Photo : S. Zoheir Par Youcef Salami C'est adopté, le démantèlement tarifaire progressif, prévu dans l'accord d'association Algérie-UE, sera «révisé», une décision prise, le 15 juin dernier à Luxembourg, au terme de la cinquième réunion du conseil d'association Algérie-Union européenne. Cela veut dire que le calendrier de départ (2005-2017) est réaménagé, repoussé. Les chargés du commerce extérieur poussent un «ouf» de soulagement. L'économie algérienne se fait ainsi accorder une période d'adaptation supplémentaire, afin de pouvoir se mettre à niveau. Si l'Algérie a demandé que soit revu le processus de suppression des barrières douanières, c'est qu'elle a perdu plus de recettes (2,5 milliards de dollars) qu'elle n'en a engrangées, après cinq années de mise en œuvre dudit accord, un constat tiré de l'évaluation que le conseil d'association fait chaque année. Reste à savoir cependant si l'UE va accepter un calendrier aussi flexible, aussi étalé que le souhaite la partie algérienne. La démarche paraît, pour l'instant, vague. «On n'a pas fixé de date, mais lorsque nous serons prêts nous prendrons de nouveaux contacts [...]. Nous n'allons pas perdre de temps, nous allons faire en sorte que le plus rapidement possible l'UE soit saisie d'une proposition opérationnelle de l'Algérie», a souligné le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, à l'issue de cette cinquième réunion. Et, de préciser que l'Algérie «fera en sorte que dès qu'elle sera saisie par l'UE, le comité d'orientation prévu par l'AA se réunira à son tour et que très rapidement nous aurons à conclure un accord sur le nouveau programme de démantèlement ». Selon lui, «au cas où les deux parties ne parviendrait pas à un accord sur la proposition algérienne, l'application stricte des dispositions de l'accord d'association sera automatique durant une année encore». Pendant ce temps, l Algérie «continuera à trouver des solutions durables», ajoutera le ministre. Elle doit le faire au plus vite, parce que le manque à gagner risque de prendre des proportions alarmantes. Les Européens, eux, ne se pressent pas, car l'accord d'association, tel qu'il est mis en application, ne les gêne pas. Ils disent même qu'il a permis de développer la coopération avec l'Algérie. Miguel Moratinos, présent à cette 5ème réunion du conseil d'association, a qualifié de «très positive» la coopération entre l'Algérie et l'Union européenne durant les cinq dernières années. Et, de détailler : «L'évaluation que fait l'Union européenne sur la coopération bilatérale est une évaluation d'années positives, et dans les rapports entre l'Algérie et L'UE, s'il y a des préoccupations ou des questions à traiter c'est parce qu'on avance et non pas parce que l'on régresse, et on a plus d'ambitions et d'objectifs plus importants que nous voulons mettre ensemble.» Ce que ne dit pas le ministre Espagnol dont le pays assure la présidence tournante de l'Union européenne, c'est que l'accord en question n'a pas permis aux entreprises algériennes d'accéder au marché européen pour y placer leurs produits, et que celles-ci n'ont pas bénéficié d'aides pour se mettre à niveau. Les programmes MEDA qui leur étaient destinés demeuraient dérisoires par comparaison aux soutiens financiers accordés par l'UE à des pays de l'Europe de l'Est. De plus, en dehors du commercial et de l'économique, cet accord n'est toujours pas mis à profit pour régler la question de la circulation des personnes, une problématique que la partie algérienne souhaite associer aujourd'hui aux négociations relatives à l'accord stratégique sur l'énergie toujours en discussion entre Algériens et Européens. L'Algérie a voulu cet accord d'association, et elle l'a obtenu. Sauf qu'elle l'a négocié dans une conjoncture qui lui était défavorable. Le processus des pourparlers a été d'ailleurs interrompu à plusieurs reprises, en raison de la conjoncture sécuritaire ; au fort de la crise, on s'en souvient, il est même des pays membres de l'UE qui avaient tourné le dos au marché algérien. Un des aspects positifs cependant de l'accord, ce sont peut-être, les mesures prises par les pouvoirs publics, en vue de lutter contre la corruption, entre autres. Respectueux de ses engagements, notre pays s'est conformé à ce qu'il a négocié dans l'accord d'association, dont l'article 91 prévoit la prise de «mesures efficaces et concrètes contre toutes les formes de corruption, pots-de-vin et pratiques illicites de toute nature dans les transactions commerciales internationales commis par des particuliers ou des personnes morales». Les transactions énoncées dans cet article peuvent aller d'une opération commerciale classique à valeur marchande moyenne à des marchés publics engageant de gros contrats. De telles dispositions ont valeur d'instruments dissuasifs. Pas plus.