Photo : A. Lemili De notre correspondant à Constantine A. Lemili «Le chemin de l'enfer est pavé de bonnes intentions.» Inversement, celui du paradis aurait parfois tendance à l'être de mauvaises. Le paradis c'est celui auquel aspiraient quelques agents de l'hôpital du Khroub qui ont pris attache avec le journal pour dénoncer, nous citons, «la prestation des gardes au niveau du service des urgences et de la pédiatrie par des médecins recrutés dans le cadre du pré-emploi au moment où une quarantaine de permanents seraient aux abonnés absents, le service de radiologie souffrirait dramatiquement d'un déficit de films et le laboratoire de réactifs. A hauteur du service de maternité, toutes les patientes qui se présentent sont orientées vers le CHU et souvent en l'absence de moyens d'évacuation d'urgence en cas d'accouchement imminent. Le bloc opératoire ne fonctionne pas mais est mis étrangement à la disposition de praticiens n'appartenant pas à l'établissement les week-ends... justement, pour des interventions au profit de proches et de patients venant de régions éloignées. Un cadre qui aurait dû être affecté à une EPSP dans le cadre du découpage décidé par la tutelle a été maintenu en poste par établissement d'un arrêt de travail complaisant pour maladie de longue durée et enfin... un climat de terreur à l'intérieur de l'enceinte». D'autres griefs mais beaucoup plus relevant de détails évoqués avec M. A. Benmhidi qui y a répondu sans faux fuyants, les démontant ou moins les justifiant...preuves à l'appui.Nous nous en sommes donc tenus à ce qui pénaliserait en premier les personnes se présentant à l'hôpital pour une raison ou une autre et certainement pour tout ce que pourrait subir leurs familles et proches en matière d'inconvénients du genre.A la réception de notre questionnaire faxé, A. Benmhidi, a interrompu son congé et nous a reçus en son bureau accompagné de M. Nadir T., directeur des moyens. L'entretien s'est conclu par une visite aussi inopinée que spontanée dans plusieurs structures ; la première impression qu'en tirerait toute personne étrangère est qu'elle ne se trouverait pas dans un établissement public de santé mais dans une clinique privée d'un pays occidental parmi les plus évolués.En fait de climat de terreur à l'intérieur de l'établissement, il y a lieu de concéder que l'ambiance est à l'harmonie dans les couloirs, les services, l'admission, la cafétéria et force a été de constater que, au-delà du respect qu'impose la hiérarchie et les statuts mutuels et les rapports professionnels, le personnel témoigne au directeur une relation affective difficile d'être suspectée de mise en scène.«Vos questions ? Il n'y aucun problème, parlons-en !» s'engagera de brûle-pourpoint A. Benmhidi.«Jamais l'établissement n'a désigné pour des prestations de garde la catégorie professionnelle de médecins que vous avez évoqué. Nous vous en donnons pour preuve la liste établie pour le mois d'août et vous remarquerez aisément, d'autant plus que vous devez connaître quelques une parmi les médecins qu'il ne s'agit que des professionnels appartenant à l'établissement depuis bien longtemps.» C'était bel et bien la réalité et en l'espace d'un mois et compte tenu de l'absence pour cause de congé d'une partie du corps médical, un même médecin était programmé pour trois, voire quatre gardes pour le mois.«La maternité ! Bien sûr, je vous confirme que des patientes sont orientées souvent vers le CHU sauf qu'il y a lieu de nuancer la nature des cas évoqués ou du moins leur spécificité. Il s'agit des primipares, autrement dit celles qui enfantent pour la première fois et dont souvent la grossesse a été compliquée ou l'accouchement se présenterait mal. Vous savez notre structure ne dispose pas de gynécologue et il demeure donc entendu, légitime et responsable pour une sage-femme d'évacuer toute démarche ou acte aventuriste en prenant en charge un accouchement dont les conséquences, tel un boomerang, pourraient lui revenir fatalement à la figure et créerait tout aussi un très grand préjudice à l'hôpital ou contribuerait à établir arbitrairement une mauvaise réputation». Dont acte, serions nous tenté de dire parce qu'il n'y a franchement pas de contre-argumentaire à apporter. Un petit tour nous permettra de constater alors la présence dans leur lit, leur bébé à coté de patientes dont l'accouchement ne présentait aucun risque. Une satisfaction quasi générale des malades hospitalisés et du personnel «Le service de pédiatrie. Nous n'avons aucune gêne à nous vanter d'avoir imaginé et conçu sans nul doute le meilleur service de pédiatrie du pays si n'est au Maghreb, les enfants sont très bien pris en charge et leur mère tout aussi quand des considérations exigent sa présence et en général c'est le cas. Les repas, et en l'espèce pour l'ensemble des malades, sont étudiés et établis par une équipe de diététiciens, servis dans des boites isothermes qui gardent en l'état (chaud ou froid) le contenu pendant trois heures.» Pédiatrie, maternité et nurserie sont l'objet d'une propreté rare pour ne pas dire impossible à trouver ailleurs «même dans une clinique privée» soulignera d'ailleurs le directeur de l'établissement. Nous saurons auprès du personnel, toutes natures confondues, et plus particulièrement des patientes que «tout se passe bien», certaines parmi elles allant jusqu'à jurer qu'elles «se trouvaient plus sécurisées et mieux prises en charge dans le service que chez elles». Nous saurons que Benmhidi, qui a eu l'opportunité de séjourner à titre privée aux Etats-Unis, aurait pris comme exemple le service de pédiatrie d'un hôpital de New York pour agencer celui du Khroub. Avec les moyens et les matériaux disponibles et l'imagination des concepteurs locaux forcément. Là également nous avons été étonnés par le choix des matériaux, des coloris, de l'architecture et l'agencement discipliné des voies d'accès. Le tout conférant la plus grande sérénité aux lieux.«Nous nous vous apprendrons rien en vous disant que le laboratoire ou la radio manquent effectivement de réactifs ou de films et ce n'est évidemment pas faute de disposer de fonds pour ça ou encore de volonté pour les acquérir. C'est tout simplement parce que nous sommes tenus de nous approvisionner auprès de fournisseurs institutionnels et malheureusement ces mêmes fournisseurs n'arrivent pas pour des raisons qui leurs sont propres à donner satisfaction à toutes les structures éparpillées sur le territoire.» Une vérité lancée par notre interlocuteur non pas pour se dédouaner de la question ou imputer les responsabilités à d'autres mais juste pour rappeler qu'il y a des réalités dont les tenants et aboutissants échappent un peu à tout le monde.«Quant au bloc opératoire, il ne fonctionne pas je vous le concède sauf qu'il faudrait préciser qu'en période estivale et là c'est une question de logique, ce genre de structure est mis en veille sauf urgence. Nous ne vous cacherons pas que parfois le bloc est exceptionnellement ouvert au profit de chirurgiens rompus pour une intervention du genre. Toutefois, il ne s'agit pas d'abord d'une règle et ces pratiques sont courantes, de notoriété publique et tolérées par la hiérarchie», soulignera assez franchement et sans détours A. Benmhidi, lequel enchaînera sur le cas du cadre qui se trouverait en congé de maladie de longue durée pour contourner une décision d'affectation à une autre structure. «Vous savez, cette personne est utile et très efficace chez nous. Nous savons que ses compétences ne seraient pas mises à contribution en cas d'affection à une EPSP en raison de la dimension de celle-ci et de son spectre d'activité réduit. Notre établissement est tout de même imposant, emploie plus de 500 personnes dont les deux tiers appartiennent aux corps médical et paramédical.»Sur quel compte alors mettre toute cette agitation ? La réponse, c'est le directeur de l'établissement qui la fournit : «Vous n'êtes pas sans savoir que tout ne peut pas être bien dans le meilleur des mondes. Nous sommes fiers et satisfaits de ce que nous réalisons ici avec une équipe homogène. Nous sommes fiers parce que ce que nous faisons allège énormément la douleur et les souffrances des autres, la solitude de ceux qui sont hospitalisés, l'assurance de leurs proches qui savent qu'ils sont entre de bonnes mains. Le reste n'est que verbiage et ce ne sont certainement pas des révolutions de palais qui nous décourageront d'autant plus si ces turbulences ne sont entretenus que par des personnes comptabilisables sur les doigts d'une main mais dont nous savons la capacité de nuisance importante et nous en donnons pour preuve votre démarche et heureusement et surtout l'attitude déontologique connue à votre journal.»Nous reviendrons sur les dotations de pointe acquises par l'hôpital du Khroub notamment, en sus d'un dopler, numérisateur qui permettrait de mettre en réseau interne toutes les données concernant un malade et l'échange visuel entre les services où celui-ci se trouverait, équipement de radiologie, d'un scanner (3,5 milliards de centimes) actuellement en voie d'être mis en service et qui devrait régler énormément de problèmes dus aux déplacements incessants et surtout des désagréments causés pour ce faire aux malades hospitalisés. Il y a quatre ans, La Tribune publiait un article sur le même établissement avec ce titre «Hôpital du Khroub, une sale réputation ?» et faisait le constat d'une totale contradiction entre la rumeur et la réalité. En quatre ans, il y a eu un bond qualitatif incontestable et tout a encore positivement évolué. A contrario quelques mentalités semblent être restées en l'état.