InfoSoir : Comment peut-on garantir aux handicapés leurs droits prévus par le droit national et international ?» Me Hocine Zahouane : En vérité, il n'y a aucun droit réellement invoqué pour la prise en charge des citoyens, en particulier les personnes handicapées. C'est un drame et cela est dû à la carence générale, au délaissement de la santé publique. Il y a des établissements publics qui accueillent des malades, bien sûr, mais on peut dire que les infrastructures adaptées au niveau des établissements hospitaliers font défaut. On a voulu cultiver l'illusion que la loi du marché devait régner dans le domaine de la santé, on a délaissé le secteur public pour faire naître partout des établissements privés qui sont inscrits dans une logique absolument mercantile et qui vont jusqu'aux trafics les plus sordides. Alors que la santé est un domaine sacré qui doit échapper aux règles de trafic et de marché. Aujourd'hui, nous sommes réduits à cela. Les lois suffisent-elles réellement à la protection des droits de la personne handicapée ? ll La personne handicapée est livrée au hasard du destin. Le droit à la santé aujourd'hui est garanti dans la forme, mais pas dans les faits. Pour preuve, le délabrement du secteur. Par exemple, regardez la grève observée par les hospitalo-universitaires, les docents, les professeurs et les maîtres assistants, ils se disent tous sinistrés. Comment peuvent-ils donc assurer des prestations de service de qualité aux citoyens en général et aux personnes handicapées en particulier ? Nous sommes ici dans un enjeu stratégique, mais malheureusement, l'Algérie a reculé à ce niveau-là. N'oubliez pas ce que nous venons de traverser, l'intervention du FMI a laissé se détériorer les structures de la santé publique. Nous sommes l'un des rares pays à avoir promu la gratuité des soins médicaux. Il n'y a pas de loi nette et précise pour qu'un handicapé puisse faire valoir son droit devant la justice. Ce sont des vœux pieux sans plus. Je ne vois pas un handicapé aller assigner l'administration publique, sa requête ne sera pas recevable. Qu'en est-il du droit au revenu minimum et au logement ? ll Il faut dire qu'il n'y a pas de quotas pour les personnes handicapées. Nous recevons chaque jour des milliers de demandes de logement et de plaintes pour défaut de soins. Les auteurs sont issus de différentes wilayas du pays. Désespérée, une mère de Sidi Bel Abbes qui a déposé depuis des années un dossier au niveau de la wilaya, n'arrête pas de nous appeler espérant que la Laddh pourrait avoir un pouvoir ou un poids pour régler son cas. L'Algérie est loin d'assurer aux handicapés un logement social adapté. Primo, cette catégorie est noyée dans la demande de logement social des citoyens. Secundo, lorsqu'il y a des disponibilités de quotas, c'est vite accaparé par des bénéficiaires qui ont plus d'aptitudes à faire des interventions pour pouvoir faire valoir ce droit. Au niveau de la justice sociale, à la Laddh, nous estimons que chaque Algérien doit être au préalable assuré d'un standard social minimum pour se prévaloir de sa citoyenneté. Est-il possible d'augmenter la pension au seuil du Snmg ? ll En admettant que la pension d'une personne handicapée soit égale au Snmg, est-ce la solution ? Comment donc peut-on concevoir qu'une personne handicapée pourrait vivre avec cette misère face à l'érosion du pouvoir d'achat et donc à la cherté de la vie ? En plus, il ne faut pas nier que la situation économique du pays ne le permet pas. *Président de la Ligue algérienne de la défense des droits de l'homme (Laddh)