Ce qui devait être une opération d'aide humanitaire à une population isolée s'est transformé en une tuerie, après le raid israélien contre la flottille internationale. C'est un acte de piraterie sanglant commis par un Etat voyou qui a provoqué l'indignation de plusieurs Etats européens, mais révélant encore une fois la passivité des pays arabes. L'attitude amorphe de ces derniers est scandaleuse. Fidèles à leur attitude habituelle, les dirigeants arabes ont observé le silence et ont fait l'impasse sur l'attentat prémédité et commis par Israël contre des militants humanitaires pacifistes. Une attitude indigne qui pourrait laisser perplexe si on n'était pas accoutumé à ce qui pourrait s'apparenter à de la lâcheté. On ne peut parler de frilosité quand il s'agit de se taire devant la barbarie sioniste qui étouffe une population jusqu'à l'asphyxie et lance un raid meurtrier sur un convoi d'humanistes. Alors que la colère montait hier dans la rue arabe, après l'annonce de la fusillade qui a fait plusieurs morts parmi les passagers d'un des navires de la flottille, et que les populations interpellaient leurs gouvernants pour une riposte, du moins une réaction, c'est le flegme légendaire de leurs dirigeants qui leur répondait, avant que des déclarations commencent à tomber en fin d'après-midi. Des déclarations officielles pusillanimes et sans grande portée, précédant la tenue, aujourd'hui au Caire, d'une réunion extraordinaire de la Ligue arabe réclamée «en urgence» par le président palestinien. Le Qatar a été le premier à réagir par la voix de son émir, cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani, qui a critiqué indirectement ses homologues arabes en soulignant que le raid israélien «adresse aussi un message aux pays arabes, que ces hommes épris de liberté placent devant leurs responsabilités». Tout en dénonçant l'agression israélienne qu'il a qualifiée d'acte de piraterie, il a appelé à briser le blocus imposé depuis plus de trois ans à la bande de Ghaza, affirmant que «les crimes perpétrés aujourd'hui [hier, ndlr] nous rappellent, à nous tous, que le blocus est injuste». Alors que le Koweït a, de son côté, ordonné une réunion extraordinaire de son gouvernement, l'Egypte a réagi, dans une déclaration écrite publiée au Caire (en l'absence du président égyptien qui assistait à Nice au sommet France-Afrique) de manière ambiguë en dénonçant «l'usage excessif et injustifié de la force» par Israël, et, sans d'ailleurs chercher à cacher sa position, réaffirmé que «la réconciliation palestinienne est la voie vers la levée du blocus et la fin de la souffrance humanitaire des habitants» de la bande de Ghaza. Le Liban a, lui aussi, dénoncé «l'attaque israélienne contre le convoi d'aide [qui] représente une étape dangereuse et folle qui va exacerber les tensions dans la région», ainsi que la Jordanie, dont 20 ressortissants étaient à bord de la flottille, qui a condamné «l'ignoble crime» et convoqué le chargé d'affaires de l'ambassade israélienne à Amman «tout en appelant le gouvernement israélien à garantir la sécurité des Jordaniens à bord des bateaux». Au milieu de ces tergiversations, la rue est investie par les populations des pays arabes qui manifestent leur indignation contre la barbarie de l'entité sioniste. R. M.