Photo : Riad Par Samir Azzoug Déstabilisé, le pouvoir d'achat en Algérie subit une évolution arythmique de la mercuriale et du salaire, au grand dam des citoyens. Au décalage qui s'accentue entre les facteurs macro et microéconomiques s'ajoutent ceux des modèles de consommation et de production. Telle une équation à plusieurs degrés et à multiples inconnues, la problématique découragerait presque un Nobel d'économie. Comme tout bon arithméticien, il faut «partitionner» le problème. Caractérisé par deux volets bien distincts. Il y a d'un côté celui de l'inflation et de l'autre la rémunération, même si les deux se rejoignent et s'entremêlent. L'économie algérienne est quasi-exclusivement basée sur les échanges internationaux. Le pays monnaye ses produits de consommation par les hydrocarbures. La facture d'importation des produits alimentaires a atteint 437 millions de dollars en février 2010 –malgré une baisse de 109 millions de dollars par rapport à la même période de 2009. De ce fait, les prix du marché local dépendent en grande partie des fluctuations des marchés internationaux et de la monnaie nationale. Si l'on ajoute à cela la symptomatique incapacité des pouvoirs publics à imposer une régulation salutaire d'un marché où les spéculateurs, fraudeurs et autres adeptes du marché noir règnent en maître, la valse des prix ne connaît aucune bride. Nonobstant les sempiternelles annonces de subventions et de plafonnement des prix de certains produits de large consommation, les résultats sont mitigés. Alors que le ventre n'a pas d'oreille. Le deuxième volet, à savoir la rémunération, est presque aussi tumultueux. Les salaires évoluent lentement et sur une base que seuls les décideurs arrivent à cerner. Il est vrai que cette année, le SNMG a été revu à la hausse (15 000 DA au lieu de 12 000 DA) et une enveloppe de 140 milliards de DA a été consacrée à la révision des régimes indemnitaires de la fonction publique, mais le décalage reste entier. Face à l'envolée des prix de l'immobilier, la lourdeur des factures d'électricité et de gaz, des soins médicaux et celles des produits alimentaires, le simple fonctionnaire a recours, presque automatiquement, soit au crédit à la consommation (aujourd'hui annulé) et encourt le risque de surendettement, ou alors à des pratiques «parallèles» : commerce informel, travail au noir, etc. Ce qui accentue le malaise économique. En France, pour offrir un certain équilibre au fonctionnaire, un décret promulgué en juin 2008 instaure une indemnité de garantie individuelle du pouvoir d'achat (GIPA). Celle-ci étant un complément financier dont le montant couvre exactement le taux d'inflation. Cela pourrait constituer une solution. Mais M. Karim Djoudi, ministre des Finances, ne cessera de rappeler qu'«on ne peut construire des salaires sur la base du pouvoir d'achat». En l'absence d'une véritable dynamique de production et d'une croissance significative, sur quoi doit-on alors se baser ? Sauf peut-être à changer de modèle de consommation pour l'ascétisme.