Photo : Riad De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Malgré son interdiction formelle dans les établissements scolaires, conformément à la circulaire ministérielle, le châtiment corporel est toujours en vigueur, souvent «en catimini». Il touche tous les paliers de l'enseignement, y compris le cycle primaire et moyen. La règle tape encore la main des écoliers ! Certains enseignants usent même de l'insulte et l'humiliation envers leurs élèves.Pour s'en convaincre, il suffit de demander aux enfants scolarisés. Tout de go, ils vous racontent l'acharnement de certains enseignants. Pourtant, la directive ministérielle numéro 5 datant du 9 février 2003 portant «interdiction de la pratique du châtiment corporel à l'intérieur des établissements scolaires» est on ne peut plus claire. L'enseignant et l'éducateur ne doivent en aucun cas «faire souffrir» l'élève. La réalité est autre. Parfois, la violence physique se double d'une violence psychologique.«Qui n'a pas goûté au bâton lorsqu'il fréquentait les bancs de l'école ? On a tous été un jour puni pour avoir oublié des devoirs ou manqué à la discipline en classe», dira le directeur de l'éducation de la wilaya de Constantine, M. Allam, qui cependant insiste sur la nécessité de sévir et de sanctionner les enseignants qui se rendent coupables de châtiment corporel, en application de la réglementation en vigueur. «Lorsque malgré ces mises en garde, des enseignants dépassent les limites de la correction, cela interpelle la commission de discipline à convoquer la partie fautive», dira un inspecteur d'académie.Néanmoins, si sous d'autres cieux cette méthode «coercitive» est en voie d'extinction, non seulement en milieu scolaire mais également dans les foyers, il n'en est pas de même en Algérie où souvent l'enfant subit des supplices et supportent sans en parler à ses parents de crainte que ces derniers ne prennent le parti de l'enseignant et l'expriment avec une autre correction.Pourtant, pédagogues, psychologues et pédopsychiatres s'accordent à dire que cette forme d'éducation est contraignante et ne règle en rien «les états de turbulences chez l'enfant», au contraire. Seule la communication, que ce soit dans les écoles par le truchement des éducateurs ou à la maison avec les parents, permet une entente agréable entre l'enfant scolarisé et son milieu. Le recours à la violence pour imposer la discipline relève d'une faiblesse qu'il advient à tout prix de pallier, explique un sociologue renvoyant cette force le plus souvent à des contraintes que vit l'enseignant. «Lorsque la classe déborde parfois avec plus de 50 élèves, l'éducateur perd son contrôle pour instaurer le calme et parvenir à donner sa leçon. Seule échappatoire : il recourt à la force. Cela étant un exutoire, car un bon enseignant, par-dessus tout pédagogue, ne devrait pas laisser libre cours au comportement agressif», soutiendra-t-il.En ce qui concerne le nombre de recours introduits par les parents auprès de l'académie, du moins pour ce début d'année, aucune plainte n'a été enregistrée, apprend-on de source fiable. A ce propos, nombre de pédagogues et responsables de l'éducation déplorent le silence des parents qui ne se manifestent pas pour demander aux enseignants et directeurs d'établissements des explications quand leur enfant est victime de maltraitance dans la classe. «On n'intervient que quand des séquelles sont visibles», témoigne un adjoint de l'éducation.En fait, beaucoup de parents d'élèves ignorent le droit de leur enfant en milieu scolaire, comme ils ignorent le règlement que l'école doit appliquer. D'où le rôle primordial des fédérations et associations censées jouées le rôle de courroie de transmission entre l'institution éducative et les parents. Pour mettre un terme à ces agissements bannis de surcroît par la loi algérienne, il faut que les parents sortent de leur mutisme et s'impliquent. Autrement dit, il faut qu'ils se constituent en associations de parents d'élèves et fassent valoir leurs droits et ceux de leurs enfants. Les associations de parents d'élèves à Constantine sont interpellées pour baliser le chemin et porter les doléances des parents auprès de la commission de discipline de l'académie. Il ne suffit pas de récolter les plaintes. Il est grand temps de forcer l'application stricte de l'interdiction de tout châtiment corporel et atteinte à l'intégrité physique et/ou mental de nos enfants. Il faut mettre fin à ces comportements traumatisants de certains enseignants et à la passivité, laisser-aller ou silence complices de leurs responsables. L'année dernière, Constantine n'a pas enregistré beaucoup de cas de «châtiment» si l'on se fie aux informations émanant des différentes structures. Pour l'année en cours, aucun chiffre sur le sujet n'a filtré. Mais les chiffres officiels ne servent qu'à établir des bilans et comptes rendus officiels bien ficelés. C'est un faire-valoir pour le «tout va bien, madame la marquise» que chaque responsable adresse à son supérieur hiérarchique. Quant à la réalité, elle sort de la bouche des enfants qui ont toujours peur de leurs enseignants, pas cette peur teintée de respect, mais cette peur panique qui les fait pleurer, perdre l'envie de manger, voire de dormir.