Jay-Jay Okocha et Kalusha Bwalya avaient à peine débuté leur carrière qu'on les présentait comme deux des espoirs les plus doués d'un continent où le football est vécu comme une religion. Okocha faisait partie des milieux de terrain les plus créatifs des années 90 à l'échelle mondiale. Avec l'équipe du Nigeria, il a participé à trois phases finales de la Coupe du monde et a gagné la médaille d'or olympique. Bwalya, lui, compte 100 sélections et 50 buts sous le maillot de la Zambie et a été élu footballeur africain de l'année en 1988. Il n'a cependant jamais disputé la phase finale du grand rendez-vous mondial. On se souvient qu'un avion transportant les Chipolopolo vers le Sénégal s'était écrasé, décimant ainsi une sélection alors toute proche d'une qualification historique pour le Mondial 1994 aux Etats-Unis. Aujourd'hui encore, les analyses de ces deux légendes vivantes sont très écoutées à travers toute l'Afrique. Fifa.com leur a demandé d'analyser le niveau des six sélections qui représenteront le continent à la Coupe du monde 2010. Okocha (Nigeria) : «Le Cameroun et l'Algérie sont capables de créer la surprise» «Je pense que les équipes africaines ont toutes les chances d'aller loin dans cette compétition, même si aucune d'elles n'aura la tâche facile. Soyons réalistes, les Africains ont tous hérité d'un tirage compliqué. Terminer parmi les deux premiers de leurs groupes serait un exploit. Prenez mon pays, le Nigeria, il a pour adversaires une très grande équipe, l'Argentine, et la Grèce, ancienne championne d'Europe. Sans compter que nous n'avons pas très bien joué en Angola, lors de la Coupe d'Afrique des nations (CAN). Malgré notre troisième place, nous avons manqué de régularité et d'équilibre. Mais je ne vais pas me montrer trop sévère. Notre équipe est bonne, nous avons des joueurs de qualité, et il faut aussi laisser à Lars Lagerback, le nouveau sélectionneur, le temps de lui donner une nouvelle identité.» «La Côte d'Ivoire était très attendue à la CAN, mais elle a beaucoup déçu. Il lui a clairement manqué quelque chose. Elle devra afficher beaucoup plus de cohésion, si elle veut réussir une bonne Coupe du monde et battre des équipes aussi fortes que le Brésil ou le Portugal. Les Éléphants ont dans leurs rangs des joueurs qui comptent parmi les meilleurs d'Afrique.» «Il y a aussi des sélections de qualité, comme le Cameroun et l'Algérie, qui sont capables de créer la surprise. Les Camerounais ont manqué de régularité ces derniers temps. Dans un bon jour, ils peuvent battre n'importe quelle équipe, mais on peut s'interroger sur leur capacité à enchaîner les exploits. Les Algériens ont bien joué en Angola, mais je n'ai pas été complètement convaincu. Leur grande force, c'est la solidarité qu'ils montrent d'un bout à l'autre du match. Ils se battent les uns pour les autres. C'est une bonne chose.» «Il faudra aussi surveiller l'Afrique du Sud. C'est toujours délicat de jouer contre le pays organisateur. J'ai observé les Sud-Africains pendant la Coupe des Confédérations, l'an dernier, et ils m'avaient fait forte impression. On cerne un peu mieux leur potentiel face aux grandes équipes. Il y a dans cette sélection de bons joueurs, comme Benni McCarthy et Steven Pienaar, un des meilleurs joueurs du championnat anglais. Bref, il faudra compter avec eux». Bwalya (Zambie) : «Nous sommes mieux préparés» «Les sélections africaines vont aborder ce tournoi dans de meilleures conditions que les précédentes. Nous sommes mieux préparés, nous avons gagné en confiance et en expérience et je suis sûr, qu'au plus haut niveau, nos équipes croient davantage en elles-mêmes. Ces deux dernières saisons, des joueurs africains, comme Didier Drogba et Samuel Eto'o, pour n'en citer que quelques-uns, ont joué les premiers rôles dans leurs clubs respectifs. On prend les nations africaines beaucoup plus au sérieux. Les joueurs ont mûri et croient beaucoup plus en eux. Pour réussir, c'est capital. A mon avis, cela s'explique en grande partie par la place qu'occupent aujourd'hui les joueurs africains dans le football de très haut niveau, avec tout ce qu'ils lui apportent. Désormais, tout le monde les trouve aussi bons que les joueurs européens.» «Pour moi, le Ghana est le plus régulier et c'est peut-être le mieux placé pour faire quelque chose. La Côte d'Ivoire a aussi son mot à dire au niveau mondial, avec plusieurs joueurs qui évoluent dans les plus grands clubs d'Europe. En 2006, déjà, face à des adversaires redoutables, les Eléphants avaient très bien résisté. Si les résultats obtenus à l'époque n'ont pas été à la hauteur de leurs prestations, cela fait aussi partie de l'apprentissage. Je crois qu'ils ont tiré les leçons de cette expérience.» «L'équipe sud-africaine n'est pas mauvaise, avec de bonnes individualités, et elle l'a prouvé lors de la dernière Coupe des Confédérations. Mais, à mon avis, une fois cette épreuve terminée, elle aurait dû jouer un peu plus souvent contre d'autres sélections africaines. L'Afrique du Sud ne s'est pas qualifiée pour la CAN 2010 et cela risque de lui coûter cher. Il faut jouer des matches de haut niveau avant un tournoi aussi important. Les matches amicaux n'offrent pas la même intensité.» «J'ai été impressionné par d'autres équipes comme le Cameroun, une formation de qualité, très solide. On a dit beaucoup de choses sur les Lions indomptables mais ils restent très compétitifs. Je pense que confier le brassard de capitaine à Samuel Eto'o a été une excellente décision. C'est un attaquant hors norme avec beaucoup d'influence dans le vestiaire. Les Nigérians aussi ont beaucoup d'arguments à faire valoir, même si les résultats n'ont pas toujours suivi. Entre nous, vous n'avez pas idée de la pression qui pèse sur les épaules d'un joueur qui porte le maillot du Nigeria. Elle est énorme. Mais je compte sur les Super Eagles pour faire un bon tournoi.»