Photo : S. Zoheir Par Smaïl Boughazi Le programme de modernisation des Douanes algériennes est en phase de se concrétiser sur le terrain. Cette institution chargée de protéger l'économie nationale est sur le point de connaître une mutation profonde à la faveur du programme lancé en 2007 et doté d'un budget de l'ordre de 10 milliards de dinars. En fait, en plus des moyens matériels mobilisés pour permettre aux agents des Douanes d'accomplir leur tâche avec efficacité, le volet réglementaire a connu, lui aussi, récemment des changements importants. Ainsi, selon le directeur des ressources humaines auprès de la direction générale de cette institution, M. Boudjaltia Djazouli, rapporté par l'APS, l'administration douanière a amendé le règlement intérieur régissant le corps des douaniers et ce, à travers l'introduction de mesures visant à renforcer le contrôle interne et réduire la durée d'affectation de ses agents dans certains postes. Le règlement intérieur amendé Il s'agit, selon la même source, d'un nouveau dispositif «qui sera appliqué dans toute sa rigueur d'ici la fin de l'année» en même temps que la mise en œuvre du nouveau statut du douanier. Cet amendement a été rendu nécessaire, souligne M. Djazouli, par «le besoin d'assainir et de réorganiser certains services douaniers pouvant constituer une source de corruption et de malversations». Concrètement, le nouveau règlement portera sur le comportement du douanier au quotidien aussi bien vis-à-vis des usagers que de l'administration ainsi que sur l'éthique douanière. Et dans cette logique, les responsables des Douanes affirment que «tout dépassement sera sévèrement sanctionné» en vertu de ce dispositif. Cette nouvelle version du règlement intérieur des Douanes prévoit, en effet, un partage des responsabilités entre l'agent douanier et son supérieur hiérarchique en cas d'infraction : «Si un agent douanier commet un dépassement, son supérieur sera sanctionné au même titre que lui pour ne pas avoir exercé de contrôle sur son subordonné», explique M. Boudjaltia Djazouli. Il ajoutera que les responsables sont sommés, en vertu de ce dispositif, de «rendre compte de leur travail et de celui de leurs subordonnés». Toutefois, il déclare que la sanction du supérieur n'est prononcée qu'après définition des responsabilités : «Nous allons utiliser toute la rigueur qu'il faut pour sanctionner. Mais avant de recourir aux sanctions, il faut faire de la prévention grâce à un contrôle interne pour que les faits illégaux soient perceptibles». Le deuxième point touché par cet amendement est la réduction drastique des durées d'affectation ou de mobilité des agents douaniers, notamment pour certains postes pouvant constituer une source de corruption. La durée de mobilité, fixée actuellement entre un et trois ans, sera réduite à six mois pour des «postes jugés sensibles» comme celui du liquidateur qui est l'agent chargé de la liquidation des déclarations de marchandises au niveau des ports et aéroports. Cette mesure mettra fin à l'immobilité de certains agents douaniers qui occupent, parfois, ces postes durant une trentaine d'années, situation qui favorise souvent les actes de corruption. La Direction des Douanes est aussi en train de revoir les missions du liquidateur pour introduire une dualité du contrôle (double contrôle) dans la liquidation des marchandises et aussi instituer un autre contrôle indépendant sur ces agents. Ces nouvelles missions seront définies par un texte, en cours d'élaboration, qui va réorganiser les services extérieurs des Douanes dont la nouvelle réorganisation prévoit également que la valeur des marchandises, définie actuellement par un agent douanier, soit établie par un bureau de la valeur «afin que cette mission sensible ne soit pas la prérogative d'un seul agent», note M. Djazouli. Et dans ce sillage, la direction des Douanes prévoit de créer un bureau de la valeur au niveau de chaque inspection divisionnaire. Par ailleurs, cette institution compte informatiser tous ses services pour éliminer progressivement l'écriture manuelle, source d'erreurs et de malversations, et ce, dans le cadre de l'élargissement de l'utilisation du système d'information harmonisé SIGAD 2 qui va désormais intégrer les données du contentieux des services centraux et extérieurs, les ressources humaines, et la direction des équipements. S'adapter à une réalité complexe L'organigramme des Douanes pourrait aussi connaître des perfectionnements puisque la DGD projette de réorganiser ses directions régionales et ses inspections divisionnaires en procédant à un découpage territorial qui va notamment définir de nouveaux postes organiques et fonctionnels. Il faut dire enfin que les réformes engagées par les Douanes ces dernières années ne sont qu'une réponse à une réalité économique qui s'est imposée d'elle-même. L'ouverture de l'économie algérienne son le monde a entraîné d'innombrables phénomènes dangereux, ce qui a fait que les missions des Douanes ont connu un bouleversement. Cette institution était dans l'obligation de s'adapter aux changements survenus sur la scène internationale. Sur le plan interne aussi, le défi est colossal puisque, selon les responsables, on dénombre chaque année 4 à 5 cas de corruption et une trentaine de cas de malversation commis par des agents douaniers. Les mêmes chiffres indiquent que les trois commissions de discipline, installées en vertu de la nouvelle réorganisation des services des Douanes, traitent, tous les 45 jours environ, cinq cas de fraude. Et rien qu'au niveau de l'aéroport d'Alger, 15 agents fraudeurs ont été suspendus dernièrement de leurs postes, dont les dépassements ont été interceptés grâce aux outils de contrôle installés, et plusieurs autres agents ont été arrêtés au niveau du fret. Il s'agira donc d'éradiquer ce mal qui ronge l'institution douanière depuis des années. Il y a lieu de rappeler que le plan de modernisation des Douanes (2007-2010), d'un montant de 10 milliards de dinars, permettra à court terme de doter les Douanes d'hélicoptères pour survoler les vastes zones de passage de contrebandiers, de nouveaux scanners de détection, de véhicules et de moyens de communication ultra-modernes. Ces moyens matériels dont seront munies les Douanes seront combinés à un important programme de formation prévu également dans le plan de modernisation des Douanes adopté par le gouvernement.