Moment fort et inaugural d'un événement planétaire, la cérémonie d'ouverture de la Coupe du monde de football a été brève, sobre mais forte en symbolique. Elle était essentiellement dédiée au continent noir, auquel échoit le privilège d'organiser pour la première fois de son histoire cette prestigieuse compétition concernant le sport le plus populaire du globe. Les couleurs, les intonations et les vibrations africaines ont été mises au premier plan de cette cérémonie qui aura duré moins d'une heure mais qui se voulait avant tout un hommage à cette Afrique multiculturelle, multiethnique et qui regorge de ressources humaines et matérielles inépuisables. Pour la première fois de son histoire, l'Afrique est associée à l'organisation d'un Mondial de football qui avait jusque-là échu à tous les autres continents et saisit ainsi l'opportunité de réparer une «injustice historique», comme aiment à le relever des observateurs avertis du ballon rond, en ce sens que le continent noir a toujours été le principal pourvoyeur en talents qui évoluent dans les clubs les plus convoités de la discipline footballistique. Aussi ce Mondial qui se déroule enfin sur le sol africain s'apparente-t-il à un hommage à tous les virtuoses du ballon rond qu'a vu naître ce continent si cher à Mandela, à Senghor, à Césaire… A tous les illustres intellectuels qui ont été les plus grands hérauts d'une image plus positive de ce continent appauvri par –et pour- ses multiples richesses. Un continent qui résume toutes les contradictions de détresse et d'espérance, de renoncements et de défis. Et même si le leader charismatique Nelson Mandela a été empêché par un drame familial de prendre part à cette cérémonie, suivie dans les quatre coins du monde, son «esprit est présent au Soccer City», spécifiquement érigé pour la circonstance à l'entrée de la mythique Soweto, dans la banlieue de Johannesburg, pour reprendre la déclaration du président de la FIFA, Joseph Blatter. Tout au long de la cérémonie, les drapeaux des six sélections nationales qui représentent le continent noir ont été mis en évidence : ceux de l'Afrique du Sud côtoyant celui de l'Algérie, ceux de la Côte d'Ivoire, du Cameroun, du Ghana et, enfin, du Nigeria. Propulsé aux cimes de l'universalité, le roi du raï, Khaled, a prolongé les instants de gloire de l'Algérie : drapé dans l'emblème national et entonnant l'un de ses tubes à succès Didi, l'ambassadeur de la culture algérienne à travers le monde a rappelé à celui-ci l'entrée en lice de notre pays dans cette compétition, après une absence de près d'un quart de siècle. Un retour loin d'être passé inaperçu et qui a été commenté de long en large par plusieurs médias étrangers au moment où d'autres ont choisi sciemment d'en minimiser l'impact. Pour le pays hôte, l'Afrique du Sud, cette édition qu'elle rêvait d'endosser représente un défi majeur et un enjeu économique certain. Plus que cela, c'est un enjeu politique certain pour un pays qui aspire à asseoir définitivement une réconciliation entre Blancs et Noirs. Une nation «arc-en-ciel», comme l'a idéalisée Mandela, et qui deviendrait ainsi la locomotive de développement de tous les peuples d'Afrique. Le rêve de Mandela est loin d'être impossible et utopique : il est d'autant plus réalisable que son pays en a les possibilités comme l'atteste le niveau de prospérité atteint jusque-là. Avec les entrées en devises et les postes d'emplois que ce Mondial est susceptible de générer, les dirigeants sud-africains aspirent à juguler les fléaux de pauvreté et de chômage qui gangrènent de larges pans de la société. Le pays de Mandela doit réussir impérativement cette édition, sur tous les plans. Car il y va aussi de l'image de marque d'un pays miné par une criminalité qui ralentit toutes les politiques de croissance socio-économique. A la faveur de ce Mondial, le pays natal de Mandela sera, un mois durant, le centre du monde. Hier, grâce au football et depuis Johannesburg, c'est toute l'Afrique qui était au cœur du monde. Et elle était dans le cœur de tout le monde. M. C.