Photo : S. Zoheir Par Amirouche Yazid Telle une rengaine, la question de l'accueil réservé aux Algériens qui reviennent chez eux pour les vacances d'été est sur toutes les lèvres. Les officiels annoncent, à l'occasion, des mesures spéciales visant à garantir des conditions d'accueil meilleures que celles de la saison écoulée. La tutelle du secteur ne rate pas l'occasion pour annoncer l'installation d'une commission chargée de veiller au bon accueil des Algériens vivant outre-mer. Sur le terrain, les choses se présentent autrement : une simple opération de contrôle risque de coûter cher aux demandeurs. Pas forcément en terme d'argent, mais plutôt en matière de temps et de… nerfs. L'accueil promis devient manifestement un véritable écueil dur à contourner. Les concernés retrouvent leur pays natal avec beaucoup de dépit. Brahim, un jeune médecin, qui revient après trois ans, fait un constat amer. «Nous souffrons chaque année. Ce sont toujours les mêmes problèmes qui se posent au niveau des douanes. Ce n'est pas normal de perdre toute une journée pour de simples formalités. Les douaniers nous font du chantage.», nous dit-il à sa sortie de l'aéroport Houari-Boumediene après un vol Paris-Alger à bord d'un avion de la compagnie Aigle Azur. Un témoignage qui contraste avec le discours pompeux des responsables annonçant des mesures de facilitation sans faille.Théoriquement, les services du secrétariat d'Etat auprès du ministère des Affaires étrangères chargé de la Communauté algérienne établie à l'étranger ont prévu une campagne d'information au profit de ces voyageurs. La finalité de cette opération est de fournir tous les renseignements concernant leur prise en charge, une fois arrivés en Algérie. Mieux : il est également question de distribution de guides au niveau des ports, des aéroports et des points de passage frontaliers. Aucune trace de cela sur le terrain. Les Algériens ayant effectué le déplacement vers l'Afrique du Sud, à l'occasion du Mondial, avaient aussi goûté aux épines de l'administration locale. Après un harassant voyage qui aura duré dix heures, les centaines de supporters sont conviés à une queue devant un guichet étrangement inoccupé. Motif a été ainsi donné à ces derniers d'établir un déroutant comparatif entre le service offert à l'aéroport d'Alger et celui de l'aéroport de Johannesburg qui accueille pourtant des centaines de milliers de visiteurs. Le constat est identique au niveau des gares maritimes du pays. Un responsable au niveau du port de la capitale soutient qu'«un dispositif d'accueil des vacanciers a été mis en place, à la lumière des besoins exprimés par la communauté nationale établie à l'étranger». Le même responsable tient à souligner que «les mesures prises pour faciliter le transit des émigrés tiennent compte des préoccupations exprimées par les ressortissants nationaux établis à l'étranger». Et d'ajouter que «le nombre d'agents chargés de l'accueil et de l'orientation au niveau du port d'Alger a été renforcé et que les moyens de gestion des arrivées modernisés». Ces mesures peinent cependant à se traduire dans la réalité. Ce qui renforce les appréhensions des vacanciers regagnant le pays pour les vacances d'été. Ces derniers se soucient beaucoup plus des conditions d'accueil que des tarifs de transport aérien ou du long trajet. Ils s'interrogent souvent sur le temps que prendraient les procédures et les formalités d'entrée au niveau de l'aéroport international Houari-Boumediene à Alger en ces temps d'intense activité. C'est la rituelle hantise. «Dans la perspective de mettre à l'aise les voyageurs de retour au pays, une série de mesures est prise par les autorités : des espaces réservés à des personnes aux besoins spécifiques ont été aménagés et des écrans géants pour informer les voyageurs installés. En plus de cela, la police des frontières a procédé à l'augmentation du nombre de guichets, afin d'accélérer les procédures de contrôle des voyageurs. Résultat : 12 guichets sont réservés aux arrivées et 20 autres aux départs», explique un agent de la plus grande enceinte aéroportuaire du pays. Les mesures prises, même si elles sont dictées par l'exigence de la saison estivale, visent manifestement à éviter aux voyageurs les désagréments des longues files d'attente. L'appréciation est loin d'être partagée parmi les voyageurs au niveau de l'aéroport. Des vacanciers préfèrent ne pas se rappeler toutes les péripéties vécues depuis le départ. L'essentiel, pour eux, étant de fouler le sol algérien et de retrouver les leurs. «Nous avons souffert avant de se retrouver ici. L'avion avait mis du retard pour décoller à l'aéroport de Rome. Nous étions obligés d'attendre environ une heure. A l'arrivée, nous n'espérions pas mieux, dans la mesure où le plus dur était consommé», déclare un quinquagénaire entouré des membres de sa famille établie à Amiens. Par contre, d'autres personnes sont plus exigeantes à ce sujet, elles souhaitent être servies en fonction de l'argent qu'elles déboursent. «Voyager, ce n'est pas seulement une affaire de déplacement d'une place à une autre. Les autorités ont la responsabilité de rendre commodes et agréables toutes les conditions du voyage, et ce, à chacune des étapes. Il ne suffit pas de faire des efforts pour améliorer la situation dans un service et laisser les choses se dégrader dans un autre», fera remarquer un jeune Jijelien de retour de Lyon. Pour les responsables des services des Douanes, on souligne la mobilisation de plusieurs agents dans l'objectif «de mettre à l'aise tous les passagers». Un agent d'enregistrement fait savoir que le flux des passagers transitant par l'aéroport d'Alger varie entre 8 000 et 10 000 personnes par jour. Dans une récente déclaration, le président-directeur général des douanes a soutenu que «tout a été mis en place pour faciliter les conditions d'enregistrement et d'embarquement des passagers». Et d'ajouter que le nombre de douaniers ainsi que les policiers mobilisés au niveau de l'aéroport pour assurer la sécurité des passagers et être à leur service est largement suffisant. Un autre son de cloche néanmoins à un autre niveau responsabilité. Au ministère de la Solidarité nationale et de la communauté algérienne établie à l'étranger en l'occurrence, qui a évoqué la mise en œuvre du programme d'action pour l'accueil des émigrés, pendant la saison estivale, on fait des conditions d'accueil de ces derniers «une priorité». Un responsable du département de la Solidarité releva que des équipes d'hôtesses et de stewards sont mobilisées dès le début de la saison estivale pour garantir un bon accueil aux émigrés. Relevant de l'Ecole nationale de tourisme, une trentaine d'étudiants se chargent de l'accueil en orientant et en assistant les passagers à leur arrivée, une fois descendus de l'avion. Une autre équipe d'étudiants est active aussi sur le terrain. «Nous avons mobilisé pour cette opération 150 étudiants qui arboreront un uniforme spécifique», estime un membre de la direction de l'aéroport. Le même responsable indiquera, dans le sillage de l'organisation des services, un projet de «coordination de prestations des taxieurs de service transportant les voyageurs de l'aéroport vers la ville». «Nous nous sommes mis d'accord avec le syndicat des taxieurs et la Direction des transports de la wilaya d'Alger pour signer une convention dans ce sens. Nous voulons que les chauffeurs de taxi qui assurent le transport au niveau de l'aéroport soient conventionnés avec nous», a-t-il promis, avant d'émettre le vœu de voir la direction de l'aéroport consultée avant d'agréer un taxi pour l'aéroport. «Nous avons effectué une démarche dans ce sens auprès de la Direction des transports. On va essayer de conventionner les taxis», a-t-il dit. Pour le nouveau secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires étrangères, chargé de la Communauté nationale à l'étranger, «il y a nécessité de ne ménager aucun effort pour “une application stricte”, durant cet été, des dispositions visant l'amélioration de l'accueil de notre communauté vivant à l'étranger». Autre orientation du même responsable : «L'information à outrance en direction des passagers et leur sensibilisation sur la réglementation douanière notamment pour la déclaration des devises et des objets de valeur introduits au pays». Au niveau de la police des frontières algéro-tunisiennes, il est indiqué que «toutes les conditions garantissant une prise en charge optimale des visiteurs sont réunies au niveau des deux postes malgré leur exiguïté. Un guide intitulé ‘'saison estivale 2010, conseils et infos‘', édité par le secrétariat d'Etat, a été mis à la disposition de la communauté nationale à l'étranger au niveau des deux postes frontaliers dans l'est du pays». Un divisionnaire des douanes soutient pour sa part, que «si la douane met tous les moyens nécessaires à la disposition des passagers pour leur permettre un transit des plus agréables, il reste aussi aux voyageurs de jouer le jeu, notamment lorsqu'il s'agit de déclarations faites aux douaniers dans la mesure où le couloir vert est accordé à la base de la déclaration du passager».