La réprobation internationale contre Israël a atteint un seuil jamais égalé à la suite du massacre d'humanitaires dans les eaux internationales au large de Gaza. Même les Etats-Unis, le plus proche allié de l'Etat hébreu, mesurent leurs réactions pour éviter de se mettre à dos la communauté internationale. Le raid meurtrier de la marine israélienne contre une flottille humanitaire, au large de Gaza, a un effet calamiteux pour l'image d'Israël, accroît son isolement diplomatique et porte un nouveau coup à un processus de paix qui peinait à démarrer, selon des analystes. “Nous sommes en train de devenir les pestiférés du monde entier avec cette opération”, a déploré à la radio le plus célèbre intellectuel israélien, Amos Oz. “Ce n'est pas seulement une question d'image, c'est un désastre moral pour Israël. Ce blocus imposé à Gaza après l'enlèvement de Gilad Shalit n'a absolument servi à rien”, a jugé l'écrivain de gauche. “On ne peut pas infliger un siège à un million et demi de Gazaouis parce qu'un groupe a enlevé un soldat israélien”, a insisté Amos Oz. “Du point de vue israélien, c'est le pire scénario qui s'est produit”, a estimé de son côté l'ancien chargé d'affaires israélien à Ankara, Alon Liel. Un ancien diplomate n'exclut pas une “rupture ou du moins une suspension des relations diplomatiques avec Ankara qui, avant même l'opération, s'étaient considérablement dégradées”. En effet, le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a affirmé qu'Israël pourrait “perdre” l'amitié de son pays, en raison de son opération militaire sanglante contre une flottille humanitaire pro-palestinienne. Erdogan, qui ne tarit pas de critiques contre l'Etat hébreu depuis l'assaut donné lundi par un commando israélien sur les navires transportant des centaines de militants pro-palestiniens et de l'aide à destination de Gaza, a parlé mardi soir avec le président américain Barack Obama au téléphone de cet incident qui a provoqué une crise inédite dans les relations turco-israéliennes. “Israël est menacé de perdre son seul ami dans la région qui a le plus contribué à la paix régionale”, a dit Erdogan au président américain, selon ses services de presse. Il a également affirmé qu'Israël occupera au Proche-Orient une place qui “dépendra de ses actions futures”, souligne le texte. Par ailleurs, le ministère turc de la Justice réfléchit à l'opportunité de lancer des poursuites judiciaires contre Israël après le raid qui a fait neuf morts, dont quatre Turcs. Le ministère doit aussi se prononcer sur la question de savoir si une enquête sera lancée par les procureurs turcs. Ainsi, les relations entre la Turquie et Israël sont au plus bas après le raid. Ankara a dénoncé un acte de “terrorisme d'Etat” et rappelé son ambassadeur en Israël. Le gouvernement pourrait décider notamment d'exclure les firmes israéliennes des appels d'offres publics, affirment les télévisions. Depuis la signature, en 1996, d'un accord de coopération militaire qui avait scellé le partenariat “stratégique” turco-israélien, les entreprises israéliennes ont décroché plusieurs contrats lucratifs d'équipement de l'armée turque. Les échanges commerciaux bilatéraux ont atteint 2,6 milliards de dollars en 2009. Israël a, par ailleurs, décidé de rapatrier les familles de son personnel diplomatique à Ankara pour des raisons de sécurité. Des manifestations sont organisées depuis lundi devant les missions diplomatiques israéliennes en Turquie.