La Guinée était hier dans l'attente des résultats provisoires de la première élection présidentielle libre de l'histoire du pays, dans un climat d'impatience et de suspicion croissantes, la quasi-totalité des partis ayant dénoncé des «irrégularités» et des «fraudes». Sur les 24 candidats -tous civils- trois sont donnés favoris. Il s'agit de deux anciens Premiers ministres du général Lansana Conté (1958-1984) -Cellou Dalein Diallo (Union des forces démocratiques de Guinée, UFDG) et Sidya Touré (Union des forces républicaines, UFR)- et d'un opposant historique à toutes les dictatures depuis 1958, Alpha Condé (Rassemblement pour le peuple de Guinée, RPG). «Nous sommes en train de centraliser les résultats. Selon le code électoral, la CENI doit livrer les premiers résultats dans les 72 heures après le scrutin. A Conakry, la vie semblait hier comme ralentie. Les embouteillages habituels étaient inexistants et de nombreuses échoppes restaient fermées, par crainte d'éventuelles agitations. «Des rumeurs ou informations alarmantes sur les manipulations et des bourrages d'urnes ont créé cette atmosphère de suspicion», a estimé le directeur de publication des hebdomadaires le Démocrate et l'Indépendant, Mamadou Dian Baldé. De l'avis général, la paix et la sérénité avaient prévalu au premier tour de cette élection historique, après un demi-siècle de dictatures. Mais, 20 partis -sur les 24 engagés dans l'élection- ont multiplié les accusations de «fraudes massives», évoquant notamment des «bourrages d'urnes» ici ou là. La commission électorale a, de son côté, réaffirmé qu'«aucun résultat» ne serait manipulé, présentant ces accusations comme des «rumeurs totalement infondées». Un responsable du RPG d'Alpha Condé a accusé les membres de la CENI d'être des «militants inconditionnels d'autres partis» qui «doivent assumer toutes les magouilles qu'ils sont en train de faire». Si la Commission est sous le feu des critiques, chacun des grands partis en accuse aussi d'autres. «Qui va enquêter sur la véracité de ces fraudes ?» s'interrogeait Alpha Touré, membre du conseil national des organisations de la société civile. La Guinée est une république avec comme chef de l'État le président, élu par le peuple pour un mandat de cinq, initialement, puis de 7 ans depuis la modification de la Constitution en 2003. La fonction de président a été occupée par Lansana Conté du 5 avril 1984 au 22 décembre 2008. Depuis l'instauration du multipartisme en avril 1992, une quarantaine de nouveaux partis ont été reconnus. La Constitution a été suspendue en décembre 2008. Il s'agit de la toute première élection présidentielle libre en Guinée depuis l'indépendance de ce pays en 1958.