Plusieurs secteurs de Karachi, la plus grande métropole pakistanaise, étaient quasiment transformés en ville morte hier, après une nouvelle attaque qui a porté à 51 le nombre de personnes tuées en quatre jours dans la ville. Des magasins et échoppes ont été incendiés à Malir, quartier limitrophe de Karachi, où la police cherchait à contrôler la foule en train de se rassembler, selon les images diffusées par les chaînes de télévision. Les violences ethniques, politiques et religieuses sont monnaie courante à Karachi, immense ville portuaire de quelque 16 millions d'habitants et capitale commerciale du Pakistan. Mais cette année a été particulièrement sanglante : jusqu'en juin, on comptait déjà 300 «assassinats ciblés», soit deux fois plus qu'en 2009.La plupart de ces assassinats sont attribués aux gangs contrôlés par les partis politiques. Et la vague de violence en cours intervient avec l'élection de dimanche, qui vise à remplacer un élu provincial assassiné en août.Dans la dernière attaque, dans la nuit du mardi, des hommes armés ont ouvert le feu sur une décharge située dans un marché, tuant 11 personnes, dont huit originaires du Balouchistan, selon la porte-parole du gouvernement provincial. Elle a ajouté que 55 suspects ont été arrêtés dans le cadre des violences des derniers jours, et que certains sont liés à des partis politiques locaux. Mercredi, alors que les forces de l'ordre étaient déployées en patrouille dans plusieurs quartiers, nombre de magasins étaient restés fermés et les transports publics se faisaient rares. Les deux partis les plus impliqués dans les violences à Karachi sont le mouvement Muttahida Quami (MQM) et le Parti national Awami, représentant chacun un groupe ethnique différent. Le MQM est proche de la population de langue ourdoue, originaire d'Inde et installée à Karachi peu après la création du Pakistan en 1947. Le MQM, qui se revendique laïc, dénonce la talibanisation de Karachi, qu'il reproche au parti Awami, lequel représente les pachtounes originaires du nord-ouest, bastion des talibans.Raza Haider, le député provincial tué en août était un membre important du MQM. Le parti Awami a, un temps, brigué ce siège vacant, avant d'annoncer qu'il boycottait finalement cette élection partielle, accusant le MQM de vouloir fausser le vote. Les fusillades à Karachi ont commencé à peu près au moment de cette annonce.Le MQM accuse également le Parti du peuple pakistanais (PPP), qui contrôle le gouvernement provincial, de ne rien faire contre les suspects de crimes à teneur politique. R. I.