La qualité de la prise en charge dans les établissements publics de la santé est bien en deçà des espérances légitimes des usagers. Ce n'est un secret pour personne. Les malades et leurs familles soulèvent, partout, un tas d'insuffisances, dont la bureaucratie, le favoritisme, le laisser-aller et le peu d'attention accordé aux patients. On est unanime à dire qu'on ne peut, par exemple, subir une lourde opération chirurgicale dans un hôpital de l'Etat sans «intervention». Faire appel aux «bons offices» d'une connaissance qui travaille dans le secteur ou ayant des liens quelconques avec la corporation constitue toujours un prélude pour obtenir un rendez-vous ou se faire admettre pour ce genre de soins. Dans le cas d'une infirmité, les parents sont souvent contraints d'engager, à leurs propres frais, un garde-malade pour veiller au bien-être de la personne hospitalisée. Pour des analyses médicales ou des besoins en matière d'imagerie de précision, le patient est automatiquement orienté vers des établissements privés où le prix des prestations est hors de portée des petites bourses. Les installations hospitalières sont fréquemment déclarées en panne. Ne parlons pas de la qualité de l'accueil, de l'hygiène, de la nourriture servie ou des conditions de séjour. Les insatisfactions sont nombreuses et portent, dans la plupart des cas, sur les dispositions les plus élémentaires. Des citoyens, de plus en plus nombreux, recourent à la justice pour se faire dédommager suite à de graves erreurs médicales. Dans certains cas, c'est «l'incompétence» qui est carrément dénoncée devant les tribunaux. «Il est inadmissible que les Algériens continuent à se soigner dans des conditions difficiles», souligne le ministre de tutelle en marge d'une récente visite de terrain. L'aveu du docteur Barkat, premier responsable du secteur, met le doigt sur un sérieux problème qui touche pratiquement tous nos concitoyens. Dire publiquement cette vérité équivaut à réclamer une meilleure gestion des infrastructures et des potentialités existantes. Il ne suffit plus d'investir dans la construction de nouvelles structures ou dans l'acquisition des équipements. Il faut faire marcher les hôpitaux de façon optimale. En faire des lieux où l'on manifeste beaucoup d'humanité et de compassion face à un être humain qui souffre. Il est vrai que nos praticiens et nos spécialistes ont également des soucis et des préoccupations socioprofessionnelles, mais aucune revendication –si pressante soit-elle- ne saurait justifier un cas de négligence ou de mauvaise prise en charge. La vie humaine est trop précieuse pour servir de monnaie d'échange dans ce genre de conflits. Prenant manifestement conscience des difficultés de la corporation, l'Etat a mis le paquet pour en améliorer les conditions de travail. Une enveloppe de 160 milliards de dinars vient d'être dégagée pour rénover et équiper pas moins de 320 hôpitaux à travers le pays. Cela fait beaucoup d'argent qui doit, d'abord, profiter aux malades. On enregistre aussi un début de prise en charge des problèmes salariaux des fonctionnaires de la santé. Les sages-femmes et les paramédicaux n'ont pas manqué, à ce sujet, de saluer les avantages qui leur sont attribués dans leurs nouveaux statuts respectifs. Les praticiens généralistes et les médecins spécialistes ne tarderont pas à obtenir aussi «gain de cause». Le patient, quant à lui, attend toujours les bons changements. Les personnels des hôpitaux publics doivent absolument faire des efforts supplémentaires pour être à la hauteur de la délicate mission qui est la leur. A priori rien ne les dispense de s'acquitter convenablement de leur tâche comme le font si bien leurs confrères exerçant dans le secteur privé. Les conseils de l'Ordre, les syndicats et les autres représentations de la corporation ont un grand rôle à jouer dans ce registre. L'hôpital public doit faire aussi de la qualité, puisqu'il en a les moyens. Pour cela, les praticiens doivent faire la différence entre l'essentiel et l'accessoire. K. A.