De notre correspondant à Constantine A. Lemili Le ministre de la Solidarité nationale était, jeudi dernier, à Constantine où il assistait à la commémoration de la Journée de l'étudiant organisée par l'Union médicale algérienne (UMA) en collaboration avec le Comité pour la réflexion et l'initiative (CRI), pour la circonstance étrangement sorti d'une longue hibernation. La rencontre avait pour thème «les intellectuels et la guerre d'Algérie», certes un sujet des plus intéressants sauf qu'il aura été éclipsé par la tentative de suicide par immolation d'un agent du Centre national de formation des personnels pour les handicapés (CNFPH), Kamel Messahel, fonctionnaire licencié pour une sombre affaire de vol et blanchi ensuite par la justice, selon ses propos et les témoignages de ses collègues présents sur place qui assistaient impuissants à la scène et dont certains ne retenaient pas leurs larmes. Coïncidence ou heureux hasard, ce ne sont pas les psychologues qui manquaient jeudi dernier sur place quoique aucun d'eux n'arrivât à persuader le désespéré de descendre du château d'eau où il s'était hissé, muni d'une bouteille de deux litres d'essence dont il avait commencé à s'asperger pour haranguer ensuite les quelques personnes présentes. En masse, éléments des services de sécurité, Protection civile, pratiquement désarmés devant une telle situation n'avaient d'espoir qu'en le retour à la raison de l'ancien fonctionnaire qui toutefois sans désemparer exigeait la seule présence du ministre, menaçant de passer à l'acte si tel n'était pas le cas. Reconnaissant un de nos confrères au fait de son dossier, K. Messahel n'acceptera comme interlocuteur que ce dernier qu'il suppliera de prendre attache avec le ministre pour le mettre au courant de ce qui se passait dehors. Ce qui sera fait, le ministre de la Solidarité nationale acceptant de prendre langue avec le fonctionnaire désespéré auquel il posera, toutefois d'abord comme condition qu'il descende de l'ouvrage où il se trouvait avant d'accepter de s'entretenir avec lui de son cas. Retrouvant le sol et se dirigeant vers D. Ould Abbas, K. Messahel ne manquera pas, dans un ultime geste de dissuasion contre toute éventuelle tentative des corps de sécurité, de déverser le reste de la bouteille d'essence sur son costume, incitant à un mouvement de recul l'ensemble du cortège. Néanmoins, face au calme du ministre visiblement touché par la détresse de son vis-à-vis, il changera d'attitude et condescendra enfin à lui livrer toute son histoire. Djamel Ould Abbes soulignera tout simplement : «Mon enfant, nous sommes le 20 mai, donnez-moi jusqu'au 30, le temps que je prenne connaissance de votre dossier et je peux vous assurer que vous serez rétabli dans vos droits si tant est que vous en ayez été spolié.» Apprenant ensuite que le désespéré avait usé de toutes les voies de recours mais en vain, le ministre interpellera l'ensemble des responsables de la wilaya qui l'entouraient et plus particulièrement le chef d'établissement. le ministre exigera que lui soit remis sur place le dossier réuni pour la circonstance. Père de cinq enfants, Kamel Messahel avait été radié des effectifs il y a trois ans après bien des sanctions administratives, dont la rétrogradation. «Juste pour me brimer et diminuer ma conviction à lutter, en ma qualité de syndicaliste, contre la gabegie dont était victime l'établissement et les humiliations dont étaient tout aussi victimes les travailleurs. J'ai refusé tous les compromis parce que j'ai toujours refusé de manger de ce pain-là», n'avait-il cessé de marteler du haut du château d'eau.