des crédits d'impôts ont toutefois été prévus pour aider les familles gagnant moins de 88 000 dollars par an à payer leurs cotisations. Les entreprises de plus de 50 salariés qui ne fourniront pas de couverture seront également pénalisées à raison de 2 000 dollars par an par salarié non couvert. Le texte interdit par ailleurs aux assureurs de refuser une couverture à des personnes malades préalablement, et les parents pourront protéger leurs enfants jusqu'à 26 ans. Estimée à 940 milliards de dollars sur dix ans, la réform devrait néanmoins réduire le déficit américain de 138 milliards de dollars, selon le bureau du budget du Congrès. Le texte prévoit, en effet, une baisse des dépenses de Medicare. Jusqu'à ce jour, la couverture maladie universelle n'existait pas aux Etats-Unis, où environ 36 millions de citoyens n'ont pas d'assurance santé. A cela s'ajoutent les millions de personnes dont l'assurance ne couvre pas l'ensemble de leurs dépenses, dans un pays où les frais médicaux et pharmaceutiques sont exorbitants. La majorité des assurés, à savoir 58,5% en 2008, bénéficient de polices souscrites par leur employeur mais ils courent le risque de se retrouver sans protection du jour au lendemain en cas de licenciement. G. H.