De notre correspondant à Tizi Ouzou Malik Boumati La septième édition du festival des Raconte-Arts, organisé annuellement par la Ligue des arts dramatiques et cinématographiques (LADC) de la wilaya de Tizi Ouzou, a eu lieu en juillet dernier à Aït Smaïl, un village de la wilaya de Béjaïa. Il est inutile de rappeler que cette édition a encore connu le succès auprès de la population de ce village qui s'est impliquée humainement et financièrement dans l'organisation de ce festival. Les responsables de la LADC, satisfaits de la réussite des précédentes éditions, pensent déjà à la huitième édition prévue en juillet de l'année prochaine, selon son président El Hacène Metref dont l'organisation optera pour un retour vers la wilaya de Tizi Ouzou, à l'occasion de la prochaine édition, avant de repartir en 2012 vers d'autres wilayas, Bouira ou Bordj Bou Arréridj où des villages ont déjà postulé pour abriter la manifestation. Pour la prochaine édition, il s'agira de choisir entre deux villages ayant exprimé le vœu d'accueillir le festival, à savoir Aït Regane, dans la région des Ouadhias, et Taourirt Mokrane à Larbaa Nath Irathen. Il est clair que devant le succès que connaît cette manifestation, d'autres villages par le biais de leurs comités respectifs ou de leurs associations, ne manqueront pas d'exprimer une demande dans le même sens mais le peu de moyens dont dispose la LADC ne lui permet pas de satisfaire toutes les demandes, d'autant plus que les pouvoirs publics n'ont pas encore décidé d'appuyer cette manifestation pluridisciplinaire des plus atypiques, si l'on excepte la contribution, modeste mais régulière du Haut-Commissariat à l'amazighité (HCA) qui offre annuellement au festival la somme de 120 000 dinars. Quand on sait que l'estimation globale faite par les organisateurs à la veille de chaque manifestation tourne autour des 2 500 000 dinars, on comprend aisément que même la contribution de l'ambassade de France estimée à 280 000 dinars, est loin de couvrir toutes les dépenses qu'engendrerait une organisation «normale» du festival des Raconte-Arts.L'on est presque tenté de penser qu'heureusement, cette manifestation ne se déroule pas de façon «normale» puisque cette normalité l'aurait carrément sacrifiée vu la non- implication des structures de l'Etat et d'un nombre correct de sponsors. Parce que pour survivre et maintenir leur activité qui a acquis une dimension internationale, les responsables de la Ligue des arts dramatiques et cinématographiques ont pensé à impliquer dès la première édition qui a eu lieu à Aït Yanni les villageois dans l'organisation. Cela fait très original notamment avec l'engagement des habitants des villages concernés d'héberger les invités. La restauration se fait généralement à la manière traditionnelle comme quand les villageois sortent le couscous dans la «djefna» ancestrale que les invités s'empressent d'entourer dans une magnifique ambiance. Cette manière de faire s'est avérée d'un autre côté très économique dans la mesure où les organisateurs n'auront pas à dépenser de l'argent pour l'hébergement et la restauration. Même les artistes étrangers qui participent à ce festival, conscients des difficultés financières que rencontrent les organisateurs, n'ont pas jugé utile de réclamer frais du billet d'avion. «Les artistes, y compris ceux qui reviennent à chaque édition, paient le billet de leur poche et ne demandent aucune faveur particulière», dit Hacène Metref, le président de la LADC qui exprimera sa gêne devant cette situation, particulièrement à l'égard des participants étrangers qui prennent part souvent aux Raconte-Arts, précisant que l'idéal c'est que l'on trouve des sponsors susceptibles de prendre en charge certaines dépenses dont celle des billets d'avion pour les artistes étrangers, surtout que ce sont des intermittents du spectacle en Europe et cette question de billetterie risque de s'avérer trop lourde pour eux. Il est vrai que les opérateurs économiques ne sont pas vraiment engagés dans les opérations de sponsoring.D'ailleurs, pour la septième édition du festival d'Aït Smaïl, un seul sponsor privé, le gérant d'une petite entreprise du bâtiment BETATEC, a aidé les organisateurs. Pourtant, le festival des Raconte-Arts a plus à raconter dans un environnement culturel carré. Avec une implication des pouvoirs publics, la dizaine de membres de la Ligue des arts dramatiques et cinématographiques de la wilaya de Tizi Ouzou aurait pu donner une plus grande envergure à cette manifestation qui connaît déjà le succès avec ses faibles moyens. Que ce soit pour le conte, le récit, le chant, le théâtre, le cinéma, le spectacle de clown ou la poésie et les rencontres littéraires, toutes les disciplines culturelles et artistiques connaîtront plus de temps de programmation, de participants et d'espace de déroulement.D'ailleurs, le président de la LADC pense carrément à élargir l'organisation du festival à toute une commune au lieu d'un seul village en ce moment. «Toutes proportions gardées, ce sera un mini festival d'Avignon dans l'esprit si l'on reçoit une aide conséquente» dit Hacène Metref, précisant que le festival prendra une nouvelle envergure avec la programmation de spectacles dans toutes les villages d'une même commune avec le choix d'un village comme le lieu principal de la manifestation. La meilleure façon en somme de socialiser la culture et les arts en allant les présenter dans les villages les plus reculés de la wilaya, et même au-delà. Avoir plus de moyens, de l'Etat et/ou des sponsors privés, pour que tous les villages d'une même commune vibrent en même temps au rythme d'activités culturelles et artistiques, au grand bonheur des enfants qui pourront, eux aussi profiter de l'ambiance mais aussi et surtout des ateliers de dessin et de récit mis sur pied par les organisateurs de la LADC et tous les invités artistes.