L'Algérie et l'Union européenne sont convenues, hier, à Luxembourg, de réviser le calendrier du démantèlement tarifaire prévu par l'accord d'association (AA) UE-Algérie, conclu en 2002, et entré en vigueur en septembre 2005. Toutefois, aucun calendrier n'a été fixé pour la mise en œuvre de cet accord. La décision a été annoncée par le ministre des Affaires étrangères, Mourad Medelci, et son homologue espagnol, Miguel Angel Moratinos, dont le pays assure actuellement la présidence tournante de l'UE, lors d'une conférence de presse qui a sanctionné la 5ème réunion du conseil d'association, qui évalue chaque année la mise en œuvre de l'accord d'association. «On n'a pas fixé de date, mais lorsque nous serons prêts nous prendrons de nouveaux contacts [...] nous n'allons pas perdre de temps, nous allons faire en sorte que le plus rapidement possible l'UE soit saisie d'une proposition opérationnelle de l'Algérie», a déclaré à l'APS M. Medelci. La partie algérienne «fera en sorte que dès l'instant où elle est saisie par l'UE, le comité d'orientation prévu par l'AA se réunisse à son tour et que très rapidement nous ayons donc à conclure un accord sur le nouveau programme de démantèlement», a ajouté le ministre. «Au cas où les deux parties ne parviennent pas à un accord sur la proposition algérienne, l'application stricte des dispositions de l'AA sera automatique durant une année encore. Pendant ce temps, l'Algérie continuera à chercher des solutions plus durables», expliqué M. Medelci. Interrogé sur les difficultés d'accès des entreprises algériennes au marché européen, M. Medelci a répondu : «Aujourd'hui, les deux partenaires ont évoqué toutes les questions, mais la délégation algérienne a surtout mis l'accent sur la question des investissements.» La révision du calendrier du démantèlement tarifaire ainsi que des autres dispositions contenues dans l'AA s'explique et se défend, car l'Algérie et l'économie algérienne «ont changé». C'est là de nouvelles donnes qui imposent l'adaptation d'un certain nombre de programmes inscrits dans le cadre de l'accord d'association liant l'Algérie aux Vingt-sept. Dans une allocution prononcée à l'ouverture de cette 5ème réunion du conseil d'association Algérie-UE, M. Medelci a d'ailleurs énuméré les raisons objectives qui justifient cette demande de révision du calendrier du démantèlement tarifaire. Il a reconnu que les relations entre l'UE et l'Algérie ont gagné en «intensité» à la faveur de cet accord d'association. Néanmoins, a-t-il expliqué aux représentants des Etats membres de l'UE, cet accord a ouvert de «nouvelles perspectives», mais a induit également des «défis à relever». «Mon pays, en signant l'accord d'association, voulait développer une coopération globale qui couvrirait tous ses volets : politique, économique et commercial, culturel, social et humain. Or, jusqu'à maintenant, nous relevons clairement que le volet commercial a reçu une attention particulière par rapport aux autres», a-t-il constaté. Le démantèlement tarifaire progressif, mis en œuvre depuis 2005, pèse «lourdement» sur les recettes budgétaires du pays, et n'encourage pas «la création» et «le développement» de certaines industries locales «naissantes» ou en «développement». C'est une des imperfections que les négociateurs algériens ont essayé de mettre en exergue, en faisant valoir qu'il y a nécessité d'apporter à cet accord des correctifs. Reste à savoir si les Européens sont attentifs aux doléances algériennes. En résumé, les aménagements formulés par l'Algérie se rapportent essentiellement à des aspects «juridiques» et «économiques» en mesure de permettre à notre pays de déployer ses ambitions et ses exigences économiques. Outre le volet économique et commercial, la délégation algérienne au Luxembourg a évoqué avec les responsables européens des sujets politiques d'intérêt commun, sachant que le dialogue politique «se déroule bien» et «à la satisfaction mutuelle des deux parties» et qu'il «n'y a pas de gros problèmes». A la différence des réunions antérieures du conseil d'association, la rencontre d'hier intervient dans un contexte un peu particulier marqué par une crise financière au niveau des Etats membres de l'UE. L'Algérie devait tirer profit de cette situation et mieux négocier ses relations avec les Vingt-sept. Elle devait mettre à plat toutes les questions en rapport avec l'AA. C'est, en fait, la dépréciation de l'euro qui s'est invitée dans les débats animés par le conseil d'association. Et elle n'était pas sans effets sur la teneur des discussions. Les négociateurs algériens étaient dans une position confortable pour négocier au mieux les clauses de cet accord. Explications : en période de crise, les Etats «se barricadent», se protègent, protègent leurs échanges, en renforçant les barrières douanières. Cette manière de faire, les Européens en usent aujourd'hui et ils ne peuvent pas la contester à l'Algérie. Ce procédé, les négociateurs algériens peuvent le faire valoir. L'accord d'association a été paraphé en 2002, à Valence, Espagne. Aux dires de beaucoup, il a été négocié dans une conjoncture qui n'était pas favorable à l'Algérie. Les pourparlers n'ont pas eu la régularité qui devait être la leur. Elles ont été interrompues à plusieurs reprises, en raison de la crise sécuritaire qui prévalait dans le pays. Il a fallu attendre les années 2000 pour les reprendre. Y. S.