La croissance dans la zone euro a fortement accéléré au deuxième trimestre, sous l'impulsion de l'Allemagne dont la performance record a plus que compensé les difficultés de l'Espagne, de l'Irlande et de la Grèce. La hausse bien plus forte que prévu de 2,2% du PIB allemand, couplée à une croissance moins impressionnante mais solide de 0,6% en France, a permis à l'économie de la zone euro d'avancer de 1,0% par rapport aux trois premiers mois de l'année, après +0,2% au premier trimestre. Pour les seize pays qui partagent l'euro, il s'agit de la croissance trimestrielle la plus forte depuis trois ans, et elle dépasse l'expansion d'environ 0,6% enregistrée aux Etats-Unis sur la même période. L'ampleur des chiffres publiés vendredi par Eurostat a surpris la plupart des économistes mais ils continuent de prévoir un ralentissement au second semestre en raison des politiques de restriction budgétaire annoncées partout en Europe et d'un environnement international moins favorable. Le ministre allemand de l'Economie a d'ores et déjà annoncé que Berlin poursuivrait son plan d'économie de 80 milliards d'euros en dépit de la croissance plus forte que prévu qui se traduira par des recettes fiscales accrues. La hausse de 2,2% du produit intérieur brut allemand, due en bonne partie aux exportations, représente la plus forte croissance depuis 1987, avant la réunification. Le gouvernement avait une prévision de 1,4% pour l'ensemble de l'année mais les économistes jugent possible un chiffre de plus de 3% même en cas d'expansion modérée aux troisième et quatrième trimestres. «On a déjà des signes de ralentissement de la demande mondiale et la croissance allemande devrait donc ralentir. Une reprise plus soutenue exigerait un redressement clair de la demande intérieure, ce qui semble peu probable avec la consolidation budgétaire qui entrera en vigueur l'an prochain», observe Jennifer McKeown, chez Capital Economics à Londres.En attendant, les chiffres mirobolants du deuxième trimestre ont fait monter l'euro sur le marché des changes après des mois de nouvelles négatives concernant la dette des pays «périphériques», Grèce en tête, qui ont été jusqu'à faire craindre un éclatement de la zone euro. L'économie allemande, sensible aux exportations, se détache ainsi du reste du peloton, et pas seulement des pays à la traîne comme la Grèce, le Portugal, l'Irlande ou l'Espagne.La France, plus tributaire de sa demande intérieure, a enregistré une croissance de 0,6% due à un rebond de la consommation des ménages et de l'investissement, alors que son commerce extérieur a déçu. L'Italie, troisième économie de la zone euro, a annoncé la semaine dernière une croissance de 0,4%. La reprise est encore plus lente pour l'Espagne (+0,2%) qui, comme l'Irlande, avait profité à plein d'un boom de la construction avant 2007.Quant à la Grèce, en pleine purge budgétaire après avoir bénéficié en mai d'un plan de sauvetage de la zone euro, elle a subi au deuxième trimestre une contraction plus forte que prévu de 1,5% de son PIB.Cette disparité de situations rend bien ardue la tâche de la Banque centrale européenne, chargée de déterminer une politique monétaire unique pour les 16 pays de la zone.La BCE prévoit pour les prochains mois une reprise «modérée et toujours irrégulière» et les chiffres du deuxième trimestre, même meilleurs que prévu, ne remettent pas en cause ce scénario. «La crise de la dette souveraine n'est pas complètement passée. La demande intérieure reste faible en Europe et la consommation des ménages ralentit» constate Nick Kounis, économiste chez ABN Amro.«Les statistiques du deuxième trimestre sont très impressionnantes mais c'est bien un ralentissement qui se profile pour l'économie européenne».Le président de la BCE, Jean-Claude Trichet, a estimé la semaine dernière que les troisième et quatrième trimestres seraient «considérablement moins dynamiques» que le deuxième trimestre «vraiment exceptionnel», même s'il a reconnu que les indicateurs déjà disponibles étaient plutôt bons.La production industrielle a baissé en juin dans la zone euro, donnant à penser que le deuxième trimestre a moins bien fini qu'il n'a commencé. Mais les indices PMI de juillet, qui mesurent l'activité des entreprises, ont dépassé les prévisions, suggérant un rythme d'expansion toujours soutenu. R. I.