Durant les années 1970 et 1980, la petite ville de Djemila (une cinquantaine de kilomètres au nord-est du chef-lieu de la wilaya de Sétif) fut une destination de choix pour les excursions scolaires. Située en bordure des régions de Basse Kabylie et de Constantine, l'agglomération abrite les vestiges de l'antique Cuicul, cité romaine classée patrimoine mondial par l'Unesco en 1981. Les écoliers des régions centre et est du pays, à cette époque, gardent certainement en mémoire ce beau cliché fait de colonnes de pierres sculptées, éparpillées sur un joli versant de montagne verdoyant. On y va, naturellement, au printemps avant la clôture de l'année scolaire. Djemila était, alors, synonyme de nos joies enfantines. Les seules qui restent gravées, finalement. A partir des années 1990, les voyages encadrés des écoliers ont été suspendus par mesure de sécurité. La barbarie terroriste avait investi cette belle contrée montagneuse pour en faire son repaire et une zone de repli après l'accomplissement de ses crimes. Les populations hospitalières de l'antique Cuicul ont ainsi été privées, plus d'une décennie durant, de ce chahut d'enfants qui faisait le charme de ces hauts lieux d'histoire et de culture. Un climat de peur et de panique a étalé son hideuse ombre noire sur ce tableau plein de poésie et de romantisme. Ces années-là ont été évidemment des plus éprouvantes pour les simples gens de Djemila. Avec le retour de la paix, l'activité a progressivement redémarré. L'agriculture, l'artisanat, le commerce, les infrastructures de base et les services publics ont connu depuis une réelle dynamique, et les petits excursionnistes sont de nouveau au rendez-vous. Il y a même des touristes occasionnels qui viennent découvrir ce merveilleux site qui fait toujours la fierté de toute la région. L'institutionnalisation du festival de Djemila, dédié à la musique et à la chanson arabes, a été un facteur déterminant dans ce juste retour des choses à leur cours ordinaire. «Depuis 2005, notre localité a bénéficié de nombreux projets de développement. A commencer par l'élargissement et la réfection du chemin de wilaya qui nous relie, sur plus d'une vingtaine de kilomètres, à la voie express Sétif-Constantine. Il y a eu aussi l'alimentation de la commune en gaz de ville et l'amélioration du réseau public d'alimentation en eau potable», témoigne Lyes, un artisan plâtrier qui propose des statuettes et des modèles réduits de l'arc de Caracalla ou d'Aïn El Fouara à l'entrée de la cité romaine. «Il faut ajouter aussi la réception de l'auberge de jeunesse, l'une des meilleures structures du genre à l'échelle nationale. Une salle omnisports, dûment équipée, a été également achevée au profit du mouvement sportif de la localité. Un projet de piscine est en cours de réalisation. Le musée de Djemila, qui date de l'époque coloniale, a aussi bénéficié d'un programme de réfection et d'embellissement», renchérit Samir, un sympathique employé de la wilaya, en soulignant que la visite du président de la République, en août 2007, a été «généreuse» pour les villageois qui se sont solidement accrochés à leurs terres aux moments les plus difficiles. Il convient de souligner que cette manifestation culturelle, qui prend de l'envergure d'année en année, a aussi contribué à faire connaître et à promouvoir ce trésor archéologique qu'est l'antique citadelle romaine. Tous les artistes étrangers, qui ont fait le détour depuis la première édition, n'ont pu retenir leur émerveillement devant tant de beauté. Sans exception aucune, les stars arabes, qu'elles soient du Moyen-Orient ou du Maghreb, se sont inclinées devant ce trésor unique qui reste relativement bien conservé.